Cet été, adoptez la trousse de toilette 100 % écolo

Durée de lecture : 10 minutes
QuotidienLes produits cosmétiques du quotidien regorgent de substances nocives pour la santé et l’environnement, sulfates, silicones, parabens, huile de palme… Alors, cet été, pourquoi ne pas apprendre à les faire vous-même ?
Les vacances d’été approchent ou sont déjà là, et dans votre valise, c’est à nouveau une ribambelle de produits plus toxiques les uns que les autres que vous allez emporter en voyage. Pourquoi ne pas profiter du temps libre qu’offrent vos congés pour apprendre à confectionner vous-même des produits sains et naturels, adaptés à vos besoins et à votre portefeuille ? Cette semaine, Reporterre a enfilé sa blouse de chimiste pour que vous puissiez embarquer avec vous une trousse de toilette 100 % écolo.
Mais pourquoi fabriquer ses propres cosmétiques ? Si l’argument des perturbateurs endocriniens et substances cancérogènes probables ne vous a pas suffi, en voici d’autres :
D’abord, l’efficacité. Lorsqu’on déchiffre l’étiquette d’un cosmétique conventionnel, force est de constater que l’actif mis en avant sur le paquet ne représente que 2 à 5 % de la composition du produit. En les fabriquant vous-même, vous pouvez créer des formulations cosmétiques pouvant atteindre jusqu’à 100 % de principes actifs. Et, de facto, créer un produit sur mesure qui répondra précisément à vos besoins.
Mais, pour Sophie Macheteau, spécialiste en cosmétique naturelle et autrice du livre Mes cosmétiques maison (Éditions Leduc), l’argument numéro un, c’est le prix. « Produire soi-même, c’est déjà travailler en circuit-court — vous êtes à la fois fabricant et consommateur — et c’est aussi produire à moindre coût. Vous pouvez réaliser une crème à moins de 5 € alors qu’elle coûterait 50 € dans le commerce. » En cosmétique conventionnelle, moins de 1 % du prix payé à la caisse revient à la formule du produit. Les 99 % restant sont destinés au marketing, à la publicité, aux distributeurs…
Faire ses propres cosmétiques, c’est aussi réutiliser les contenants et balayer de son quotidien une quantité faramineuse d’emballages superflus. Autre avantage : le choix des matières premières d’origines naturelles — minérales, végétales ou animales — et non synthétiques minimise à la fois les risques de toxicité pour la santé humaine et pour celle de la planète.
Mais, par quoi commencer ? En épluchant les livres de recettes de cosmétiques naturels, on peut vite perdre pied, surtout face aux noms d’ingrédients inconnus dont on n’a pas l’habitude.
La cuisine : case départ du cosmétique maison
Sophie Macheteau aime comparer l’art de la cosmétique à la cuisine : « On ne commence pas par la préparation de macarons. L’apprentissage se fait progressivement, en débutant par des recettes plus basiques », écrit-elle.
D’ailleurs, pour commencer à fabriquer ses propres produits, pas la peine de sortir de votre cuisine, car vos placards regorgent de matières premières aux vertus insoupçonnées et accessibles à tous.
Sel, sucre, marc de café, farine de pois chiche… tous ces petits grains, mélangés à du yaourt, du fromage blanc ou encore du miel feront un excellent gommage pour le corps et pour le visage. Ça tombe bien, les vacances approchent et la peau du grand voyageur qui sommeille en vous a besoin d’être exfoliée pour bronzer correctement.
Votre bouteille de shampooing est vide ? Pas de panique. Avant d’apprendre à fabriquer vous-même le vôtre, un œuf entier fera très bien l’affaire. Vous ne comptez sûrement pas voyager avec une demi-douzaine d’œufs dans votre valise, n’est-ce pas ? Mais, on peut trouver des œufs presque partout.
Les huiles végétales et essentielles, ingrédients vedettes et autosuffisants
Les deux ingrédients phares de la cosmétique maison sont incontestablement les huiles végétales et les huiles essentielles.
Le premier s’obtient par la pression à froid des graines, de la pulpe, du noyau de fruits oléagineux, ou du fruit entier de certaines plantes. Utilisées seules, ces huiles font d’excellents démaquillants, et remplacent la crème hydratante grâce à leur haute teneur en acides gras et en vitamines. Pas besoin, en définitive, de les incorporer dans des recettes complexes pour les utiliser puisqu’elles contiennent déjà une multitude d’agents actifs. Chaque huile a ses propriétés. Pour choisir l’huile qui convient à vos besoins, Aroma Zone, entreprise spécialisée dans la cosmétique naturelle, a établi une liste que vous pouvez consulter ici.

Les huiles essentielles, elles, sont la quintessence des plantes aromatiques et ont chacune des vertus spécifiques. Elles agissent sur trois sphères : le bien-être, la santé et la beauté.
Cependant, elles sont si concentrées qu’il faut impérativement les diluer (dans de l’huile végétale : elles sont liposolubles et non hydrosolubles), à quelques exceptions près. « À la différence d’autres substances présentes en cosmétique conventionnelle qui contiennent un seul actif, les huiles essentielles contiennent une myriade de molécules qui vont se mettre en synergie », explique Sophie Macheteau. Ces propriétés ultrapuissantes nécessitent d’être utilisée à bon escient et en connaissance de cause.
Certaines, comme l’huile de citron jaune, d’orange ou de bergamote, sont photosensibles, c’est-à-dire qu’elles réagissent lors de l’exposition à la lumière. D’autres sont dermocaustiques : elles irritent la peau et ne doivent pas être mises directement à son contact. D’autres encore sont déconseillées aux femmes enceintes et aux jeunes enfants… Il est donc indispensable de se renseigner sur une huile essentielle avant de l’utiliser.
- Télécharger le tableau des huiles essentielles :
Quels usages peut-on en faire pendant les vacances ? Avant une sortie en forêt, pensez par exemple à remplacer votre antimoustique chimique par ce mélange d’huile végétale plus huile essentielle de citronnelle ou de géranium. Pour apaiser les piqûres, une goutte d’huile essentielle de lavande vraie peut être appliquée directement au coton-tige sur la peau.

« L’huile de lavande vraie (ou lavande fine selon les appellations) est le couteau suisse de l’armoire à pharmacie verte », ajoute Sophie Macheteau. Si chaque huile essentielle est particulière, celle-ci reste la plus tolérée et la plus utile pour toute la famille.
Les poudres, solutions économiques et écologiques
Plus légères et plus écologiques que les formulations aqueuses, les poudres minérales et végétales ont des propriétés tout aussi intéressantes dans la cosmétique maison.
Pour partir en voyage, pas besoin de s’encombrer d’une bouteille de shampooing quand un petit pot de poudre suffit, si l’on n’est pas fan des œufs. La poudre de shikakaï (plante indienne) ou le rhassoul (argile volcanique du Maroc) font des miracles. Il suffit de les humidifier sous l’eau chaude de la douche pour créer une pâte avec laquelle se laver les cheveux.
Vous partez en randonnée et vous n’avez pas d’eau à proximité ? Vous pouvez vous confectionner un shampooing sec, à appliquer tel quel sur le cuir chevelu, ou à intégrer dans un flacon vaporisateur de poudre. La recette :
- de l’amidon de maïs, de pomme de terre, de la poudre d’arrow-root (40 à 60 %) ;
- de la poudre d’une plante traitante de votre choix (20 à 40 %) ;
- de l’argile, qui va absorber l’excès de sébum (20 %) ;
- quelques gouttes d’huile essentielle appropriée (voir le document cité ci-dessus) (0,5 à 2 %).
Autre produit incontournable à fabriquer sous forme de poudre : le dentifrice. Comme pour le shampooing, il suffit de tremper la brosse à dents légèrement humide dans un mélange de poudres aux effets antibactériens et blanchissants. La recette :
- plusieurs poudres végétales (alma, iris, lithothamne, réglisse, thé vert…) et / ou minérales (argile blanche ou verte, bicarbonate de soude, carbonate de calcium) ;
- une huile essentielle comme le citron, le clou de girofle ou la menthe poivrée (ou la fraise et la pêche pour les enfants).
Sophie Macheteau propose ici un exemple de recette de dentifrice à base de charbon.
Autre cocktail à base de poudre : deux cuillères à soupe d’argile (verte, blanche ou rhassoul) mélangées à une cuillère à soupe d’eau minérale suffisent à faire un masque pour le visage.
En ce qui concerne le gel douche, difficile de confectionner soi-même une base lavante lorsqu’on débute. Sophie Macheteau conseille de s’en procurer une (en supermarché bio) et de la personnaliser en y ajoutant des actifs, des senteurs et, pourquoi pas, des poudres colorantes. Pour fabriquer son propre gel douche, il faut :
- une base lavante neutre (mélange naturel de glycérine et tensioactifs végétaux. On peut s’en procurer en boutique spécialisée ou en supermarché bio) ;
- un colorant végétal (betterave, chlorophylle…) ;
- de l’huile végétale pour obtenir une texture différente (5 % de la formule) ;
- quelques gouttes d’huiles essentielles non dermocaustiques pour parfumer et incorporer un actif supplémentaire (1 % de la formule).
Les macérât huileux, les bienfaits des plantes médicinales
Le macérât s’obtient en remplissant un pot en verre de plantes ayant des propriétés spécifiques. Le pot est ensuite rempli d’une huile végétale au choix dans laquelle vont macérer les plantes pendant trois semaines à l’abri de la lumière. Ensuite, le mélange est filtré et le macérât obtenu peut être appliqué tel quel ou servir à la préparation d’autres cosmétiques.
Un macérât huileux de fleurs d’arnica, par exemple, soulagera les muscles endoloris des surfeurs et aidera les blessures des randonneurs à cicatriser.
Vous préférez lézarder sur la plage toute la journée ? Le macérât de carotte est un excellent produit après-soleil qui s’applique en fin de journée. Si par malheur le soleil ne vous a pas épargné, le macérât de millepertuis remplacera la traditionnelle Biafine et apaisera votre peau brûlée. Quant à l’écran total, il est difficile de reproduire les effets des filtres UV présents dans les produits pharmaceutiques. En revanche, il est tout à fait possible d’opter pour une protection écologique.
Les cosmétiques solides : zéro déchet
Atypique, le produit cosmétique solide se présente sous la forme d’un bloc compact. Plutôt que de conserver la mixture du cosmétique dans un pot en verre, il est tout à fait possible de le placer dans un moule (pour lui donner la forme que l’on souhaite) et de le laisser durcir afin d’obtenir un produit qui a l’apparence d’un bloc de savon.

Le déodorant, inconditionnel de la trousse de toilette des vacances, peut se fabriquer sous cette forme. Les ingrédients :
- beurre de karité ;
- huile végétale de votre choix ;
- amidon de pomme de terre, de maïs ou arrow-root ;
- bicarbonate de soude ;
- quelques gouttes d’huile essentielle ;
- vitamine E.
Le tout est à faire fondre au bain-marie. En dehors du feu, ajouter quelques gouttes d’huiles essentielles, verser dans un moule puis laisser refroidir et durcir à l’air libre pendant 48 h. Émilie Hébert, spécialiste des cosmétiques solides et fondatrice de Make It Beauty, propose plusieurs recettes de déodorant 100 % naturel à fabriquer soi-même, comme celui-ci, spécialement conçu pour les véganes.

L’avantage des cosmétiques solides, c’est qu’ils ne requièrent aucun emballage et peuvent être simplement déposés sur l’étagère de la salle de bain, transportés dans un petit sac en tissu ou dans un ancien pot de crème.
Alors, que vous soyez militant écolo, apprenti chimiste ou que vous ayez une âme d’artiste ; que vous soyez décroissant, anticapitaliste, ou juste radin ; que vous soyez antiplastique ou que vous cherchiez à gagner quelques kilos pour votre valise à l’aéroport : le monde fabuleux de la cosmétique naturelle, avec ces plantes aux pouvoirs magiques et ses arômes enivrants n’attend plus que vous.
DES LIVRES POUR ALLER PLUS LOIN
- Mes cosmétiques maison, de Sophie Macheteau. Éditions Leduc.
- Green Cosmétique, le grand livre de la cosmétique naturelle faite maison, d’Émilie Hébert. Éditions Mango.
- Mes cosmétiques solides, d’Émilie Hébert. Éditions Mango.
- Mon atelier beauté aux huiles essentielles, de Danielle Sade. Éditions La Plage.