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Transports

Contre les ZFE, des Londoniens sabotent les caméras

Des Londoniens dégradent des caméras afin qu'elles ne puissent plus relever les plaques d’immatriculation des automobilistes délictueux et empêchent ainsi qu’ils reçoivent une amende.

La zone à faibles émissions de Londres vient d’être étendue à toute la ville. Elle se traduit par des taxes sur les véhicules anciens et polluants. 300 caméras de surveillance ont été vandalisées cet été pour contrer la mesure.

Câbles endommagés, caméras volées ou dégradées… Cet été à Londres, près de 300 caméras de surveillance ont été vandalisées, selon la « Met » (la police londonienne). Ces sabotages ont été commis par de petits groupes d’activistes opposés à l’extension de la zone à faible émission (ZFE) de Londres, baptisée Ulez (Ultra-low emission zones) en Grande-Bretagne. Le plus connu d’entre eux, nommé Blade Runner – du nom d’un film de science-fiction –, est dans le viseur de la police londonienne. Celle-ci a même diffusé la photo d’un homme soupçonné d’avoir participé aux sabotages. Le but des saboteurs : que les caméras ne puissent plus relever les plaques d’immatriculation des automobilistes délictueux et empêcher ainsi qu’ils reçoivent une amende. Ces dernières sont en effet capables de déterminer si les conducteurs ont payé ou non la taxe exigée.

Contrairement à Paris qui recule, Londres accélère sur la question des zones à faibles émissions. La zone Ulez, où la circulation des véhicules polluants est régulée par une taxe, existe déjà depuis 2019. Elle était restreinte au centre de la capitale avant d’être étendue à toute la ville en 2021. Une nouvelle extension est entrée en application à partir du 29 août et couvre tout le Grand-Londres et ses banlieues, soit cinq millions de personnes supplémentaires selon la BBC.

Une amende de 190 euros

Désormais, les automobilistes conduisant des véhicules fabriqués avant 2006 (norme Euro 4) pour les moteurs essence et avant 2015 (norme Euro 6) pour les diesels, devront débourser 12,50 livres (14,80 euros) par jour pour entrer dans la zone concernée. Sinon, ils devront s’acquitter d’une amende de 160 livres (187,37 euros).

Prise par le maire travailliste de Londres, Sadiq Khan, la décision d’élargir la zone Ulez est loin de faire l’unanimité. Selon un sondage de l’institut YouGov effectué en juillet 2022, seuls 51 % des Londoniens interrogés la soutiennent, 27 % sont fermement contre et 8 % auraient préféré qu’elle soit mise en place plus tard.

Cet été, des centaines d’opposants anti-Ulez n’ont pas hésité à descendre dans les rues de Londres. Comparés aux Gilets jaunes par les médias britanniques, la plupart sont des automobilistes qui utilisent leurs véhicules pour faire des trajets quotidiens vers Londres. Dans une vidéo publiée par la chaîne d’information TV Channel 4 News, ils évoquent un sentiment d’injustice, accentué par le poids de la crise économique qui réduit déjà leur pouvoir d’achat.

La pollution de l’air responsable de 4 000 décès par an à Londres

« Passer à un véhicule conforme dans un délai aussi court ne sera tout simplement pas possible pour beaucoup de personnes, surtout en période de crise du pouvoir d’achat, et à une époque où les prix des voitures d’occasion sont si élevés », estime Nicholas Lyes, responsable de la politique routière du Royal Automobile Club (RAC). Selon cette organisation favorable aux automobilistes, l’extension de la ZFE londonienne pourrait concerner 700 000 conducteurs du Grand-Londres. Un chiffre contesté par l’administration des transports londoniens Transport for London (TFL), qui estime que seuls 160 000 véhicules seraient non conformes.

Afin d’éviter que la situation ne dégénère en conflit social, la mairie de Londres a mis la main au porte-monnaie pour financer un programme de « prime à la casse » d’une valeur de 110 millions de livres sterling (soit 128 millions d’euros), selon TFL. Le principe ? L’abandon de son véhicule trop vieux ou trop polluant ouvre droit au versement d’une prime pour l’achat d’un véhicule conforme aux normes Ulez. Les Londoniens pourront donc toucher 2 300 euros pour se débarrasser de leur voiture non conforme, et jusqu’à 1 160 euros pour une moto. Les entreprises pourront aussi bénéficier de primes allant de 7 000 à 12 800 euros pour les fourgons et mini-bus.

Malgré les protestations et la défiance de l’opposition politique, la mairie de Londres maintient son cap sur les zones à faibles émissions, rappelant que la pollution de l’air cause entre 3 600 et 4 100 décès par an dans le Grand-Londres, selon un rapport de l’Imperial College of London de 2019, et aggrave les pathologies respiratoires comme l’asthme. « Étendre la ZFE est une décision difficile mais c’est la bonne pour sauver des vies », a déclaré le maire de Londres sur X (ex Twitter).

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