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Tribune

Le chemin du sens

La crise écologique révèle la crise du sens de notre existence.


Ce qui se joue ces jours-ci entre les écologistes et la gauche productiviste dépasse de beaucoup un accord électoral : il s’agit de choisir le chemin du monde dans lequel nous voulons vivre. Le dilemme n’est pas seulement politique ou économique, mais aussi spirituel.

Car l’énergie nucléaire engage bien plus que des objets pratiques. Par la nocivité plurimillénaire des résidus toxiques qu’elle génère, par l’empoisonnement durable des milliers de kilomètres carrés qu’entraînent les accidents atomiques, par les armes apocalyptiques auxquelles elle est liée, cette technologie met en jeu depuis son origine le destin de l’humanité.

Et ce que disent les écologistes aux dirigeants, c’est : « Comment pouvez-vous prendre une décision qui lègue aux générations futures des déchets dont vous ne savez que faire et une probabilité d’accidents dont vous êtes hors d’état de garantir la nullité ? »

Ainsi inclinait-on à penser au sortir des Assises chrétiennes de l’écologie, organisées du 11 au 13 novembre par le diocèse de Saint-Etienne, la revue Prier et les Scouts et guides de France. Mille cinq cents participants y ont réfléchi dans une atmosphère fraternelle - eh oui, fraternelle, comme l’étaient les premières communautés christiques ou les socialistes utopiques du XIXe siècle - à l’au-delà de la crise écologique, c’est-à-dire à la crise du sens de notre existence qu’elle révèle.

L’accord était clair sur le désordre du monde et sur son lien avec la question sociale - « Nous ne devons pas accepter qu’on ne prenne pas d’argent aux riches », a lancé Jean-Marie Pelt, sous les applaudissements. Mais aussi sur l’idée que, pour enrayer la mécanique destructrice à l’oeuvre, il faut contester la culture matérielle qui définit l’époque et combler son vide de sens.

« L’économie a hypertrophié les besoins matériels au détriment des besoins relationnels », dit Jean-Baptiste de Foucauld. « Nous ne sommes plus reliés ni en haut ni par nos racines », dit encore Jean-Marie Pelt. « La crise écologique est le fruit d’une vision dualiste, anthropocentriste et patriarcale, qui mutile l’être humain en le coupant de son intellect spirituel », dit Michel Maxime Egger.

Et l’on a redécouvert que le mot « crise », venu du grec krisis, signifie « décision » : le moment de la difficulté est aussi celui où l’on choisit. Choisir de continuer dans la destruction ou de prendre le chemin d’un nouveau mode de pensée.


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