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Montdidier inaugure le premier parc éolien communal de France

Comment éviter que l’éolien profite essentiellement aux entreprises qui les mettent en oeuvre ? Par leur socialisation, telle que celle réalisée à Montdidier, dans la Somme. L’instrument de cette avancée ? La Régie municipale d’énergie.


-  Reportage, Montdidier

MONTDIDIER (SOMME) ENVOYÉ SPÉCIAL - Vendredi 14 janvier devait être inauguré le parc éolien de la ville de Montdidier, située à 35 kilomètres d’Amiens (Somme). L’événement serait banal s’il ne s’agissait du premier parc public développé par une collectivité locale. « Aujourd’hui, l’éolien n’est financé que par des opérateurs privés, qui ne voient là qu’une occasion de recettes, explique Catherine Quignon-Le Tyrant, maire (PS) depuis 2001 de la commune de 6 500 habitants. Si les collectivités locales prennent la main, les recettes permettront d’aider nos administrés et nos communes à économiser l’énergie. Il s’agit d’éviter la précarité énergétique, qui est le problème de demain. »

Le courant produit par les quatre éoliennes installées dans la commune est racheté 86 euros le mégawattheure (MWh) par EDF quand le prix moyen du courant d’EDF est de 52 euros. Pour bénéficier de cette marge, Montdidier a décidé de développer son propre parc. La commune picarde a pu réaliser son projet parce qu’elle est une des rares en France à posséder encore une régie d’électricité, qui produit (un peu) le courant, en achète à EDF, et le distribue aux ménages et entreprises de la commune. « On vend l’électricité au même prix qu’EDF ailleurs, précise Laurent Morelle, directeur de la régie communale de Montdidier. La différence est que nous avons neuf emplois sur place, et que le profit de notre activité revient à la commune. »

Grâce à cette structure juridique particulière - la France ne compte plus que 160 régies locales d’énergie -, Montdidier a pu monter le projet, lancer un appel d’offres aux fournisseurs, se préparer à gérer le courant fourni par les quatre éoliennes, auxquelles on a donné le prénom d’enfants de la ville : Elisa, Helena, Mathieu, et Leo.

L’investissement de 11,2 millions d’euros est financé par emprunt et avec deux apports d’un million chacun du conseil régional et de l’Union européenne. Le parc produira 19 000 MWh par an, pour une consommation actuelle de Montdidier de 39 000 MWh.

Le projet, lancé en 2003, s’inscrit dans une politique résolue d’économies d’énergie et d’énergies renouvelables : l’isolation thermique de plusieurs collèges et écoles a été réalisée, l’éclairage public a été modifié pour en réduire la consommation, des panneaux photovoltaïques ont été posés sur divers bâtiments publics, une chaufferie au bois et un réseau de chaleur ont été construits, des diagnostics thermiques ont été lancés pour préparer des travaux d’isolation chez les habitants. Montdidier se veut « ville pilote en maîtrise de l’énergie ».

« Réduire la facture »

Le parc éolien permettra d’amplifier cette politique. « Les gens ici gagnent en moyenne 1 200 euros et avec l’évolution du niveau des retraites, beaucoup risquent de se trouver en précarité énergétique, prévient Mme Quignon-Le Tyrant. C’est pourquoi nous voulons maintenir le prix de l’électricité le plus bas possible, et aider à isoler les habitats pour réduire la facture. » Il s’agit aussi de créer des emplois sur place : c’est une entreprise de Montdidier qui assure le premier niveau de maintenance du parc, les artisans locaux sont formés au solaire et à l’isolation thermique.

Cette politique découle aussi d’une vision de l’avenir : « Dans quelques années, le courant sera vendu sur le marché plus de 100 euros le MWh, prédit Laurent Morelle. Notre politique nous permettra d’avoir des prix plus bas pour nos clients. »

La démarche de Montdidier illustre une volonté nouvelle de maîtrise énergétique par les collectivités locales. A Creutzwald, en Moselle, la régie communale a aussi racheté récemment un parc éolien. Et à Issoudun, dans l’Indre, une société d’économie mixte a été montée dans le même but. « Pourquoi ne pas profiter des bénéfices du vent alors que les communes sont asphyxiées financièrement ? », résume André Laignel, le maire d’Issoudun.


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