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Dans le Vercors, une course automobile sur glace cristallise les tensions

Depuis plus de trente ans, la station de Lans-en-Vercors accueille chaque année le Trophée Andros, une course d’automobiles sur glace. L’événement est de plus en plus contesté.

Lans-en-Vercors (Isère), reportage

Les banderoles blanches ornent les rues, bâtiments et commerces depuis déjà plusieurs jours : « Bienvenue au Trophée Andros ! » La course automobile sur glace est organisée chaque hiver depuis 1990 dans la station de Lans-en-Vercors, située dans le périmètre du parc naturel régional (PNR) du Vercors. Pendant deux jours, à la tombée de la nuit, une quinzaine de voitures et une douzaine de motos s’affrontent sur le circuit de glace de la station, à quelques lacets de route du village.

Plus de trente éditions, mais depuis quelques années, la contestation monte sur le plateau du Vercors. Début janvier, le sujet est revenu sur la table au conseil municipal de Lans-en-Vercors. François Nougier, membre de la minorité (Europe Écologie-Les Verts, EELV) depuis 2014, s’est opposé à la majorité divers droite au moment du renouvellement de la convention avec les organisateurs de l’événement. « J’ai toujours voté contre », explique l’élu, qui dénonce une « aberration énergétique » et un événement « indécent », « alors que de nombreux Français n’arrivent pas à payer leurs factures ».

Un collectif citoyen a appelé à trouver des « alternatives » à cet événement jugé « obsolète ». © Raphaëlle Lavorel / Reporterre

Et la voix de l’élu d’opposition n’est pas la seule à s’élever contre la course automobile. Pour la première fois, un collectif citoyen de Lans-en-Vercors a publié une tribune appelant à trouver des « alternatives » à cet événement jugé « obsolète ». « En période de crise énergétique sévère et durable, il est légitime de s’interroger sur la viabilité et l’impact d’un événement tel que le trophée Andros », écrit le collectif, relayé par l’association de protection de la montagne Mountain Wilderness.

« Dans quel monde voulons-nous vivre demain ? »

Les organisateurs de l’événement défendent de leur côté un bilan environnemental : « C’est la première course 100 % électrique au monde », souligne Max Mamers, fondateur du Trophée Andros, alors que depuis 2020 la course n’accueille plus que des voitures électriques. Et si les moteurs des motos du circuit sont toujours thermiques, reconnaît l’organisateur, « un prototype de moto électrique est déployé cette année » pour être généralisé, promet-il.

Pour l’organisateur du Trophée et pour le maire de Lans-en-Vercors, Michaël Kraemer, la polémique autour de la course est « purement politique ». « On essaye de masquer nos actions en faveur de l’environnement avec le Trophée Andros », dénonce le maire, qui rappelle la création en 2019 d’un espace naturel sensible (ENS) à proximité du circuit. « On a voulu montrer que les deux choses étaient compatibles, que chacune pouvait trouver sa place », assure l’édile. 

Depuis 2020, la course n’accueille que des voitures électriques. Celles-ci ne sont pas écologiques, notamment en raison des batteries en lithium. © e-Trophée Andros

Celui qui est également vice-président au tourisme du PNR du Vercors se défend d’une incompatibilité entre le Trophée et la charte du parc, critique régulièrement adressée par les opposants à la course. La charte préconise notamment de « limiter l’utilisation des véhicules motorisés à des fins de loisirs »… mais reste non contraignante. « Juridiquement, il revient aux communes de décider de l’interprétation qu’elles souhaitent faire des mesures de la charte », explique-t-on du côté de la communication du parc.

Électrique ou thermique, peu importe pour l’élu d’opposition François Nougier : le Trophée Andros est devenu un symbole « de ce que l’on n’arrive pas encore à réaliser, localement, pour pouvoir participer à un effort collectif ». Et les deux visions qui s’opposent semblent irréconciliables. Face à l’argument de l’intérêt touristique de l’événement pour les commerçants et hôtels du plateau du Vercors, François Nougier réplique : « La question n’est pas de savoir s’il y a des retombées économiques, mais de savoir dans quel monde nous voulons vivre demain. »

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