Tribune —
7 milliards en avion

Nous sommes donc 7 milliards. En ces jours de grève à Air France, il est intéressant de relever qu’en 2010, le Conseil international des aéroports a recensé 5 milliards de passagers aériens. Au rythme de croissance annuelle de ces deux grandeurs (+ 1,1 % pour la population mondiale, + 6,3 % pour le nombre de passagers), c’est en 2017 que l’on comptera autant d’humains que de personnes empruntant un avion à moteur, soit 7,5 milliards.
Relevons deux aspects de cette intéressante ascension. D’une part, tout le monde ne prend pas l’avion tandis que certains prennent plusieurs fois l’avion chaque année. En recoupant diverses sources, on peut estimer que 10 % de la population mondiale traverse le ciel chaque année.
D’autre part, les aéronefs sont le plus souvent propulsés par des moteurs, moteurs qui ont la désagréable caractéristique de fonctionner en consommant du carburant, carburant dont la combustion se traduit par l’émission de gaz carbonique (CO2).
Or, le CO2 contribue au changement climatique. Selon les projections de l’Organisation aérienne civile internationale (OACI), l’aviation pourrait peser jusqu’à 3,5 milliards de tonnes d’émissions de CO2 par an en 2050 (1), soit plus de 10 % du niveau actuel des émissions.
Que faire ? Laisser courir les choses, ou tenter d’infléchir cette courbe raide comme une falaise. Depuis quelques années, l’Union européenne a choisi de tenter d’infléchir la courbe : elle a décidé que les compagnies aériennes, comme les autres secteurs industriels, devront participer au marché européen des émissions de gaz à effet de serre, qui vise à plafonner ces émissions. Cela conduira à une hausse du prix des billets d’avion.
Les compagnies étrangères dont les avions atterrissent dans l’Union européenne devront respecter la règle européenne. Or, voyez comme c’est curieux : presque tout le monde se dit d’accord pour « lutter contre le changement climatique », mais toute mesure concrète suscite le courroux.
Le 2 novembre, vingt-six pays - dont les Etats-Unis, la Chine, l’Arabie saoudite et le Brésil - devraient déposer une protestation formelle contre l’Union européenne dans le cadre de l’OACI. Espérons que Bruxelles tiendra bon dans le bras de fer qui s’annonce.
En ces temps de pessimisme européen, il est bon de rappeler que, malgré ses insuffisances et ses faiblesses, la politique environnementale menée par l’Europe est la plus déterminée du monde. C’est un atout pour l’avenir.
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Note :
(1) Dans son document Aviation Outlook. ICAO environmental report 2010, ch. « Climate change outlook », l’OACI indique que l’aviation consommait 186 millions de tonnes de carburant, et que chaque kg de ce carburant produit 3,16 kg de CO2. Elle est estime que le trafic pourrait se développer à 4 % par an, ce qui conduit en 2050 à 1,05 tonnes de carburant ou 3,3 milliards tonnes de CO2.