Le phénomène climatique El Niño provoque une dangereuse sécheresse en Afrique australe

Durée de lecture : 3 minutes
Climat MondeLe phénomène El Niño a atteint un record d’intensité cette année. Il provoque une grande sécheresse en Afrique australe, et de fortes précipitations en Amérique latine.
El Niño responsable d’une crise alimentaire mondiale ? C’est ce que craint l’Organisation des Nations unies. Ce phénomène naturel, qui se répète tous les trois à sept ans, se traduit par l’augmentation de la température des eaux du centre-est du Pacifique équatorial. Par effet de domino, ce réchauffement a des répercussions sur toute la planète, en affectant la pluviométrie et les températures, notamment dans les régions tropicales d’Afrique, d’Asie-Pacifique et d’Amérique latine, El Niño contribue aux conditions météorologiques extrêmes. Le phénomène a officiellement atteint son apogée à la mi-janvier.
Les sécheresses provoquées par El Niño, selon les estimations que vient de publier le Programme alimentaire mondial, affectent 40 millions de personnes vivant en milieu rural et 9 millions en centres urbains au Zimbabwe, au Mozambique, en Afrique du Sud, en Zambie, au Malawi et au Swaziland à un point tel qu’ils auront besoin d’une aide alimentaire cette année. D’autre part, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU, 10 millions de personnes ont besoin de nourriture en Éthiopie et 2,8 millions de personnes ont besoin d’aide au Guatemala et au Honduras.

L’Afrique du Sud connaît une sécheresse sans précédent, la pire depuis plus d’un siècle. Les précipitations ont été les plus faibles enregistrées depuis que les données météorologiques existent, et ceci en partie à cause de l’influence climatique d’El Niño. De ce fait, la récolte de maïs a été la plus basse depuis 2007 (un quart de moins que la moyenne), ce qui constitue un danger puisque ce pays sert de réserve alimentaire régionale. Mardi 23 février, l’Afrique du Sud a d’ailleurs confirmé envisager d’assouplir ses lois sur les importations de maïs transgénique états-unien et mexicain (90 % de sa production nationale de maïs est déjà issue de cultures OGM) afin de compenser les mauvaise récoltes à venir.
Prolifération des maladies infectieuses
Comme un effet de balancier, El Niño provoque aussi d’anormales précipitations dans d’autres parties du globe. C’est le cas au Pérou, qui a déclaré, début janvier, l’état d’urgence dans certaines provinces particulièrement exposées. Ces précipitations provoquent des inondations et des coulées de boues, et favorisent la prolifération des maladies infectieuses. Selon l’Organisation mondiale de la santé, les fortes pluies attendues au Pérou, en Équateur, au Paraguay et au sud du Brésil, dues à El Niño, pourraient favoriser la propagation du virus Zika. « Le moustique Aedes aegypti, vecteurs du virus Zika, se reproduit dans les eaux stagnantes. Les moustiques risquent donc de se multiplier à cause de l’extension des sites de reproduction favorables », s’est inquiétée l’organisation.
Cette édition 2015-2016 d’El Niño est l’une des plus puissantes enregistrées depuis 35 ans. Boris Dewitte, océanographe au Laboratoire d’études en géophysique et océanographie spatiales, à Toulouse, dit à Reporterre qu’« il a été relevé une anomalie de température des eaux du Pacifique à hauteur de 3°C par rapport à la normale alors que le phénomène El Niño se déclenche à partir d’une augmentation de 1 degré ».
Il est encore trop tôt pour dire si cet épisode est le plus important jamais observé, mais une chose est certaine : sous l’effet d’un réchauffement climatique non contrôlé, les El Niño extrêmes - et leur pendant, le phénomène La Nina - seront plus fréquents, comme cela l’a confirmé une étude scientifique parue en 2014 dans Nature. Cette fréquence pourrait doubler d’ici à 2050 si les émissions de gaz à effet de serre continuent à un niveau soutenu.