En Lorraine, le passage à la voiture électrique menace des emplois

Stellantis (ici le site de Trémery, en janvier 2022) envisagerait de se séparer de 2 000 personnes à partir de 2025, selon les syndicats. - © AFP / Éric Piermont
Stellantis (ici le site de Trémery, en janvier 2022) envisagerait de se séparer de 2 000 personnes à partir de 2025, selon les syndicats. - © AFP / Éric Piermont
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Social Transports Emploi et travailEn Lorraine, des salariés de Stellantis dénoncent un plan social déguisé. Le groupe automobile veut passer au 100 % électrique en 2030, ce qui menacerait de nombreux emplois.
Lorraine, correspondance
C’est un plan social qui ne dit pas son nom. L’un des plus gros employeurs de la région lorraine, le groupe Stellantis (anciennement PSA), envisagerait de se séparer de 2 000 personnes à partir de 2025. C’est ce qui a été annoncé aux représentants du personnel, le 24 janvier dernier, lors d’une réunion extraordinaire du comité social économique (CSE). En cause ? Le passage à l’électrique et l’arrêt de la production de véhicules diesel avec la norme Euro 7. L’Union européenne a en effet décidé d’interdire la vente de véhicules thermiques d’ici 2035.
Mais Carlos Tavares, PDG de Stellantis, a décidé de prendre les devants et d’ici 2030, 100 % des véhicules vendus en Europe seront électriques, soit une avance de cinq ans. Cette incertitude économique pour les salariés est une raison de plus d’aller manifester contre la réforme des retraites ; les salariés ajoutant leurs revendications de sauver les emplois dans les cortèges ou lors de piquets de grève.
Un manque d’anticipation
Si la transition répond à des impératifs écologiques, elle doit s’anticiper. Problème, selon la CGT Trémery, « il faut quatre personnes pour faire un véhicule thermique, contre une pour un électrique ». L’arrêt du diesel pourrait donc mettre de nombreuses personnes des deux sites Metz et de Trémery sur le carreau.
Virginie Alibo, secrétaire générale du syndicat Force ouvrière, se souvient pourtant avoir « posé la question [des suppressions d’emplois] à la direction la première fois en 2020 », sans que celle-ci ne donne de réponse précise.
Pour la direction, pas d’inquiétude. Stellantis affirme aujourd’hui n’avoir « jamais annoncé de suppressions d’emplois sur le site de Metz-Trémery ». Le groupe de Carlos Tavares préfère annoncer « 450 emplois de créés sur le site de Trémery » avant de s’en remettre implicitement à « la pyramide des âges du pôle (50 ans de moyen d’âge à Trémery) ». En clair, les futurs départs à la retraite.
« Une casse sociale à retardement »
Pour justifier ses créations d’emplois et ne pas parler de suppressions, l’entreprise met en avant les deux joint-ventures créées dans chacun des sites lorrains pour la bascule à l’électrique. En clair, il s’agit de sociétés détenues pour moitié par Stellantis, qui réembaucheront 1 000 personnes pour fabriquer les boîtes de vitesse notamment. « On n’est pas dupes, il n’y aura pas de place pour tout le monde », selon la CGT. 3 000 personnes travaillent actuellement sur les deux sites. Et pour garantir la stabilité des futurs emplois des joint-ventures, l’entreprise annonce la production notamment à Trémery dès 2024 de « 1,3 million de moteurs électriques ».
« La direction pense produire 300 moteurs électriques par jour, alors que c’est à peine ce qu’on produit en thermique par semaine », rétorque Virginie Alibo. Avant d’ajouter : « Effectivement, on ne nous dit jamais que ce sont des suppressions d’emplois. On nous dit qu’il y aura sûrement des départs, mais que les salariés n’ont qu’à aller dans les joint-ventures. Le problème, c’est que ce sont beaucoup d’emplois spécialisés, ne permettant pas à la majorité des salariés actuels de Stellantis de postuler, d’autant que les personnes chargées du recrutement sont des anciens de la maison, donc ils font leur sélection tranquillement. »
Suppressions d’emplois, reclassements dans des sociétés annexes sans les mêmes acquis sociaux... Le tout pour un passage à l’électrique qu’elle considère comme du « greenwashing », dénonce l’élue Force Ouvrière. Pour l’instant, les salariés restent dans l’attente. Aucune nouvelle date de rencontre avec la direction n’étant prévue, l’intersyndicale réfléchit à de nouvelles actions.