Tribune —
Le Parti socialiste a perdu parce qu’il n’est pas à gauche
Une analyse de gauche au sein du PS. Mais qui oublie complètement la question écologique.
En dépit de la mise en scène trompeuse d’une UMP à 27,4 %, le total des voix du pouvoir est minoritaire en France. Mais hélas, en face, la gauche qui avait tout pour être majoritaire, n’a pas réussi ni à s’unir et ni à présenter une véritable alternative.
Du coup, le décalage a été total entre les préoccupations majeures des salariés et le type de campagne électorale qui a eu lieu.
Le résultat des votes n’est pas représentatif de la réalité des aspirations de nos concitoyens, puisque les 60 % d’abstentions se concentrent surtout dans la classe salariale alors que nous sommes pourtant dans une période de grandes luttes sociales, avec les 8 syndicats unis, du 29 janvier au 16 mars, du 1er mai au 13 juin. Le lien n’a pas été établi entre les Continental, Caterpillar, Molex, Hewlett-Packard… et le sens de cette élection.
La liste composite des écologistes a connu un gros succès mais c’est un vote refuge (« Home »). Car pour sauver la banquise, il faut se sauver des banquiers d’abord : pour être un bon écologiste, il faut forcément être un bon anticapitaliste. Et l’écart entre le libéral - libertaire Cohn-Bendit et l’écologisme social de gauche comme José Bové et d’autres est grand. Ce n’est pas la première fois qu’aux Européennes, il y a percée d’une liste composite qui ne structure pas la vie politique ensuite. Les Européennes ont servi déjà à des échappatoires pour des votes éphémères. Cela laisse les écologistes entièrement devant leurs choix face à la gauche demain.
Le fond du problème est entièrement du côté du PS : il aurait pu avoir, le 7 juin 2009, devant l’échec du sarkozysme, 30 % des voix comme en 2004.
Mais en 2004 il avait défendu l’Europe sociale des 35 h et du Smic européen.
C’était avant le « non » du 29 mai 2005 où 59 % des électeurs socialistes ne votèrent pas comme la majorité de la direction du parti.
L’« Europe sociale » n’a pas été promue comme une réponse claire par le PS pour le vote de ce 7 juin.
Il faut donc qu’aujourd’hui le PS choisisse véritablement l’orientation à gauche qui a prévalu, même de justesse, au congrès de Reims.
Impossible de rester entre deux voies, à la croisée des chemins entre un social libéralisme minoré, et un combat de gauche insuffisamment assumé. Il faut rénover, aller à gauche vraiment, enfin. On voit bien que les thèmes les meilleurs défendus par le Parti de gauche, le Parti communiste ou le NPA correspondent largement à l’attente de millions de salariés mais ces partis ne suffisent pas et ne suffiront pas, ni aujourd’hui, ni demain, à ramener une majorité de voix : il faut que le plus grand des partis, le PS, physiquement, matériellement, politiquement défende ces thèmes, sinon nul n’arrivera à les faire triompher.
Rappelons que le PS dirige 20 régions sur 22, 61 % des départements, et 2 villes sur 3. En mars 2008, il a battu le sarkozysme à plate couture, la gauche avait 51 % des voix, sans l’inconsistant Modem. Le PS est la « clef » de la gauche ».
Si la confrontation de fond pour répondre à l’immense crise du système financier, entre une Europe de droite, libérale et une Europe de gauche, sociale, n’a pas eu lieu, c’est la faute au programme timoré et hésitant du PS. Car la question n’est pas de l’ampleur d’un plan de relance (40 milliards ou 100 milliards) mais de la nature dudit « plan de relance » : est-il destiné aux banquiers ou aux salariés ? est-il destiné à pérenniser le système ou à le changer ? Est-ce que nous voulons, pour sortir de la crise, redistribuer les richesses (Smic à 1600 euros, 35 h, retraite à 60 ans, Sécurité sociale, services publics) ou non ?
Le PS est aussi responsable, avec sa façon trop lente de rompre le compromis historique avec l’Europe des libéraux pour revendiquer une autre Europe, sociale. Il y a quatre ans, l’Europe avait passionné les électeurs français qui avaient, en toute connaissance de cause, voté « non » à 55 % au projet de constitution libérale européenne. Depuis l’écart s’est creusé entre l’Europe et les Français, à cause du coup tordu de Sarkozy imposant le traité de Lisbonne sans référendum et des embarras pérennisés du PS, ce qui a contribué à distancier beaucoup d’électeurs des urnes. Trop de salariés se sont dits : « à quoi bon ? ».
Le PS manque au salariat. Il aurait fallu avancer des revendications précises en matière de salaire, de contrôle des licenciements, de durée du travail, de Sécurité sociale. Pas du baratin ! « Changeons maintenant ! » ça ne veut rien dire (quoi, qui, pour qui, comment).
Le PS manque à la gauche : ce fut une grave erreur en pleine campagne, de notre ancien premier secrétaire de relancer l’idée d’une alliance avec le Modem, au lieu de défendre le rapprochement avec le FG, le NPA, les Verts.
Le PS ne dénonce pas assez la politique de « rupture » réactionnaire cruellement antisociale de Sarkozy : il ne soutient pas assez fortement les licenciés, les précaires, les pauvres. Il court après les modes, mais ne promeut pas de syndicalistes ni de défenseurs du droit des travailleurs : ce n’est pas une question de génération, de quadras, mais de fond !
Nous sommes pour une économie mixte, pas une société de marché. Nous sommes pour rompre avec le capitalisme financier type FMI/OMC. Nous sommes pour une VI° République sociale, pas pour une République conservatrice néolibérale. Nous sommes pour arrêter avec le « libre-échange », la « concurrence libre et non faussée », et remplacer la « main invisible du marché » par la main visible de la démocratie. Les salariés sont plus nombreux que les actionnaires et les patrons : c’est le salariat que nous devons écouter !
Et pour cela, un seul choix, une seule dynamique, l’unité de la gauche ! Unité de toute la gauche ! Pas d’exclusive, sauf envers les idées de droite libérale ! Pas d’hésitation sur notre camp : pour reconstruire le PS, sortir du 21 avril 2002, du 29 mai 2005, du 6 mai 2007, il faut enfin un autre cap.
Nous sommes, Démocratie et Socialisme (et nous croyons que c’est la position de la motion C), pour l’unification de la gauche, pour un grand parti de gauche unifié, avec une vie démocratique exemplaire.
Face à une seule droite, une seule gauche ! Nous appelons à un travail (assises, réunions a tous les niveaux…de la base au sommet) de toute la gauche pour définir un projet commun et un candidat commun, des candidats communs qui l’incarnent à l’avenir.