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Tribune

Lettre ouverte au président de la BNP, aux dirigeants et actionnaires


Monsieur le Président Michel Pébereau, vous avez transformé notre banque depuis votre arrivée en 1993. Vous avez apporté vos méthodes et votre philosophie. Vous êtes un dirigeant connu du monde bancaire. La banque n’a jamais fait autant de profits. C’est une grande banque européenne et mondiale. A quel prix ? Votre gouvernance, le modèle BNP a un grave défaut : son coût humain.

Vous ne pouvez pas ignorer la politique mise en place en matière de personnel et la souffrance qu’elle a créée dans notre banque. Les hommes qui ont mis en place ces méthodes de management ont été choisis par vous, Monsieur le Président. Ce n’est pas un hasard si la direction des relations humaines est devenue la direction des ressources humaines. Les salariés ne sont plus des êtres humains, mais des ressources. Quelle régression !

Le management moderne privilégie les chiffres, les techniques, ne veut connaître du salarié que sa « ressource travail », la « ressource humaine », qu’il peut jeter lorsqu’il le souhaite. Quand après restructuration, reengineering, réorganisation, vient le temps d’alléger les effectifs.

Ces fameuses « ressources humaines » rejetées sont soit recyclées, soit marginalisées, et lentement broyées par les méthodes « modernes » de management de la DRH qui les use, les pousse à la démission. Certains résistent mais finissent par tomber malades, déprimer. Poussés à bout, ils s’en vont. Parfois ils assignent l’entreprise aux prud’hommes, d’autrefois au pénal parce que ce sont des êtres vivants qui veulent faire cesser la souffrance en dénonçant ces méthodes inhumaines. D’autres mettent fin à leur vie.
Monsieur le Président Michel Pébereau, souhaitez-vous voir votre nom associé à cette souffrance devenue ordinaire, un outil de gestion ?

Monsieur Baudouin Prot, vous dirigez (Administrateur Directeur Général) notre banque depuis de nombreuses années, vous avez été informé régulièrement depuis douze ans des méthodes mises en place dans notre maison et de leurs conséquences : harcèlement, discrimination, souffrance au travail, maladies professionnelles, invalidités partielles, démission forcées, procès de plus en plus nombreux aux prud’hommes,condamnation au pénal en mai dernier pour discrimination sexuelle, procès à venir pour discrimination syndicale, suicides de plus en plus nombreux.

Pourquoi ne mettez vous pas fin à ces méthodes inhumaines, indignes d’une grande banque multinationale comme BNP Paribas, ancrée profondément dans la vie de notre pays, et acteur incontournable de son économie depuis près de deux siècles ?

Souhaitez-vous être le dirigeant d’une banque reconnue pour ses performances financières, mais aussi pour la souffrance infligée aux salariés ? Etre le directeur général d’une banque baptisée« BNP Paribas, la banque d’un monde où des salariés souffrent et meurent » ?
Monsieur Frédéric Lavenir, vous êtes Directeur des Ressources Humaines depuis 2007. Votre nomination avait suscité l’espoir d’un renouveau. Votre parcours professionnel et votre engagement au service de l’intérêt général laissaient augurer un retour aux valeurs humanistes, qui étaient celles de notre banque jusqu’ à la fin de la décennie 80.

Non seulement les bonnes vieilles méthodes de violence ordinaire, d’intimidation, de harcèlement, de discrimination, de management par le stress et par la peur se perpétuent, mais elles s’intensifient comme le souligne l’accroissement du nombre de suicides. Les médias se sont fait l’écho de plusieurs suicides dont celui de janvier 2008, d’un salarié élu du personnel CFTC, père de famille, ayant une vie associative dans le monde du sport, apprécié de ses clients comme de la population, responsable commercial dans une agence du sud ouest. Malgré les articles à ce sujet et les procédures engagées, rien n’a changé. Fin octobre 2010, la responsable (mère de famille de 44 ans, deux enfants) d’un domaine délicat, la déontologie, de notre filiale BNP Pere (Epargne retraite) a mis fin à ses jours, deux autres collègues du sud est de la France ont tenté de se suicider dont l’un au bureau en se défenestrant.

Monsieur le Président, Messieurs :
Vous n’ignorez pas, en tant que dirigeants, que vous êtes pénalement responsable de la santé des salarié(e)s de notre maison.
Combien de suicides faudra-t-il avant que vous ne réagissiez ? Combien de condamnations au pénal ?
Quand allez-vous faire appel à une commission d’enquête indépendante comprenant des élus du personnel, du CHSCT, la médecine du travail, et des spécialistes de pathologie professionnelle, dirigée par une personnalité indépendante et connue pour son humanité ?


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