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Les grandes banques stimulent le changement climatique

BNP, Crédit Agricole, Goldman Sachs et leurs petits amis encouragent le changement climatique en finançant des centrales à charbon.


Le 30 novembre, les organisations urgewald (Allemagne), groundWork et Earthlife Africa Johannesburg (Afrique du Sud), et le réseau international Banktrack - dont les Amis de la Terre France sont membres – ont lancé à Durban une nouvelle étude sur les portefeuilles des plus grandes banques mondiales : Bankrolling Climate Change (en anglais). Ce rapport établit pour la première fois un classement climat complet de ces institutions financières, sur la base de leurs financements à l’industrie du charbon (1).

« Nous avons choisi de nous centrer sur le financement du charbon car les centrales à charbon sont la plus grande source d’émissions de gaz à effet de serre », explique Heffa Schueking d’Urgewald. « Bien que le changement climatique ait déjà des impacts graves sur les sociétés les plus vulnérables, il y a de nombreux projets de construction de nouvelles centrales à charbon. Si les banques fournissent l’argent nécessaire à ces projets, elles vont ruiner les efforts pour limiter le réchauffement climatique à 2 °C ».

L’étude identifie 20 principales « banques climaticides », dont les trois françaises BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale. Parmi le top 20, on retrouve aussi des banques des États-Unis, du Royaume-Uni, d’Allemagne, de Suisse, de Chine, d’Italie et du Japon. Les trois banques alimentant le plus le changement climatique sont JP Morgan Chase (16,5 milliards d’euros), Citi (13,7 milliards d’euros) et Bank of America (12,6 milliards d’euros).

Les centrales à charbon sont chères à construire - environ 2 milliards de dollars pour une centrale de 600 mégawatts (MW) – et les producteurs d’énergie doivent donc se reposer fortement sur les banques pour trouver le capital nécessaire. « Nos chiffres montrent clairement que le financement du charbon augmente, il a presque doublé entre 2005 - année d’entrée en vigueur du protocole de Kyoto - et 2010 », remarque Tristen Taylor d’Earthlife Africa Johannesburg.

Yann Louvel, de BankTrack et des Amis de la Terre France, complète : « Presque la totalité des 20 banques climaticides ont fait des déclarations ambitieuses d’engagement pour combattre le changement climatique. Mais les chiffres montrent que leur argent n’obéit pas à leurs promesses ». Les politiques internes de ces banques, ainsi que les engagements volontaires tels que les « Principes Climat » n’ont produit aucun changement dans les portefeuilles des banques.

Bobby Peek de groundWork (Les Amis de la Terre Afrique du Sud) conclut : « Les projets de nouvelles mines et centrales à charbon rencontrent une farouche résistance partout dans le monde. Nous allons maintenant mettre cette pression sur les banques ». Depuis plus d’un an, Les Amis de la Terre font ainsi campagne contre les centrales de Medupi et Kusile en Afrique du Sud, qui ont reçu des prêts du Crédit Agricole, de BNP Paribas, de Société Générale et du CIC, ainsi que de l’État français au travers d’une garantie de la Coface et d’un prêt de la Banque Mondiale.

Les associations demandent donc aux banques de devenir des acteurs responsables face au climat et de quitter le secteur du charbon, en réorientant leur portefeuille vers l’efficacité énergétique et les énergies renouvables, et en mettant en œuvre des objectifs ambitieux de réduction des émissions de CO2 induites par leurs financements et investissements.

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Note :

(1) L’étude examine les portefeuilles de 93 banques leaders dans le monde, et comptabilise leur soutien aux 31 plus grandes entreprises minières du charbon (représentant 44 % de la production mondiale de charbon) et aux 40 principaux producteurs d’électricité provenant du charbon (qui détiennent plus de 50 % de la capacité mondiale de génération à partir du charbon). La valeur totale du financement du charbon fournit par ces banques depuis 2005 est de 232 milliards d’euros.

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Liste des 20 plus grands financeurs de l’industrie du charbon depuis 2005 (année d’entrée en vigueur du protocole de Kyoto) :

(en millions d’euros) :

#1 - JPMorgan Chase : 16.540
#2 - Citi : 13.751
#3 - Bank of America : 12.590
#4 - Morgan Stanley : 12.117
#5 - Barclays : 11.514
#6 - Deutsche Bank : 11.477
#7 - Royal Bank of Scotland : 10.946
#8 - BNP Paribas : 10.694
#9 - Credit Suisse : 9.495
#10 - UBS : 8.217
#11 - Goldman Sachs : 6.770
#12 - Bank of China : 6.323
#13 - Industrial and Commercial Bank of China : 6.182
#14 - Crédit Agricole / Calyon : 5.637
#15 -UniCredit / HVB : 5.231
#16 - China Construction Bank : 5.110
#17 - Mitsubishi UFJ Financial Group : 4.980
#18 - Société Générale : 4.742
#19 - Wells Fargo : 4.523
#20 - HSBC : 4.432


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