Le pôle écologique du PS propose le Revenu maximal admissible (RMA)
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Le RMA pourrait être fixé à 200.000 ou 250.000 euros. Les recettes financeraient une politique écologique.
Aller vers un revenu maximal admissible
pour favoriser les projets utiles et durables
En cette période de crise, l’accroissement considérable des écarts de revenus constaté depuis quelques temps devient un sujet majeur et pose un triple problème social, écologique et républicain.
C’est pourquoi nous lançons un appel pour aller vers un revenu maximal admissible, pour favoriser les projets utiles et durables.
Les modalités possibles d’un tel mécanisme, sur lesquelles nous avons travaillé et qui figurent dans le document ci-dessous, peuvent naturellement être discutées. Mais il nous paraît important que cette perspective soit tracée. Elle permet de concilier simultanément la justice sociale, l’efficacité économique et la révolution écologique, et de donner un sens lisible au nouveau modèle de développement que nous voulons construire.
Nous proposons que le Parti socialiste, lors de sa convention consacrée à ce sujet, débatte et adopte cette orientation, une de celles, parmi d’autres, qui incarnera la rupture dont nous avons besoin.
Signataires : Isabelle Besnault, Christophe Caresche (député de Paris), Geneviève Gaillard (députée des Deux-Sèvres), Géraud Guibert (porte-parole du pôle écologique), Roger Leron, Michel Mousel, Philippe Plisson (député de la Gironde), Maurice Ronai, Benoît Thieulin, Philippe Tourtelier (député d’ile-et-Vilaine)
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Texte complet
Aller vers un revenu maximal admissible pour favoriser les projets utiles et durables :
Le dispositif possible
La gauche commence à définir son projet politique pour 2012. Cette étape est essentielle car elle ne pourra battre la droite sur le seul rejet de Sarkozy, mais sur la base de propositions concrètes, réalisables et alternatives. Il ne suffit pas de prévoir, à juste titre, la remise en cause des nombreuses mauvaises décisions qui ont été prises depuis trois ans, il faut trouver le chemin, par des idées nouvelles, d’une alternative renouvelée à la politique actuelle.
En cette période de crise, l’accroissement considérable des écarts de revenus constaté depuis quelque temps devient un sujet majeur. Le phénomène le plus marquant est l’arrêt, depuis vingt ans, du mouvement séculaire de réduction des inégalités. Les très hauts revenus augmentent de façon spectaculaire : selon l’Insee, l’accroissement de ceux des très aisés[1] a atteint 39% entre 2004 et 2007, contre 9% seulement pour les autres catégories de la population. Cette évolution vient recréer une nouvelle aristocratie de l’argent, une véritable « ploutocratie », qui, par derrière, joue un rôle majeur dans les décisions publiques.
Elle est d’autant plus choquante qu’elle ne correspond pas toujours, loin s’en faut, à une prise de risque ou un talent particulier, mais qu’elle est le plus souvent le résultat de phénomènes de rentes ou de pratiques abusives sur les marchés financiers.
Cette situation pose un triple problème social, écologique et républicain : elle ne favorise elle génère un sentiment majeur d’injustice dans la population ; elle entretient une élite financière hyper consommatrice autorisée à gaspiller de manière outrancière les ressources de la planète ; elle met gravement en cause le modèle républicain, dont une des composantes fondatrices est la recherche de l’égalité.
Pour les classes moyennes, elle représente une véritable double peine, la menace de déclassement s’accompagnant, sous ses yeux, de l’existence d’une surconsommation ostentatoire qui mine la légitimité d’un discours écologique de modération. Pour les catégories populaires, elle accentue ce sentiment de ne pas appartenir au même pays ou même monde, ce qui joue un rôle majeur dans la crise démocratique.
Contrairement à ce que suppose la pensée libérale, elle est enfin loin de garantir que la richesse ainsi gagnée sera utile à l’économie et à l’intérêt général.
Pour y faire face, plusieurs propositions sont indispensables, mais insuffisantes, car défensives (comme la suppression du boucler fiscal), à finalité strictement budgétaire (comme la création d’une nouvelle tranche d’impôt sur le revenu) ou concernant les seuls salaires (comme l’encadrement des écarts de rémunération dans une entreprise). Nous devons avancer des idées nouvelles, qui caractérisent pleinement le sens de la politique que nous voulons mener.
C’est pourquoi nous proposons une réforme de fond, à triple dimension sociale, écologique et républicaine. L’objectif est d’aller vers la création d’un revenu maximal admissible permettant de mieux encourager les projets utiles et durables.
Au-delà d’un certain seuil, fixé de manière relativement élevée, par exemple entre 200 000 à 250 000 € de revenu par personne et par an, et qui peut être différentiée selon sa nature (travail ou rente), le surplus devrait être obligatoirement investi dans des projets productifs respectant les principes du développement durable (industries propres, bâtiment locatif à basse consommation, création d’entreprises, recherche et développement,...). À défaut, la personne se verrait appliquer, au-delà de ce seuil, un taux d’impôt sur le revenu très majoré, y compris par rapport à celui d’une éventuelle nouvelle tranche supérieure du barème d’imposition.
Cette mesure constituerait un vrai changement, sur deux plans :
- pour la première fois, il serait reconnu que gagner beaucoup d’argent n’est certes pas illégitime en soi, mais qu’au-delà d’un seuil (élevé), ce revenu doit être utilisé pour des activités utiles à la société. Il ne s’agirait donc pas de prélever des impôts supplémentaires ou de décourager le travail ou la prise de risque, puisque l’arme fiscale ne serait utilisée que de manière dissuasive, en dernier recours, mais de faire en sorte que la richesse de quelques-uns soit utilisée au mieux ;
- la gauche montrerait qu’il est possible de concilier simultanément la justice sociale, l’efficacité économique et la révolution écologique. Le risque de « délocalisation fiscale » serait fortement réduit par le fait que ces revenus ne sont pas « confisqués » ni même stérilisés, mais simplement orientés obligatoirement vers des investissements à la fois utiles et rémunérateurs.
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[1] L’Insee nomme « très aisés » les ménages appartenant au millième de la population ayant les revenus les plus élevés, soit environ 60 000 personnes ayant un revenu par unité de consommation supérieur à environ 225 000 €.