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En Sierra Leone, des paysans en lutte contre le groupe Bolloré vont passer en justice

Six membres sierra-léonais de l’association Maloa avaient contesté la manière dont le groupe Bolloré a acheté des terres pour les plantations d’huile de palme dans leur région. Ils sont accusés d’avoir détruit des plants de palmiers, ce qu’ils contestent formellement. Ils seront jugés le 15 novembre. Une pétition demande au groupe Bolloré d’abandonner les poursuites.


Depuis 2011, la société agricole Socfin a acquis en contrat de sous-location auprès du gouvernement une superficie totale de 6 500 ha de terres pour cultiver des palmiers à huile dans le canton de Malen. [Le groupe Bolloré est actionnaire à 38,7 % de la Socfin. Toutefois, les recherches ont démontré que la façon dont le terrain a été acquis par le gouvernement, et par conséquent par la société agricole de la Socfin, manquait de transparence. Le consentement libre, préalable et éclairé des propriétaires fonciers et des utilisateurs des terres, surtout celui des femmes qui sont défavorisées, n’était pas recherché.

La société a le soutien du gouvernement ainsi que le soutien de l’autorité locale qui procède à une quasi-expropriation des terres appartenant à des lignées. Les communautés ont affirmé que leurs chefs locaux ont dans de nombreux cas menacé de prendre leurs terres sans compensation. Il est connu que ces autorités disent aux paysans : « Soit vous prenez l’argent soit vous perdez l’argent et la terre. » Les communautés sont ainsi forcées de choisir le moindre mal, c’est à dire d’accepter l’argent.

Les propriétaires fonciers sont trompés par l’équipe d’enquête de la société chargée de mesurer la superficie des terres où poussent leurs arbres (palmier à huile). Les communautés affirment que les équipes d’enquête de l’entreprise mesureraient seulement leurs plantations de palmiers à huile, toutes les autres terres appartenant à des exploitations familiales sont ignorées donc incluses dans leur propriété. La société a démenti à plusieurs reprises cette affirmation. Les fonctionnaires déclarent que les informations et sondage pour chaque exploitation familiale sont disponibles et donc accessibles. Jusqu’à présent, ces informations sont inaccessibles au public.

Plus de quarante villages ont été privés de leur unique source d’existence et de subsistance. La population de ces villages, soit plus de 10 000 personnes, ne peuvent plus : ni exploiter leurs fermes, ni avoir accès à la source d’énergie de base (feu de bois) pour la cuisine et le chauffage, ni avoir des recettes provenant de leurs palmiers pour lesquels la société a payé un coût de 250 $ par soixante arbres ou acres.

De nombreuses communautés peuvent difficilement désormais effectuer des rites traditionnels ou culturels, ni accéder aux herbes médicinales. La sécurité alimentaire dans le canton devient préoccupante et précaire selon les habitants. Ils doivent maintenant acheter tout ce dont ils ont besoin alors que ces produits étaient cultivés sur leurs terres.

Il y a désormais beaucoup de discordes sociales et de vices au sein des communautés. La prostitution gagne peu à peu du terrain, des familles sont brisées parce que les chefs de famille ne sont plus capables de subvenir à leurs besoins. Les parents retirent leurs enfants de l’école car ils ne peuvent plus se permettre les frais de scolarités, le plus souvent, les filles sont les premières à être déscolarisées.

L’état de pauvreté des indigènes affectés par l’accaparement des terres s’aggrave. Les communautés affirment qu’elles ont du mal à avoir deux repas par jour et que même quand elles y arrivent, la nourriture est insuffisante par rapport à ce qu’elles avaient avant l’arrivée de Socfin. Elles n’ont plus d’aliments nourrissants.

La demande européenne pour les produits industriels et le bio-carburant mène à une lutte douteuse pour les terres sierra-léonaises. Cela conduit les communautés pauvres encore plus loin dans la misère, la servitude et une nouvelle forme d’esclavage, parce que, quand des sociétés prennent toutes les terres, les communautés vulnérables deviennent laboureurs sur les plantations puisqu’elles ne peuvent rien faire d’autre.

Les pays européens peuvent aider en mettant un terme à cette situation. L’Union européenne peut imposer à Socfin et à ses actionnaires d’arrêter le projet dans le canton de Malen ou de conclure de nouveaux arrangements qui ne nuiront pas aux communautés. L’Union européenne devrait imposer à Socfin et ses actionnaires d’arrêter les poursuites contre les propriétaires de terres qui sont déjà victimes de l’accaparement des terres.


Signez et partagez cette pétition.

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