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Jean-Luc Mélenchon propose la création d’un groupe parlementaire Nupes : EELV, le PCF et le PS refusent

Jean-Luc Mélenchon à Paris le 19 juin 2022.

Qui est la première force politique d’opposition en France ? Depuis le second tour des élections législatives, le 19 juin, le Rassemblement national se présente comme tel. Avec un score de 17,39 %, le parti d’extrême droite répète à qui veut l’entendre que ses 89 nouveaux députés seront « le premier groupe d’opposition de l’Assemblée » nationale.

Pour éviter cette situation, Jean-Luc Mélenchon, arrivé en troisième position à l’élection présidentielle, a fait une proposition lundi 20 juin : que la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes), qui était jusque-là un regroupement de différents partis de gauche, devienne un seul et même groupe parlementaire à l’Assemblée nationale.

Avec son score de 32,64 % et ses 142 sièges [1], la Nupes dépasse largement le Rassemblement national. Sans groupe unique, les différents partis qui composent la Nupes auront des groupes parlementaires plus petits : environ 72 députés pour la France insoumise, 26 pour le Parti socialiste, 23 pour le pôle écologiste…

Union alternative

« Je crois que nous devons être et rester une alternative unie, a déclaré Jean-Luc Mélenchon devant la presse. Autrement dit, la Nupes devrait se constituer comme un seul groupe au Parlement. De manière à ce que, sans aucune discussion possible, il soit établi qui mène l’opposition dans le pays. »

L’ancien député des Bouches-du-Rhône a rappelé qu’il n’avait plus « aucune responsabilité » politique à l’heure actuelle, et qu’il s’agissait bien d’une proposition, et non d’une injonction. « Naturellement, je m’en remettrai à ce que décideront les groupes », a-t-il ajouté.

Cette déclaration a étonné Simon Persico, chercheur en sciences politiques à Grenoble. « Le second paragraphe de l’accord de la Nupes stipulait que chaque parti aurait son propre groupe parlementaire à l’Assemblée. La France insoumise ne cesse d’appeler à la VIᵉ République et à l’instauration de la proportionnelle. Or, un des éléments essentiels dans ce type de régime, c’est le respect de la parole donnée, dit-il à Reporterre. On met longtemps à rédiger et signer un accord de coalition, mais, une fois qu’il est signé, on s’y tient à la lettre. On peut trouver étrange qu’une des premières annonces de Mélenchon au lendemain de l’élection vienne remettre en cause la déclaration commune qui fonde la Nupes. »

« Vouloir supprimer cette diversité est une erreur »

Ainsi, Europe Écologie-Les Verts (EELV), le Parti socialiste (PS) et le Parti communiste français (PCF) ont décliné cette proposition. « Le moment politique n’invite pas à la confusion, mais à la constance, à la cohérence et au respect des engagements pris devant les électrices et les électeurs, a déclaré le député européen David Cormand (EELV) sur Twitter. Disposer de quatre groupes n’est pas une faiblesse, c’est une force. »

Fondre les quatre partis dans un groupe unique leur ferait perdre en influence et en financement selon le journaliste spécialisé sur les questions parlementaires Pierre Januel. En faisant les comptes, il a estimé que cette fusion diviserait par quatre leurs droits de tirage de commission d’enquête [2] et d’ordre du jour, par deux le financement des groupes et par trois leurs temps de parole.

La gauche réunie serait donc moins puissante avec un groupe parlementaire qu’avec quatre. Pourquoi alors un tel empressement de Jean-Luc Mélenchon à rassembler tout le monde ? « Il y a un aspect symbolique d’être le premier groupe d’opposition, c’est simple dans la tête de tout le monde, précise Simon Persico. Mais surtout, un groupe unique permettrait à la France insoumise de dominer et peut-être d’accélérer la fusion vers une force politique unique. »

Une disparition que les partis historiques ne sont pas prêts à accepter. « La gauche est plurielle, elle est représentée dans sa diversité à l’Assemblée nationale, a tweeté Valérie Rabault, présidente du précédent groupe socialiste à l’Assemblée. C’est une force au service du peuple français. Vouloir supprimer cette diversité est une erreur, et je m’y oppose », a-t-elle déclaré.

Tous les partis composant la Nupes ont toutefois annoncé qu’ils déposeront ensemble une motion de censure contre le gouvernement, le 5 juillet, à l’Assemblée nationale.

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