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La température va fortement monter durant le siècle si rien ne change, avertit le GIEC

Ce vendredi, le groupe scientifique de l’ONU sur le climat, le GIEC, a présenté à Stockholm son cinquième rapport. Reporterre en présente les principales conclusions.

Le point majeur : si les émissions de gaz à effet de serre continuent au rythme actuel, le réchauffement atteindra entre 2,6 °C et 4,8 °C à la fin du siècle.


Les faits saillants du rapport

• La température moyenne à la surface du globe a grimpé de 0,89°C de 1901 à 2012. Dans plusieurs régions du globe, la hausse dépasse 1,75°C.

• Si le rythme de réchauffement entre 1998 et 2012 est plus faible qu’entre 1951 et 2012, la première décennie du 21e siècle est la plus chaude jamais enregistrée.

• Jusqu’à 700m de profondeur, les océans se sont réchauffés entre 1971 et 2010. Les mesures de salinité montrent que l’évaporation et les précipitations au niveau des océans ont été modifiées, tout comme celles au dessus des continents.

• La hausse du niveau moyen des océans était de 1,7 mm/an entre 1901 et 2010, de 2mm par an entre 1971 et 2010, et de 3,2 mm par an entre 1993 et 2010.

- Les projections pour l’avenir :

• La hausse de température à la surface de la terre entre les périodes 1986-2005 et 2081-2100 serait comprise entre 2.6°C et 4.8°C, pour le scénario le plus émissif en terme de gaz à effet de serre, et de 0.3°C à 1,7°C pour le scénario le plus vertueux [1].

• La hausse du niveau moyen des océans irait d’une fourchettte de 45 à 82 cm pour le scénario le plus émissif, à une fourchette de 26 à 55cm pour le scénario le plus vertueux.


Le premier volume du nouveau rapport du Groupe d’experts sur l’évolution du climat de l’ONU (GIEC) a été présenté vendredi 27 septembre à Stockholm à dix heures, ainsi qu’un “résumé à l’intention des décideurs” que Reporterre a pu étudier dans une version quasi-aboutie à quelques jours de la conférence climatique de Stockholm (23-36 septembre) pendant laquelle les deux documents ont été validés par les scientifiques du GIEC. Les deux documents ne seront disponibles sur le site internet du GIEC que le 30 septembre, mais voici la version PDF du texte, en anglais :

Et voici sa traduction en français :

Ce rapport n’apporte pas de réponse propre à créer un consensus général sur l’état de notre climat. Les scientifiques affichent certes une confiance accrue dans leurs observations et leurs projections, mais s’avouent incapables en même temps d’avancer des explications en béton pour expliquer la quasi-stagnation de température globale de la planète depuis quinze ans. Ce qui était prévisible, car ce document est avant tout un précis d’honnêteté intellectuelle ! La preuve, s’il en fallait une, que les climatologues du GIEC n’ont d’autre objectif que la science, et non de quelconques intérêts mercantiles que l’on constate surtout chez beaucoup de leurs détracteurs, notamment dans les pays anglo-saxons.

Depuis l’essor de l’industrie au cours du XIXe siècle, et son envol depuis le milieu du XXe, le climat connait donc un réchauffement, qui est associé à de nombreux phénomènes importants que la hausse des températures. C’est donc avec une mention « extrêmement probable » que le GIEC affirme cette année que plus de la moitié du réchauffement observé depuis le milieu du XXe siècle est provoqué par les activités humaines.

Ce sont surtout les émissions de gaz à effet de serre (principalement le gaz carbonique, puis le gaz naturel - ou méthane -, et le protoxyde d’azote rejeté par les cultures), ainsi que les polluants (poussières soufrées, suies, etc.) qui agissent sur le climat. Des rejets qui ont réchauffé la surface des continents et les océans, modifié le cycle global de l’eau, réduit l’enneigement, les glaciers, la banquise Arctique et les calottes polaires du Groenland et de l’Antarctique, conduit à une hausse du niveau des océans et modifié certains phénomènes extrêmes. Les scientifiques affirment avoir « une confiance élevée » dans ces observations.

Un réchauffement moyen de 0,89 °C depuis 1901

Selon le GIEC, la température à la surface du globe a grimpé en moyenne de 0,89°C entre 1901 et 2012. Globalement, le nombre de journées et de nuits froides à diminué, tandis que le nombre de jours et de nuits chauds a augmenté. Dans le même temps, les océans se sont élevés de 19 centimètres, avec un rythme annuel qui s’est accéléré depuis 1993.

D’ici la fin du XXIe siècle, selon les projections des modèles climatiques présentées par le GIEC, le réchauffement climatique ne devrait pas s’arrêter, bien au contraire. Dans le cadre d’une collaboration internationale baptisée CMIP-5, indépendante de l’ONU, les scientifiques ont simulé le climat terrestre à l’aide de plusieurs dizaines de modèles. Puis publié leurs résultats, avant que les auteurs du GIEC ne s’en emparent pour tenter de dégager un consensus scientifique [2]. Au lieu de travailler sur des scénarios socio-économiques d’évolution des rejets de gaz et polluants liés à nos activités, les modèles se sont appuyés sur quatre scénarios physiques. Une manière de s’affranchir des aléas des projections économiques pour livrer des simulations dont les seules incertitudes sont celles liées à notre connaissance de la physico-chimie du climat.

Dans le cadre du scénario le plus vertueux (et le plus improbable, puisqu’il suppose qu’on aurait des émissions de gaz carbonique négatives à partir de 2070, autrement dit qu’on nettoierait l’atmosphère), la température terrestre grimperait probablement de 0,3 à 1,7 degrés en 2100, par rapport à la moyenne mesurée entre 1986 et 2005.

Selon le scénario le plus « réchauffant » (qui correspond grosso modo à l’inaction actuelle), la hausse serait probablement comprise entre 2,6 et 4,8°C. Cette évolution se traduirait par une montée des océans de 26 à 55 cm dans le cas le plus optimiste, et de 45 à 82 cm, dans le cas le plus pessimiste, valeurs ici aussi calculées par rapport à la moyenne 1986-2005.

Bien évidemment, la parution de cette nouvelle analyse scientifique de l’état de la science climatique, ne manquera pas de réveiller les ardeurs des partisans du laisser-faire environnemental. Ils critiquent l’absence de réponse du GIEC à un phénomène encore mal expliqué : la relative stabilité, à un niveau élevé, de la température depuis le record enregistré en 1998 [3].

Une pause dans le réchauffement depuis dix ans, mais tous les autres signaux restent au rouge

Les hypothèses propres à l’expliquer sont sur la table, mais le recul scientifique manque encore pour trancher. Il peut bien sûr s’agir d’un arrêt du réchauffement climatique, mais tous les autres signaux climatiques restent au rouge : la chaleur stockée par les océans semble bien s’être accrue depuis dix ans, notamment dans les couches profondes ; la superficie de la banquise arctique estivale continue de reculer, en dépit de variations d’une année à l’autre ; le niveau des mers ne se lasse pas de grimper, etc.

La tentation de la géo-ingénierie

Pour finir, Reporterre vous propose une devinette. Quel pays, connu pour avoir longtemps contesté la réalité et les causes du réchauffement climatique, a proposé d’ajouter cette mention dans le résumé évoqué dans ces colonnes ? « La probabilité d’une crise climatique dans la seconde partie du XXIe siècle est élevée. Parmi d’autres possibilités, une solution de ce problème peut être l’utilisation de techniques d’ingénierie du climat pour stabiliser le climat actuel. Ces méthodes sont déjà étudiées par les scientifiques de certains pays (Russie incluse). Ces méthodes visent à prévenir ou gérer les conséquences négatives de la crise climatique. Les experts du GIEC estiment que les recherches en géo-ingénierie du climat devraient être poursuivies. » Si même Poutine a quitté le camp des climato-sceptiques…


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