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Grands projets inutiles

Paris aussi souffre des projets inutiles : des supermarchés

Depuis le 8 octobre, plusieurs dizaines d’habitants du dix-huitième arrondissement de Paris, regroupés au sein du collectif « Stop Carrefour », sont mobilisés pour s’opposer à l’implantation d’une énième enseigne de la grande distribution autour du quartier Simplon-Barbès. Un grand projet inutile, décidé sans aucune concertation et qui met en jeu des questions de démocratie et de gouvernance locale.


-  POUR PREPARER LA RENCONTRE DE REPORTERRE LUNDI 1 DECEMBRE : Projets inutiles : la victoire est possible !


Ce mercredi 5 novembre, le collectif se réunissait pour la troisième fois en quelques semaines et ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Le 12 novembre, la réunion publique en mairie d’arrondissement consacrée à la modification du Plan local d’urbanisme de Paris a fourni à Stop Carrefour l’occasion de se faire entendre et d’interpeller le maire du 18e arrondissement.

Et le collectif donne d’ores et déjà rendez-vous à la population le samedi 13 décembre pour une Disco Soup destinée à poursuivre et amplifier la mobilisation.

Raz-de-marée de supermarchés

Après avoir mis en coupe réglée périphéries et banlieues de l’hexagone, les enseignes de la grande distribution alimentaire ont en effet trouvé un nouveau terrain de jeu : les villes elles-mêmes.

- Une Zone commerciale à Montélimar -

Le 18e arrondissement est de ce point de vue un cas d’école. En deux ans, c’est une véritable lame de fond qui a déferlé sur un territoire d’un peu plus d’un km², entre les boulevards Ornano-Barbès d’une part et les rues Ramey et Ordener d’autre part. Ici, pas moins de cinq supermarchés sont venus s’ajouter à une offre déjà pléthorique.

L’annonce de l’arrivée d’un nouveau Carrefour programmée fin 2016 début 2017 est donc en passe de transformer les rues du 18e arrondissement en un gigantesque hypermarché à ciel ouvert.

Et rien ne semble pouvoir arrêter l’appétit insatiable des géants de l’alimentaire et de la consommation de masse. D’autant plus que ces derniers paraissent bénéficier de la mansuétude voire de l’encouragement de la municipalité parisienne dans un dossier comprenant de nombreuses zones d’ombre et qui fait la part belle aux promoteurs privés.

Petit business entre amis

Ce futur Carrefour est en effet intégré à une gigantesque opération immobilière liée à la vente d’anciens locaux de la CPAM s’étendant sur 18.000 m². En 2011, la Ville de Paris s’était portée candidate pour l’achat de ces locaux et avait proposé 27 millions d’euros à l’Établissement public foncier d’île-de-France. La CPAM en demandant 33 millions, c’est la SODEARIF, filiale de Bouygues, qui a raflé l’ensemble des locaux via l’Établissement public foncier d’Île-de-France.

La Ville de Paris a alors choisi de soutenir le projet présenté par Bouygues qui comprend une maison de retraite, une crèche, des logements sociaux et privés ainsi... qu’un supermarché Carrefour de 1.700m2 sur deux niveaux.

La construction de ce futur Carrefour est donc le résultat d’un savant mécano juridico-financier entre l’État, la Ville de Paris, des opérateurs privés, des sociétés d’investissement et des géants de la grande distribution, le tout sans que les habitants n’aient été informés et ni évidemment associés.

Un grand projet inutile

Autant d’éléments qui font irrésistiblement penser à ce que l’on regroupe désormais sous l’appellation Grands Projets Inutiles Imposés... Absence de consultation des habitants lesquels sont souvent placés devant le fait accompli, opacité totale du dossier, collusion entre intérêts publics et privés, absurdité tant sur le plan social qu’environnemental, les tristement célèbres GPII se multiplient sur le territoire national et Paris n’y échappe donc pas.

Certes, ce Carrefour n’atteint pas le gigantisme de projets comme Europa City d’Immochan, la filiale du groupe Auchan à Gonesse, mais il concentre cependant tout les maux de ces projets, entre déni démocratique et aberration écologique.

Le Collectif Stop Carrefour du 18e entend d’ailleurs aller au-delà de la lutte contre ce nouveau supermarché en interpellant ainsi la Maire de Paris sur sa vision de la démocratie participative.

La démocratie en jeu

Pour quelle raison, à l’heure où Anne Hidalgo ne cesse de répéter que celle-ci est la pierre angulaire de son mandat, la population n’est-elle pas consultée sur des choix qui impacteront sa vie quotidienne pendant de longues années ?

« Stop Carrefour » souhaite proposer d’autres alternatives qui prennent en considération les manques dont souffre ce quartier en termes de commerces de proximité, de locaux associatifs ou de structures d’économie social et solidaire, d’espaces verts…

Inventer un autre quartier, une autre gouvernance locale, voilà les enjeux qui se posent derrière l’ouverture d’un énième supermarché dans le 18e.

La mobilisation du collectif « Stop Carrefour » a conduit des élus parisiens à formuler au Conseil de Paris des 20 et 21 octobre derniers des vœux auxquels l’exécutif parisien s’est opposé et qui ont été rejetés lors de leur vote. Dans ces vœux, le PG et EELV demandaient notamment à « la Ville de Paris de réétudier le projet et de s’engager dans une réelle concertation avec les habitants ».

Une pétition demandant le retrait du projet Carrefour et le lancement d’une réflexion avec les habitants pour imaginer un projet alternatif a été lancé et un site Internet sera prochainement en ligne.

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