Reportage — Grands projets inutiles
« Cette gare n’a aucun sens » : à Gonesse, le chantier détruit les terres agricoles

Devant les travaux de la future gare en plein champ, le 6 juin 2021. - © NnoMan Cadoret/Reporterre
Devant les travaux de la future gare en plein champ, le 6 juin 2021. - © NnoMan Cadoret/Reporterre
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Grands projets inutiles Étalement urbainDimanche, une trentaine de militants se sont rassemblés sur le triangle de Gonesse, dans le Val-d’Oise. Ils s’opposent aux travaux de la gare de la ligne 17 et à l’urbanisation des dernières terres agricoles en périphérie de Paris.
Gonesse (Val-d’Oise), reportage
Une trentaine de personnes ont répondu à l’appel au rassemblement du Collectif pour le triangle de Gonesse (CPTG), ce dimanche 6 juin 2021. Objectif, rendre compte de l’avancée des travaux de la future gare en plein champ, prolongeant la ligne 17 du Grand Paris Express à Gonesse (Val-d’Oise).
Depuis l’abandon du projet de mégacentre commercial EuropaCity en novembre 2019, cette gare est devenue le nouveau point névralgique de la lutte pour la sauvegarde des dernières terres agricoles en périphérie de Paris. Les opposants plaident pour y renoncer au profit de projets agricoles. Le gouvernement, lui, a trouvé de justesse un nouveau projet — une extension du marché de gros de Rungis sur 50 à 100 hectares — pour justifier cet équipement et lancer l’urbanisation du triangle.

Le collectif proposait de « constater l’ampleur des dégâts déjà causés par le chantier du métro : d’importantes surfaces neutralisées au milieu des champs, le va-et-vient des engins, ainsi que les forages dans le sol, préalables à l’arrivée du tunnelier, perturbent d’ores et déjà les activités agricoles sur le triangle ».
Le motif du rassemblement avait été déposé en préfecture et le trajet autorisé pour la journée seulement. En effet, « la zone est dorénavant interdite, même aux piétons et aux cyclistes », déplore Bernard Loup, président du CPTG, qui lutte depuis plus de dix ans pour sauver les terres fertiles du triangle. La veille encore, il n’avait pas pu s’en approcher.
Vers midi, le groupe s’est élancé sous l’impulsion de ce dernier, figure emblématique de cette lutte, en entonnant le traditionnel « On est là, on est là, même si Macron le veut pas nous on est là ». Des motards de la police nationale, deux policiers à cheval, une équipe de gardiens de la paix et deux agents en civil ont emboîté le pas aux manifestants et à l’immense crapaud, représentant la biodiversité et la lutte du CPTG.

« Cette gare n’a aucun sens »
Le groupe a avancé sur les chemins qui menaient à la Zad, puis a coupé le long des champs, suivi de près par la police montée, avant d’arriver sur le meilleur point de vue sur les travaux. De grandes palissades en taule coupaient le champ de blé de 110 hectares.
« Cette gare n’a aucun sens, personne ne va venir ici alors qu’il n’y a ni habitations ni activités. Le projet de “cité scolaire” ne peut et ne doit pas se tenir », explique Stéphane Tonnelat, ethnographe, qui étudie l’évolution de la lutte des terres de Gonesse depuis quatre ans.

Pour Bernard Loup, bâtir une cité scolaire au-dessous d’un couloir aérien est « impossible » : « Ça voudrait dire que des enfants vont passer dix voire douze ans de leur vie sous des avions... Ça ne peut pas se faire. »
Pendant que lui et ses camarades regardaient les palissades, un petit groupe s’est éloigné pour déployer une banderole : « La colère des terres de Gonesse et d’ailleurs... Résistance ! »
« Aujourd’hui, les investisseurs ne viennent plus dans ce projet grâce à la lutte, se félicite Stéphane Tonnelat. Le triangle de Gonesse, c’est le triangle des Bermudes de l’urbanisme. »
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