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Notre Dame des Landes s’est invitée au Colloque André Gorz


Un colloque sur André Gorz, décédé depuis cinq ans maintenant, s’est tenu à Montreuil les 15 et 16 novembre 2012 dans un amphithéâtre où se sont cotoyés pendant deux jours des générations différentes, des plus anciens, certains amis-e-s et compagnons d’André Gorz, aux plus jeunes, connaissant ou découvrant cette pensée. Une pensée qui a inspiré les années 1970 avec les livres, Écologie et Politique, Écologie et Liberté notamment, et avec en toile de fond également, Ivan Illich, qu’André Gorz avait rencontré et qui l’avait alors fortement inspiré. Une pensée qui a accompagné des luttes emblématiques de ces années là et qui demande à être revisitée avec l’accélération de la crise écologique, la crise climatique et les immenses capacités destructrices accumulées.

André Gorz avait vu avant beaucoup d’autres que la crise qui s’amorçait était bien plus qu’une crise capitaliste classique, qu’elle était la crise d’une civilisation. Il dénonçait alors les méga-projets techniques, qui loin de constituer un progrès pour l’humanité, renforçaient la dépendance, l’hétéronomie, l’aliénation dans la consommation, la perte de l’autonomie et de la capacité de décision. Il analysait la possibilité d’un techno-totalitarisme, qui, au prétexte de résoudre les crises déjà là, ne ferait que rapprocher le système capitaliste d’un seuil à partir duquel la barbarie pourrait être l’avenir des sociétés techno-industrielles. Mais il montrait aussi que la crise écologique pouvait être un levier pour la sortie du capitalisme et pour un changement de civilisation.

Ce colloque a coïncidé avec la montée de la résistance à la construction de l’aéroport de Notre Dame des Landes. Ce projet, qui date de quarante ans, et la résistance qui lui est opposée ont été évoqués à plusieurs reprises dans les interventions comme un exemple même de l’imposition d’un « grand projet inutile », d’un monstre détruisant l’espace et les terres, délogeant les paysans, détruisant la biodiversité, pour accélerer la vitesse, à l’heure où au contraire, il s’agit de retrouver la maîtrise de la durée et du temps, la maîtrise des terres, des « mondes vécus » selon les termes de Gorz, de réduire les transports qui, comme l’écrivait Illich, finissent par atteindre des seuils de contre-productivité.

L’immense manifestation de réoccupation à Notre Dame des Landes, le lendemain du colloque, a prolongé sur le terrain ces moments d’échange qui furent très riches. Ces hasards de calendrier illustrent comment, à un moment donné, des évènements a priori séparés, peuvent prendre corps et permettre des basculements. À Notre Dame des Landes aussi plusieurs générations se sont cotoyées, celles des années 1970, du Larzac, de Plogoff et de différentes résistances à la destruction des milieux de vie et de travail, celles beaucoup plus jeunes issues des mouvements pour la justice climatique, des luttes contre l’accaparement des terres, ou encore celles venues de la tradition des occupations, de la non violence et de la désobéissance civile. Face à ce projet, l’inventivité sociale est au rendez-vous et l’occupation de ces lieux par des nouveaux venus, renforce les années de résistance des habitants et des paysans qui ont contesté pied à pied « l’expertise » officielle. Elle ouvre un espace de réflexion et d’action. Espace fragile car les machines de la répression et de la destruction ont déjà démarré.

Un espace à soutenir et faire vivre, pour reconquérir une autonomie, si chère à André Gorz.


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