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Europe

L’initiative citoyenne européenne contre le TAFTA continue de plus belle

Tous les moyens sont bons pour imposer le traité de libre-échange transatlantique, dit TAFTA. La Commission européenne rejette ainsi l’Initiative citoyenne européenne (ICE) signée par plus d’un million d’européens. Mais la campagne continue vigoureusement, et la pétition est toujours active.

Depuis près de deux ans, une campagne de protestation s’est engagée contre le projet de traité de libre-échange transatlantique (alias TAFTA ou TTIP). Un des moyens qu’a utilisé Stop TTIP, le collectif qui réunit plus de 250 organisations en Europe, pour faire abroger le mandat de négociation du TTIP est l’Initiative citoyenne européenne.

Cet outil légal permet en principe à un million de citoyens européens d’inviter la Commission européenne à faire une proposition sur un sujet qui leur importe. Établie par l’article 11.4 du traité de Lisbonne, l’Initiative citoyenne européenne (ICE) est applicable depuis le 1er avril 2012. L’enregistrement d’une ICE permet un débat public. Mais en octobre 2014, malgré le fait que plus d’un million de citoyens l’avaient signée, la Commission européenne a refusé d’enregistrer l’Initiative citoyenne sur le TTIP.

Selon le processus d’enregistrement des ICE, ce n’est pas à leurs initiateurs de prouver qu’elles remplissent les conditions pour être enregistrées, c’est à la Commission qu’il incombe de prouver que l’un des critères de non-inscription est présent. Pourtant, la Commission a fait le choix du refus.

Malgré ce refus, Stop TTIP continue de recueillir des signatures, pour tenter d’obliger la Commission à revenir sur sa décision et défendre les droits des citoyens à influer sur l’action de la Commission (lien vers la pétition).

Refus sans fondement

Ce n’est pas la première fois que la Commission préfère ignorer une proposition d’ICE, même quand elle est soutenue par un très grand nombre de citoyens de l’UE. En trois ans d’existence, 46 initiatives ont été soumises à la Commission. Seules 26 ont été enregistrées, et seulement 3 ont été approuvées. Mais aucune n’a mené à des actions concrètes. Le nombre d’ICE s’est donc effondré en 2014. Aujourd’hui, seules trois initiatives sont en cours.

Deux raisons ont été données par la Commission pour justifier son refus de l’ICE sur le TTIP : la première est que la Commission considère qu’un mandat pour un accord international n’est qu’un acte préparatoire, sans effet juridique sur les citoyens. Cette interprétation ne trouve aucun fondement dans les traités européens.

La seconde raison donnée est encore plus inquiétante. La Commission distingue deux formes d’ICE concernant un accord international de l’Union européenne. La première est une demande pour la conclusion d’un accord, et elle est recevable. Mais quand une ICE, comme c’est le cas, veut refuser la conclusion d’un accord et invite la Commission à ne pas agir ou à arrêter quelque chose, en l’occurrence à abroger le mandat pour les négociations du TTIP et à ne pas conclure le CETA, alors elle ne serait pas recevable car ne produisant aucun effet juridique direct sur les citoyens.

Mais, comme l’explique le juriste James Organ de la Liverpool Law School, « il n’y a aucune exclusion expresse de ce genre dans le règlement des ICE et la Commission a bien le pouvoir de proposer un arrêt des négociations au Conseil. »

Bernhard Kempen, un juriste de l’Université de Cologne, fait aussi remarquer que la décision prise par le Conseil d’entamer des négociations est bien un acte juridique de l’Union qui modifie directement le droit communautaire.

La Commission veut contourner les Parlements nationaux

Selon James Organ, si cette exclusion des actes préparatoires du champ des ICE était maintenue, cela signifierait que les citoyens ne pourront plus influer sur l’ordre du jour de la politique générale de l’UE, lorsqu’elle agit comme un état fédéral européen, par exemple dans la négociation d’un traité.

Pour faire passer plus facilement le TTIP, la Commission tente également d’éviter de soumettre la ratification du CETA et du TTIP aux parlements nationaux. Elle considère que pour les traités qui n’impliquent que l’UE, il suffit qu’ils soient ratifiés par le Parlement européen et par le Conseil.

La lutte continue

Une réunion de stratégie du mouvement contre le TTIP a eu lieu à Bruxelles début février avec environ deux-cents militants venus de toute l’UE et des États-Unis. Ils ont discuté et planifié les activités conjointes pour 2015. Une journée d’action mondiale contre le TTIP et le CETA aura lieu le 18 avril prochain.

La collecte des signatures va durer jusqu’en octobre 2015 et l’objectif est de parvenir au plus grand nombre de signatures possibles, dont un million prévues en Allemagne, le pays où la société civile est le plus active. En France, pour l’instant, environ 80 000 personnes ont signé…

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