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Mais si, Corinne Lepage et Gilles-Eric Séralini ont eu raison d’attaquer le journaliste Jean-Claude Jaillette
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Marie-Paule Nougaret répond à Frédéric Denhez, pour qui « Mais enfin, Mme Lepage et M. Séralini, ce n’est pas malin d’attaquer les journalistes en justice »
Notre confrère semble ignorer que le droit de la diffamation en France protège les journalistes. On peut en effet imprimer ce qu’on veut sur quiconque, au risque de lasser, sans sanction juridique, du moment qu’on peut le prouver. Cette loi de 1881 permet au Canard enchaîné de prospérer depuis 1913, car il n’a pas pour habitude de perdre ses procès.
Ainsi l’instrument de répression est-il devenu celui de la véracité. C’est si vrai que lorsqu’un politique, accusé à tort ou raison, ne contr’attaque pas en diffamation, tout le petit monde juridique et de la presse se dit : c’était donc vrai.
Voilà pourquoi, cher Frédéric Denhez, ni le professeur Séralini, longtemps membre expert de la Commission du Génie Bioméculaire, qui a évalué les OGM pour l’Etat jusqu’en 2008, ni Corinne Lepage, qui a cautionné ses travaux, n’ont pu laisser passer ces mots : « fraude scientifique où la méthodologie sert à conforter des résultats écrits d’avance », signés Jean-Claude Jaillette, dans Marianne du 29 septembre 2002.
On a certes le droit de suivre une ligne anti écolo de base afin d’écarter les lecteurs trop sensibles ou perceptifs. Mais il faut respecter la loi. Et Marianne, qui n’a jamais manqué de courage, le sait bien. Le journal a donc supprimé de son site Internet l’article où figuraient les mots imprudents (et que les chercheurs cités à la rescousse se gardaient d’énoncer).
Imprudents dans plusieurs sens du terme. Car l’inocuité des OGM, évidente pour MM. Denhez et Jaillette, semble plutôt un but à atteindre qu’un résultat avéré. Rappelons quelques faits :
- en 1998 Arpad Puztai, sommité de la toxicologie, dirige malgré un âge avancé un laboratoire d’Edinburgh : il est en effet si prestigieux dans son domaine qu’il suffit qu’il signe un projet pour que l’Institut emporte des crédits européens. Or, voici qu’il teste des pommes de terre OGM sur des rats. La toxine insecticide exprimée chez les tubercules cause d’étranges excroissances dans leur intestin. Il le mentionne à une équipe de télévision venue l’interviewer. Dès la diffusion, on lui ferme son bureau, ses expériences et ses archives. Le premier ministre Tony Blair devra s’en expliquer au Parlement.
- en septembre 2000 aux Etats-Unis, le maïs insecticide Starlink, destiné aux animaux, ayant contaminé de la nourriture pour humains, 40 personnes se plaignent de crises de vomissements. La FDA (autorité de santé) bannit des rayonnages 300 produits. Pour la première fois la Corée et le Japon demandent une garantie sans OGM sur le grain américain.
- de 1997 à 2002, Gotfried Gloekner, fermier allemand a cultivé et utilisé un maïs GM, à la fois insecticide et résistant à un herbicide et perdu au moins douze vaches sans comprendre pourquoi. On lui en a remboursé cinq. Cette affaire a rebondi en 2008 et se poursuit devant les tribunaux.
Tout ceci ayant été publié en France sans poursuite judiciaire, je signe sans crainte,