Tribune —
Mélenchon, un « chefaillon d’opérette » ?
Durée de lecture : 3 minutes
Mélenchon a une conception verticaliste de la politique quand il faudrait une « transformation horizontale du monde ».
Vous vous en foutez ? Moi aussi. Mais grave, vous n’imaginez pas. Si je parle aujourd’hui du cas Mélenchon, c’est parce qu’il réunit son Parti de Gauche en congrès. Au Mans. Mais surtout pour la raison que certains écologistes, que j’ai toutes raisons de croire sincères, pensent avoir trouvé leur Sauveur. Et que nul ne vienne me chercher sur une question de vocabulaire ! Je maintiens : de Sauveur. La figure que ce pauvre Mélenchon tente d’imposer est celle du grand capitaine. Celle de Chávez et de Castro, celle de tous les caudillos de la planète. Soit, Mélenchon est un caudillo de banlieue, un cheffaillon d’opérette. Mais il est là.
Ce qui me frappe avec angoisse, c’est que personne ou presque ne semble capable de voir ce que dissimule cette conception verticaliste de la politique. Cette version autoritaire d’un rhéteur - de seconde zone, à mon sens, mais telle n’est pas la question - distribuant la belle parole à ceux qui la boivent au bas des tribunes. Mais quelle connerie ! Mais quel contresens historique ! La crise écologique commande, sur le mode de l’impératif catégorique, une transformation horizontale du monde, une organisation qui mime la nature et sa complexité, les rhizomes et les mycorhizes, ces symbioses exaltantes entre champignons et racines des plantes. Au lieu de quoi, Mélenchon l’ignare nous rejoue une scène dix mille fois vue.
Savez-vous ? Cet homme, dont le passé politique est détestable, DÉTESTABLE, est resté 31 ans au parti socialiste, dont il était encore ministre en 2002. Sans moufter. Jospin eût-il été élu cette année-là président, il est fort probable que Mélenchon aurait continué à rouler en bagnole à cocarde tricolore. Mais chut, n’est-ce pas ? Ses modèles revendiqués, et imités sur le mode grotesque, sont Marchais et Mitterrand. Jeunes qui lisez ces lignes, désolé de rappeler de si vieux et si pénibles souvenirs. Je le dois.
Marchais est allé travailler dans l’Allemagne nazie en 1942, pour le compte de l’usine d’armement Messerschmitt. Volontairement ? La preuve n’en a pas été administrée, mais le soupçon demeure. Ce qui n’empêchera pas ce chef du parti stalinien de vomir « l’anarchiste allemand » Cohn-Bendit dans un éditorial immonde du torchon appelé L’Humanité le 3 mai 1968, sous le titre : « De faux révolutionnaires à démasquer ». Marchais a dirigé le parti stalinien, autrement appelé communiste, dans des conditions permanentes de mensonge, de manipulation, de violence physique contre qui dérangeait la digestion des bureaucrates. Je n’ai pas même le goût de poursuivre. Marchais est l’antithèse de tout projet humain. Et Mélenchon entend être son digne successeur.
Quant à Mitterrand, chacun sait désormais comment cet opportuniste fondamental a pu passer de son protofascisme des années Trente à la « Résistance », non sans recevoir des mains de cette canaille de Pétain la grande médaille du régime de Vichy, la Francisque. Mitterrand, qui a été toute sa vie un homme de droite, jusqu’à l’ultime seconde, aura été, de manière plus brillante que Marchais, mais sans doute pas plus efficace, un roi de la dissimulation et de l’imposture. Mélenchon fait de cet orfèvre de la tromperie un maître : je le lui laisse volontiers.
Un dernier mot sur la Chine, avec laquelle Mélenchon, penseur stratosphérique, souhaite un accord stratégique. Oubliant la surexploitation des ses ouvriers et paysans, oubliant la dévastation écologique radicale de ses territoires, oubliant les 200 millions de mingong - des migrants exclus des campagnes, des chemineaux, des vagabonds - qui errent de ville en ville et de chantier en chantier. Mélenchon. Comment cela est-il seulement possible ?