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Présidentielles 2012 : 7 candidats présentent leurs engagements pour l’écologie


Samedi 28 janvier à Montreuil (près de Paris), un vent d’écologie a (enfin) soufflé sur la présidentielle. A l’occasion du 36e Congrès de France Nature Environnement, sept candidats en lice pour l’Elysée ont défilé devant la tribune de la plus importante fédération écologiste de France (3 000 associations) pour parler nucléaire, agriculture, biodiversité et économies d’énergie dans un exercice s’inspirant du Pacte écologique de Nicolas Hulot en 2007.

Quinze minutes pour chacun, chrono affiché sur écran géant derrière la scène : François Hollande (PS), François Bayrou (MoDem), Eva Joly (EELV), Corinne Lepage (Cap21), Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche), Hervé Morin (NC) et Dominique de Villepin (République solidaire) ont tenté de convaincre quelque 2 000 militants présents au Congrès.

Avec des applaudissements nourris, notamment pour la candidate écologiste Eva Joly, les militants ont dû toutefois respecter les consignes du président de FNE, appelant à ne pas se montrer « irrespectueux vis-à-vis des différents intervenants ». Pas question non plus de noter les candidats. Les idées et projets de chacun seront « relayées » auprès des membres des associations affiliées à la fédération, explique le président de FNE, Bruno Genty, qui souligne au passage, qu’elles représentent pas moins de 850 000 électeurs potentiels...

Au préalable, FNE a soumis aux sept candidats une série de propositions (l’Appel des 3 000), sur lesquelles les candidats ont été appelés à se positionner. Seul grand absent de ce grand oral, l’UMP, qui, faute de candidat déclaré, a dû se contenter de la présence de la ministre de l’Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, venue défendre le bilan de Nicolas Sarkozy. « Avec le Grenelle de l’environnement, il est probablement le président de la Ve République qui a le bilan le plus solide en matière d’environnement », a-t-elle dit devant la presse.

Ci-dessous les extraits des discours prononcés par les sept candidats devant le Congrès de FNE :

François Hollande

C’était l’occasion notamment pour François Hollande de décliner une quasi-profession de foi « verte » deux jours après avoir présenté ses « 60 engagements pour la France ». Le candidat PS à la présidentielle a proposé « un grand débat citoyen » sur l’énergie qui aboutirait à la présentation devant le Parlement d’une « loi de programmation de transition énergétique ». « Ce débat prendra le temps qu’il faudra, six mois, un an si nécessaire (...) Le parlement votera ensuite la loi de programmation de transition énergétique avec trois grands principes, qui seront sécurité, indépendance et emploi ». François Hollande a aussi rappelé son intention de baisser de 75 % à 50 % d’ici 2025 la part du nucléaire dans la production d’électricité et de fermer « dans le quinquennat » la centrale de Fessenheim. François Hollande s’est également engagé à « ouvrir une conférence environnementale qui prévoira un agenda, des priorités et des moyens », s’il est élu président de la République. « Je prends l’engagement d’ouvrir un dialogue environnemental au même niveau que le dialogue social. »

-  Lire les 60 engagements de François Hollande

Jean-Luc Mélenchon

Pour le leader du Front de gauche, le nucléaire est une question « compliquée », trop peut-être pour s’avancer franchement sur le sujet. « Je ne prétends pas imposer, il faut s’en remettre au seul maître, le peuple, pour qu’il tranche », a-t-il suggéré, en lançant l’idée d’un referendum sur l’énergie nucléaire. Sauf qu’à titre personnel, Mélenchon l’avoue : il est « favorable à la sortie du nucléaire ». « J’ai entendu François Hollande adhérer à la fermeture des centrales en fin d’âge », a-t-il ajouté, mais « ou bien une centrale est dangereuse, ou pas ! » Il s’est dit par ailleurs favorable à la « fin de la criminalisation des porteurs d’alerte écologique », comme les « faucheurs d’OGM ». Pour lui, « la politique qui est au coeur du Front de gauche, le partage des richesses, n’est pas contradictoire avec la politique écologique ». « L’ensemble des compartiments de la production peut être réorganisé autour du paradigme de l’écologie politique », a-t-il affirmé. « Le capitalisme vert n’existe pas », a lancé encore M. Mélenchon. « On ne fait pas d’écologie audacieuse sans rupture avec le productivisme et le capitalisme ».

-  Lire le Programme du Front de gauche

Eva Joly

La candidate d’Europe Ecologie-Les Verts, lunettes rouges sur le nez, a défendu le projet des écologistes comme étant « le seul à apporter de vraies solutions à la crise ». Extrait de son discours : « Le combat que je mène depuis plusieurs années contre les paradis fiscaux protège aussi l’environnement, lorsqu’il s’agit d’empêcher la spéculation sur les marchés des matières premières, en particulier agricoles. C’est au nom de la protection du bien commun que je suis engagée avec les écologistes. Et j’ai la conviction que c’est la protection des biens communs que nous devons propulser au niveau mondial, européen et en France ».

« C’est cette parole que la France devra porter au 4e Sommet de la Terre, en Juin prochain, à Rio. Les premières négociations se sont déroulées cette semaine à New York dans une totale indifférence française. La parole de la France devra pourtant être forte. Nous devons créer enfin une Organisation Mondiale de l’Environnement et renforcer le poids de la société civile au niveau mondial. 
En définissant ensemble une économie verte qui nous permette de revisiter l’idée même du développement et de définir les nouveaux indicateurs de richesse, de bien-être, y incluant notamment la biodiversité. Nous vivons une crise sans précédent. Je pense que face à l’impasse du modèle économique dans lequel nous nous trouvons, pour des millions de Français l’environnement peut devenir la solution. »

« La crise n’est pas que financière. C’est aussi une crise sociale et écologique à laquelle nous devons mettre fin. Nous sommes aujourd’hui en ’déficit’ écologique et les inégalités se creusent. Ignorer cette réalité-là, c’est promettre aux Français des lendemains plus difficiles encore. Tel est mon engagement depuis maintenant plus de vingt ans, aller au-delà des constats établis et reconnus de tous pour répondre à une simple question : est-ce dans ce monde-là que nous voulons vivre et que nous voulons laisser en piètre héritage à nos enfants et nos petits enfants ? »

Parmi toutes ses propositions, Eva Joly milite pour la création d’une Organisation Mondiale de l’Environnement et pour la sortie du nucléaire en France.

-  lire le texte du discours d’Eva Joly.

François Bayrou

« Je suis très sensible à la question de l’harmonie, qui n’est pas seulement technique ou liée à l’agriculture, mais qui doit exister entre les êtres humains et la nature au sein de laquelle ils vivent. Elle n’est pas seulement physique, pas seulement liée à la santé, mais aussi esthétique et spirituelle. Quelque chose qui est de l’ordre de la prise de conscience que cette nature et nous sommes, d’une manière certaine, interpénétrés les uns avec les autres. Nous avons des preuves à faire devant la fragilité et le danger dont des éléments de la nature qui nous entoure sont frappés », a estimé hier François Bayrou.

Son « premier objectif, symbolique, sera de faire de la survie des abeilles un objectif politique dans lequel les responsables publics doivent être engagés », a-t-il souligné sous les applaudissements de la salle. « Nous savons que plus de 50% de l’alimentation humaine dépend directement de la pollinisation. Or, 30% des espèces pollinisatrices sont aujourd’hui menacées. Les molécules pesticides troublent les systèmes neuro-transmetteurs des abeilles et menacent les colonies. Je crois que les abeilles sont des veilleurs, des témoins, des risques qui menacent aussi les êtres humains. Le varroa et le frelon asiatique nécessitent eux aussi une réponse et une aide des pouvoirs publics », a-t-il analysé.

Deuxième objectif : l’énergie. « On ne parle plus d’énergie, ou alors uniquement du nucléaire alors que le sujet doit être traité de façon beaucoup plus large. J’écoute avec beaucoup de soin ce que dit le GIEC sur les causes portées par l’activité humaine du réchauffement de la planète. Il est bon de souligner que c’est là que réside la première menace sur notre environnement. J’estime que l’objectif doit être la décarbonisation progressive et contrôlée de l’activité humaine, notamment par l’économie d’énergie ».

« Cela impose de réfléchir à l’énergie de manière différente. Regardons comme une énergie de transition le nucléaire, en attendant que se précisent les promesses – que je crois réelles – qui tiennent aux énergies renouvelables et non polluantes : l’éolien, le photovoltaïque, etc. Cette stratégie doit être contrôlée par des organes indépendants du pouvoir politique, au sein desquels les associations auraient toute leur place », a-t-il poursuivi.

-  Voir le site de François Bayrou

Corinne Lepage

En ce qui concerne la question énergétique, Corinne Lepage propose le programme SOLEIL, Solutions Energétiques pour des Investissements de Long terme. « Ce programme lie un fonds dédié, bloqué sur 30 ans et alimenté par une partie des subventions aujourd’hui allouées au pétrole, une partie de la rente nucléaire et l’épargne de tous ceux de nos concitoyens qui souhaiteront investir pour leurs enfants. Ce fonds est accompagné d’un programme destiné à permettre le développement de la décentralisation énergétique en faveur des territoires, le financement de start-up dans le domaine de la sobriété de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables, mais aussi le financement de grands projets de Solaire à concentration, de stockage de l’électricité ou d’énergies marines ».

« Sur la question de la transformation de l’économie, il est impératif de comprendre que nous ne sommes pas en crise mais que nous avons changé de monde. C’est donc la totalité de notre manière de produire et de consommer qui doit être revue pour permettre la création de valeur et d’emplois sur notre territoire et l’amélioration de notre patrimoine collectif à commencer bien entendu par l’humain c’est-à-dire la santé, l’éducation, les conditions de vie. C’est la raison pour laquelle il est impératif de disposer comme le fait aujourd’hui la Grande Bretagne et comme le permettrait les travaux de la commission Stiglitz d’une comptabilité globale, d’indicateurs de soutenabilité et d’un indice d’évolution du patrimoine commun qui serait présenté en même temps que le PNB. Cela permettrait de juger de l’efficacité des politiques publiques et de créer un véritable mouvement d’optimisme en faveur de la progression du bien commun. »

« Cela continue par la dynamisation de l’activité économique pour créer de la valeur et des emplois. Les emplois d’aujourd’hui et de demain se trouvent non seulement dans les nouveaux secteurs des éco technologies et des énergies renouvelables, de la chimie verte, de l’agriculture durable. L’exemple allemand est probant. Ils se trouvent aussi dans la transformation de nos industries traditionnelles, car ce sont celles qui ont engagé la révolution de la soutenabilité qui peuvent prétendre à la pérennité et à la création de richesses nouvelles. De nombreuses entreprises, PME innovantes, start-up, mais aussi coopératives et mutuelles du monde de l’économie sociale et solidaire ont déjà fait ce choix. Mais, notre pays est en train de passer à côté de la 3e révolution industrielle que décrit admirablement Jérémy Rifkin dans son dernier ouvrage, révolution qui joint l’énergie et les NTIC. Les multinationales qui décident de tout dans notre pays, ont fait un choix contraire en raison en particulier du tout nucléaire et la politique industrielle actuellement poursuivie - si tant est qu’on puisse parler de politique industrielle - est à proprement parler suicidaire. Dans mon ouvrage La vérité sur le nucléaire j’ai analysé les raisons de la nécessité économique autant que de sécurité de sortie rationnelle du nucléaire. C’est donc dans ces nouveaux marchés de la transition énergétique et écotechnologique qu’il convient d’investir massivement en fléchant l’épargne des Français pour leur permettre grâce à la transparence sur l’utilisation de leurs fonds par les établissements financiers de choisir d’investir dans le local et le long terme. »

-  Lire le discours de Corinne Lepage et des éléments de son programme.

Hervé Morin

« Ce silence, sur l’écologie en France pourrait se résumer selon moi par une phrase : crise au balcon, environnement à l’abandon. Et cela nous permet de toucher du doigt que la fameuse transition écologique que nous appelons tous de nos voeux, et vous plus encore – respectueuse de la planète et des terriens que nous sommes – elle sera difficile ; et c’est là où l’on voit que l’écologie est encore quelque chose de très fragile chez nous : des déficits qui grimpent, un taux de chômage qui augmente, un triple A qui disparaît et hop c’est l’écologie qui passe à la trappe. Et bien moi je veux affirmer que l’environnement n’est pas l’ennemi de la dette. Je suis venu vous dire que l’environnement n’est pas l’ennemi de l’emploi. Je suis venu vous dire que l’environnement n’est pas l’ennemi de la croissance. »

-  Lire le programme de Hervé Morin.

Dominique de Villepin

-  Consulter le site de Dominique de Villepin.

Le Contrat environnemental

France Nature Environnement a élaboré une suite de mesures majeures pour préparer un avenir souhaitable pour l’homme, un avenir riche de biodiversité, de prospérité et de liens humaines. L’objectif de l’ONG : présenter aux candidats aux élections présidentielles et législatives des solutions réalistes et réalisables pour sortir des crises écologique et économique, qui pourront être mises en œuvre dès le début du prochain quinquennat. Indépendante de tout parti politique, France Nature Environnement souhaite que chaque candidat s’engage sur la voie du Contrat environnemental.

Ces propositions ont été construites et sont portées par des militants bénévoles issus des 3000 associations de terrain qui composent la fédération. Elles sont issues d’un processus de consultation qui a débuté au printemps 2011.


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