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« Le sang des fleurs », ou quand l’écologie rencontre la science-fiction

2025, Finlande. Orvo, apiculteur, inquiet de l’effondrement des colonies d’abeilles qui s’est considérablement aggravé, tombe par hasard sur un étrange accès vers une dimension parallèle d’où l’homme semble absent... Avec Le sang des fleurs, Johanna Sinisalo signe un roman écologique, engagé, à la beauté oscillant entre science-fiction et fantastique.


2025. Orvo, le narrateur, dirige une entreprise de pompes funèbres en Finlande : « La mort est (son) métier. (Il) l’aborde avec calme et sérénité ». Et un certain humour dû à la distance qu’il pose face à la grande faucheuse qu’il définit comme « un besoin négatif ». « Comme le PQ quand il n’y en a pas. Le monde se dérobe sous vos pieds. L’événement est peut-être totalement inattendu. C’est peut-être la première fois. Quelque chose est devenu désagréablement encombrant et il faut l’évacuer, le faire disparaître ». On n’est pas loin de la problématique écologique du déchet.

Orvo propose à ses clients une célébration finale en accord avec le vivant qu’ils ont été : musique pour les mélomanes, cercueils biodégradables pour les écolos… Il a beaucoup réfléchi au sujet, en professionnel mais aussi en homme de la nature. Car depuis l’enfance, il exerce l’apiculture, activité qui le fascine. Et pour l’heure, il s’inquiète du syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles qui affecte dramatiquement les Etats-Unis, la Chine et pourrait détruire ses ruches jusqu’alors épargnées.

Ses recherches le mènent à explorer différentes explications et à échafauder une théorie particulièrement originale le conduisant, grâce aux abeilles messagères des dieux, dans une autre dimension, proche du fantastique.

La mort est abordée de façon subtile. Au début du roman en filigrane, discrète, feutrée, puis au fil des pages, elle revêt une intensité douloureuse, mais sans pathos. La narration repose sur deux types d’écriture qui se répondent d’un chapitre à l’autre : un blog internet et un récit classique.

Le premier, sur fond d’écoterrorisme qui n’en est d’ailleurs pas, emmène le lecteur dans un passé proche et remonte les jours précédant la tragédie familiale qui vient de se dérouler. Le second décrit le présent, le quotidien de l’après drame et s’ouvre sur un monde parallèle et onirique, préfiguration de l’au-delà.

Avec la mort, la place de l’animal dans la société, la question de ses droits et le militantisme constituent le fil conducteur du roman. On y voit deux approches s’affronter. Celle de l’animal-machine qui produit et sert les besoins de l’homme en haut de l’échelle de la création et qui le voit comme le plus évolué des êtres vivants et une autre, qui refuse cette hiérarchie, rejette l’anthropomorphisme et prône l’éthique du végétarisme radical.

C’est un roman étrange, captivant et beau. À lire à la Toussaint et n’importe quand puisque la mort n’a pas de saison.


Le sang des fleurs, Johanna Sinisalo, éd. Actes Sud, 2013, 288 p., 22,50 € .

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