Tribune —
Le sable de Cancun
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Il paraît que Cancun est une station balnéaire. Ça tombe bien : pendant les pauses, les négociateurs qui doivent s’y retrouver, en décembre, pourront aller faire des pâtés de sable, bâtir des châteaux qu’emporteront les marées, dessiner des plans magnifiques qu’effaceront les vagues.
De quoi vont-ils discuter, au fait ? Du climat. On l’oubliait, celui-là, dans le tohu-bohu de l’actualité. C’est que le processus de discussion est durablement enlisé : la porte ouverte, en 1992, lors du Sommet de la Terre, avec l’adoption de la Convention sur le changement climatique, élargie en 1997 avec le protocole de Kyoto, s’est brutalement refermée, fin 2008, avec l’échec de Copenhague. Depuis, Barack Obama a échoué à faire adopter une loi sur le climat, et les Etats-Unis sont aux abonnés absents. Les Européens sont moins mobilisés que jamais, anxieux du chômage et de la compétitivité. Les Chinois développent à toute vapeur leur industrie des énergies renouvelables sans prévoir de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre avant une vingtaine d’années. Et le chroniqueur écologie d’outre-Manche, George Monbiot, de se désoler : « Le processus est mort » (1), la négociation climatique est perdue dans les limbes, à l’image de celle sur le commerce international.
Fin du film ? Non. Les négociations sur le commerce et sur le climat diffèrent fondamentalement : celle-ci a échoué à cause des gouvernants, incapables de s’entendre, tandis que celle-là a été bloquée par un mouvement populaire, l’altermondialisme. Or s’il est utile de stopper la libéralisation des échanges, les peuples n’ont aucun intérêt à abandonner l’exigence climatique. Car le changement climatique se poursuit inexorablement et, plus on tardera à établir une coordination internationale pour l’enrayer, plus les conséquences en seront dommageables.
Aux Etats-Unis, Greenpeace, le Réseau pour l’action sur les forêts tropicales et l’écologiste Bill McKibben ont lancé un appel à « l’action directe de masse » non-violente (2). « Nous sommes face aux industries les plus puissantes et les plus profitables du monde, écrivent-ils, nous ne les vaincrons pas en étant gentils. »
Se référant aux mouvements civiques passés, ils affirment qu’« un moyen de communiquer efficacement au public et aux décideurs l’importance de la crise est de s’impliquer physiquement ». On avait observé à Copenhague l’émergence d’un mouvement citoyen pour la justice climatique. Lui seul peut maintenant faire pencher la balance dans le bon sens. En France, contre les OGM, les faucheurs volontaires ont naguère montré l’exemple d’une lutte efficace. Les citoyens du climat pourraient s’en inspirer.
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Notes :
(1) http://www.monbiot.com/archives/201...
(2) Traduction par Hélène Crié : http://www.rue89.com/american-ecolo.... Texte original : http://www.grist.org/article/2010-0...