Tribune —
Après les neiges d’antan
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« Pas question ici de céder à la peur moyenâgeuse, ni de revenir à la bougie… Neige il n’y a pas ? Neige il y aura, foi de progressiste ! »
Le sommet de Durban sur le climat ? Oh, c’est loin, et puis ça concerne les îles du Pacifique, non ? D’ailleurs, les inondations, il y en a en Indonésie ou en Chine – c’est bien triste, mais enfin, ce n’est pas chez nous. De toute façon, vous ne croyez pas qu’il y a plus urgent à résoudre que le réchauffement, comme problème, avec la crise, les banques, la croissance en berne ? Alors le climat, bonjour !
On osera imaginer que de telles pensées ont parcouru le cerveau de quelques-uns des organisateurs de Jardin des neiges, une manifestation qui s’est tenue à Lyon du 23 au 26 novembre. Des mètres cubes de neige artificielle y ont été apportés à grands frais pour donner envie aux petits Lyonnais d’aller skier. Admirable idée ! Mais cette opération publicitaire a exigé de la neige artificielle, car de neige naturelle sur les montagnes, il n’y a pas plus que de cheveux sur la tête à Mathieu…
Les bulletins d’enneigement des stations de ski indiquent que la dernière neige est tombée en mars. La saison s’annonce mal – comme de plus en plus souvent. Aussi les stations fourbissent leurs armes, c’est-à-dire des canons à neige, qui vont puiser dans des réserves d’eau rares – la sécheresse a touché aussi les montagnes – tout en consommant moult énergie, provoquant l’émission de 2 à 8 tonnes de gaz carbonique par hectare. Pas question ici de céder à la peur moyenâgeuse, ni de revenir à la bougie… Neige il n’y a pas ? Neige il y aura, foi de progressiste !
En fait, ce qui se passe dans nos massifs montagneux est une première manifestation du changement climatique. Comme l’a constaté le projet de recherche Scampei sur le climat des zones de montagnes, dont Météo France a publié la conclusion, lundi 28 novembre, « les résultats s’accordent sur une diminution significative de la couverture neigeuse au-dessous de 2 000 m d’altitude dès les prochaines décennies ». De son côté, l’Observatoire savoyard du changement climatique observe que « les zones de montagne seront les premières touchées par de longues sécheresses des sols à partir de la moitié du siècle ».
Les montagnards sont notre avant-poste face au changement climatique. Leur économie s’est développée depuis quarante ans sur le tourisme de ski. Celui-ci, du fait du réchauffement, commence à se contracter. Le choix ? Continuer aveuglément, jusqu’à la dernière goutte d’eau. Ou réfléchir maintenant, et engager la transition écologique.