Tribune —
Le jeûne, outil de la sobriété heureuse
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« Le jeûne est un moyen privilégié de se préparer à la société de sobriété heureuse qui désormais s’impose à nous comme le seul vrai recours à la crise écologique »
Ceux qui ont pour habitude de s’abstenir volontairement de toute nourriture pendant un temps donné, à intervalles réguliers (deux à trois jeûnes annuels de 6 jours chacun, en ce qui me concerne), savent d’expérience tout le bénéfice que l’on peut retirer d’une telle discipline. Le corps, mis au repos, entreprend en effet une salutaire opération de nettoyage intérieur. Il élimine le superflu et les tissus malades tout en préservant les tissus sains. « C’est une opération sans bistouri » (Erwin Hof). Il détoxique (ou détoxine) l’organisme et, ce faisant, le vitalise. Particulièrement indiqué pour les personnes qui ont tendance à faire de l’hypertension artérielle ou dont les taux de cholestérol et de triglycérides sont trop élevés, le jeûne est encore bénéfique pour celles dont la glycémie flirte avec les maxima autorisés, celles qui ont trop d’acide urique ou sont victimes de polyglobulie. J’arrête-là cette liste de recommandations que les (trop rares) médecins spécialisés dans le jeûne préventif et/ou thérapeutique peuvent longuement dérouler, avec force arguments.
Et exprime ma conviction intime que si les Français savaient s’arrêter de manger de temps à autre, en suivant un protocole ad hoc fort simple, ils seraient tout simplement en meilleure santé. Ne serait-ce que parce que le jeûne induit à terme l’habitude de manger mieux. C’est-à-dire moins vite, moins gras, moins sucré et salé, moins de viande et plus de légumes, de fruits et de céréales. Félicitons nous, à ce sujet, que l’équation frugalité = santé = longévité, qui relève du bon sens, fasse désormais consensus.
Une autre idée fait son chemin : nous sommes corps-âme-esprit. Il ne faut rien séparer. Et, même, l’univers entier est régi par un principe d’unité. Le fameux principe d’interdépendance, particulièrement mis en lumière par les bouddhistes. Le rapport avec le jeûne ? Celui-ci : dans le même temps qu’il fait du bien à notre corps, il nous aide à nous détendre, à prendre du recul avec les soucis quotidiens, à nous poser. Pour les croyants, il est un rappel que « l’homme ne se nourrit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » Il creuse en nous un plus grand désir d’intériorité, d’harmonie. Il nous ouvre à la souffrance d’autrui et nous rend plus assoiffé de justice et d’égalité entre les hommes.
Enfin, last but not least, il est à mes yeux un moyen privilégié de se préparer à la société de sobriété heureuse qui désormais s’impose à nous comme le seul vrai recours à la crise écologique. Moins de biens, plus de liens. Ce slogan est décidément promis à un bel avenir. Et tout jeûneur ne peut que le faire sien. La faim essentielle n’est-elle pas la faim de relations ? Une faim d’amour, d’amitié et de reconnaissance ?