Quand les climato-sceptiques inventent les erreurs du GIEC...
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Hélas, oui : l’Amazonie se dirige vers la sécheresse.
Climategate ou mediagate ? L’Amazongate fait pencher la balance vers mediagate. Lancé par le Sunday Times, l’Amazongate accuse le Giec d’avoir dupé le public et les gouvernements sur le risque de secheresses menaçant l’Amazonie en citant un rapport du WWF et de l’UICN écrit par Andy Rowell et Peter Moore publié en 2000.
Raté : le chiffre de 40% cité par ce rapport provient directement d’un article publié par Nature en 1999, et son premier auteur, Daniel Nepstad, un scientifique réputé du Woods Hole Research Center (Massachussets, USA) vient de publier un communiqué énervé contre cette nouvelle manipulation médiatique.
Ce nouveau scandale a démarré par un article du Sunday Times du 24 janvier, repris par le Wall Street Journal. Argument : le rapport 2007 du Giec, en citant un texte du WWF et non la littérature scientifique, aurait exagéré le risque de sécheresse en Amazonie. Or, ce rapport cite en référence un très grand nombre d’articles scientifiques parus dans les meilleures revues. Dont celui de Daniel Nepstad d’où est tiré le chiffre cité. Même si le rapport Rowell ou sa citation dans le rapport 2007 du Giec sont parfois imprécis quant aux surfaces étudiées, l’avis de Daniel Nepstad est catégorique : « En résumé, la conclusion du Giec est correcte. »
L’énervement de Daniel Nepstad est logique : un éditeur du journal l’avait contacté avant parution de l’article soit disant en quête "d"informations". Et Daniel Nepstad lui avait donné des informations, par oral et par ecrit (un mail) qui auraient dû empêcher le journal de monter ce soi-disant scandale amazonien. Pire : l’auteur du rapport du WWF, Rowell, affirme n’avoir jamais été contacté par le journaliste qui a signé l’article, Jonathan Leake. Mais il semble que désormais toute déontologie professionnelle devient inutile dès lors que l’on cherche à casser du Giec. Tous les coups sont bons, surtout s’ils sont sous la ceinture.
Il est intéressant de noter que ces études sur le risque de sécheresse en Amazonie sont multiples et que les dernières parues confirment celles de Nepstad. Ainsi, une équipe de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) vient de publier deux articles sur l’évolution des pluies depuis 40 ans en Amazonie - dans International Journal of Climatology en décembre 2008, et dans Journal of Hydrology en 2009.
Ce travail, permis par l’implantation de l’IRD en Amérique latine et des collaborations scientifiques est expliqué ici en termes simples par une fiche scientifique de l’IRD. On y lit ceci : « En 40 ans, sur l’ensemble du bassin, ces dernières montrent une nette tendance à la diminution des précipitations, avec une baisse relative estimée à 9% entre 1975 et 2003 (avec des disparités saisonnières et régionales)." Leurs recherches, basées sur les données de plus de 750 stations pluviométriques réparties dans les cinq pays du bassin, complètent les études précédentes, focalisées sur l’Amazonie brésilienne.
Les chercheurs de l’IRD ont pu étudier une plus vaste zone, alors que jusqu’à présent, les recherches restaient centrées sur la partie brésilienne du bassin du fait d’une politique de diffusion libre des données météorologiques au Brésil, ce qui en facilite l’accès pour les chercheurs. « Dans les pays andins, explique l’IRD, en raison de la politique des services météorologiques, ces informations étaient moins facilement disponibles. Mais elles sont surtout plus rares dans les régions escarpées, couvertes de forêts impénétrables et difficiles d’accès, du versant amazonien des Andes. Dans cette étude, menée en partenariat entre institutions de recherche et services météorologiques et hydrologiques des pays du bassin, la base de données exploitée est particulièrement riche sur la région andine (Bolivie, Pérou, Équateur et Colombie). Cette étude a donc permis de compléter les travaux précédents et de proposer, pour la première fois, une analyse de la variabilité spatio-temporelle des précipitations sur l’ensemble du bassin amazonien. »
Une autre étude intéressante sur le sujet se trouve sur le site de la FAO.
D’autre part, une vision historique permet de mieux cerner l’ampleur du problème. La forêt amazonienne n’est pas un géant vert indestructible et éternel. Il y a 5 000 ans, la majorité de sa surface actuelle offrait plutôt le spectacle d’une savanne plus ou moins arborée. L’étendue actuelle de la forêt dense n’a pas plus de 1000 ans.