Le gouvernement se fait représenter dans les négociations internationales par le lobby semencier
Durée de lecture : 3 minutes
Lors d’une émission récente, sur France Inter, réunissant le GNIS (Groupement National Interprofessionnel des Semences, graines et plants), l’association Pro-maïs, l’association Kokopelli, et Christophe Bonneuil, chercheur à l’INRA, Monsieur Burgaud, Directeur de Communication au GNIS, a prétendu que le GNIS n’avait pas le pouvoir d’écrire les textes qui régissent la profession.
Pourtant, l’article 3, al. 5 de la loi du 11 octobre 1941, qui, sous Vichy, a créé le GNIS, rend les propositions du GNIS « obligatoires pour tous les membres des professions intéressées dès qu’elles ont reçu, selon le cas, l’acquiescement du ministre d’Etat à l’agriculture ou du commissaire du gouvernement ».
Mais ce n’est pas tout : une vaste réforme de la législation européenne sur le commerce des semences est actuellement en cours.
Or qui, dans les bureaux de la Commission Européenne, rédige, conjointement avec quelques fonctionnaires européens, la proposition législative ?
Madame Isabelle Clément-Nissou, Directrice des Relations Internationales du GNIS, et détachée par le Ministère de l’Agriculture français en tant qu’ « expert national » !
Quel est exactement le rôle du GNIS ?
Cet organisme, qui regroupe exclusivement des professionnels privés de la filière semences présente toutes les caractéristiques d’un groupe de pression défendant les intérêts de l’industrie semencière.
Il se présente d’ailleurs officiellement comme le défenseur des « intérêts » de cette filière, et ne cache pas que l’une de ses missions est que « les législateurs européens et français prennent en compte les préoccupations de la filière (…) : biotechnologies et OGM, biodiversité, propriété intellectuelle et brevets, protection des semences et environnement ».
De plus, le GNIS ne représente que les professionnels engagés dans la logique industrielle.
En effet, il ne regroupe en son sein que les « organisations professionnelles les plus représentatives », à l’exclusion de toutes celles, minoritaires, qui tentent de faire émerger une autre logique.
Malgré cela, ignorant tout du concept de conflit d’intérêt, le législateur lui a confié des missions de représentation officielle de la France, en Europe et à l’international, d’élaboration de textes réglementaires et de conseil auprès du Ministère de l’Agriculture, une mission de contrôle et de certification de la production de semences auprès de ses propres membres (et souvent par ses propres membres), et, afin de boucler complètement la boucle de la consanguinité, une mission d’agent de répression des fraudes, pour sanctionner ceux qui ne voudraient pas admettre la légitimité d’un tel système !
Ce mélange des genres, qui institutionnalise les conflits d’intérêt, n’est pas admissible dans une société démocratique.
L’intérêt général, dans un contexte qui a vu l’expansion de l’industrie semencière se faire au dépends de la biodiversité, commande d’assurer la pluralité des opinions et la protection des intérêts minoritaires.
C’est pourquoi, l’Etat français doit mettre fin à cette confusion des genres en retirant en priorité le mandat de Madame Clément-Nissou auprès des instances européennes et en supprimant les prérogatives de puissance publique du GNIS pour les remplacer par une instance représentative de toutes les filières agricoles, industrielles et non industrielles.
Revenir aux fondamentaux d’un état démocratique afin d’éviter la dérive vers l’oligarchie !