Guyane : la Montagne d’or rejetée par le Conseil constitutionnel

Des personnes s'étaient réunies pour enterrer symboliquement le projet minier de la Montagne d’or en juin 2019, à Cayenne (Guyane). - © Hélène Ferrarini/Reporterre
Des personnes s'étaient réunies pour enterrer symboliquement le projet minier de la Montagne d’or en juin 2019, à Cayenne (Guyane). - © Hélène Ferrarini/Reporterre
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Mines et métaux Forêts tropicalesLes associations environnementales se réjouissent. Une décision du Conseil constitutionnel ouvre la possibilité pour l’État de refuser la prolongation des concessions minières de la Montagne d’or.
Cayenne (Guyane), correspondance
Les Sages ont tranché. Prolonger une concession minière au seul motif que le gisement est exploité au moment de l’expiration du titre minier est inconstitutionnel. Motif : cette disposition ignore tout bonnement la Charte de l’environnement, qui a une valeur constitutionnelle. Or renouveler un titre minier est bien « susceptible de porter atteinte à l’environnement », a jugé le Conseil constitutionnel le 18 février, saisi par le Conseil d’État à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité déposée par France Nature Environnement (FNE).
Cette décision pourrait mettre un coup d’arrêt définitif au projet minier de la Montagne d’or. Celui-ci entend exploiter 80 tonnes d’or primaire en creusant une fosse de 2,5 kilomètres de long et en recourant à la cyanuration dans la forêt guyanaise, à proximité immédiate d’une réserve biologique. Jusqu’à présent, la compagnie minière de la Montagne d’or avait obtenu confirmation par la justice administrative de son bon droit d’obtenir le renouvellement des concessions qu’elle demandait. Le ministère de l’Économie s’est pourvu en cassation devant le Conseil d’État, qui pourra désormais s’appuyer sur la décision du Conseil constitutionnel pour refuser l’octroi des titres miniers.
En Guyane, des concessions minières avaient été délivrées au XIXe et XXe siècle pour des durées illimitées. Ces dispositions d’un autre âge avaient finalement été modifiées et ces concessions dites « historiques » sont arrivées à expiration le 31 décembre 2018. Quatre entreprises minières avaient demandé le renouvellement de leurs titres : la Compagnie minière Boulanger, l’Union minière de Saül, Auplata et la Compagnie de la Montagne d’or. FNE a profité de la prolongation des concessions de la Compagnie minière Boulanger, la première à voir ses titres miniers renouveler, pour demander au Conseil constitutionnel de statuer sur la constitutionnalité de ces dispositions.
« Une jurisprudence essentielle qui aura des conséquences majeures »
Les Sages sont allés dans le sens des associations environnementales, et ont censuré les conditions de renouvellement des concessions qui faisaient fi du droit de l’environnement. Pour France Nature Environnement et Guyane Nature Environnement, c’est « une jurisprudence essentielle qui aura des conséquences majeures au-delà même des projets miniers en France : une administration doit pouvoir dire non à tout projet attentatoire à l’environnement ». Raymond Léost, administrateur et responsable du réseau juridique de FNE, précise que « c’est la première fois que le Conseil Constitutionnel fait application des articles 1 et 3 de la Charte de l’environnement qui garantit le “droit de vivre dans un environnement sain et équilibré”. » La Charte de l’environnement est entrée en vigueur en 2005.
En ce qui concerne le droit minier, la réforme contenue dans la loi Climat promulguée le 22 août 2021 prévoit que l’administration peut désormais refuser un titre minier pour des critères environnementaux. La nouvelle version du droit minier a donc « mis fin à l’inconstitutionnalité constatée », précise le Conseil constitutionnel. Les projets miniers devront désormais compter avec le droit de l’environnement.