Marche pour le climat : succès à Paris, triomphe à New York

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ClimatLa marche pour le climat a connu un vif succès dans les nombreuses villes du monde où elle s’est déroulée. A Paris, plus de dix mille personnes se sont retrouvées pour rappeler que le changement climatique est l’enjeu politique prioritaire pour l’humanité, à deux jours d’un sommet de l’ONU.
- Paris, reportage
Comme à Gonesse (pour le premier Alternatiba Ile-de-France), la veille, ou au Festival La voie est libre quelques minutes auparavant, où des averses se sont abattues sur les participants, on a pu craindre, dimanche 21 septembre, que le climat ne se retourne contre ceux et celles qui s’étaient mis en marche pour le sauver, à Paris, comme dans plus de 150 autres villes dans le monde.
Mais c’est un autre symbole qui l’a emporté : celui de la rapidité de son changement justement, puisqu’il a vite dissipé les pluies et octroyé un soleil réconfortant aux manifestants qui ralliaient l’Hôtel de Ville depuis la place de la République. Lançant pour de bon une parade dont la sonorisation fonctionnait à l’énergie solaire.
L’énergie était surtout humaine, dans cette manifestation présentée comme « le plus grand rassemblement citoyen jamais organisé sur l’enjeu climatique ». Batucadas, déguisements, banderoles : les moyens d’expression étaient libres, à peine contrôlés par la brigade des clowns qui avait fait le déplacement pour l’occasion :

- Ecouter la clown :
Le cortège a défilé dans une ambiance détendue, jeune et familiale, pour exprimer sa préoccupation du changement climatique. Le but : participer à l’interpellation universelle, à l’avant-veille du sommet pour le climat qui réunira les chefs d’Etat à New-York.

Et si tout le monde n’avait pas respecté le dress code en vert, harmonisé au logo officiel de la manifestation – un cœur vert –, ils étaient nombreux à scander en choeur les slogans : « Changer de climat, on n’en veut pas », « Le pétrole, c’est tabou, on en viendra tous à bout » ou bien encore celui-ci :
- Ecouter "Il faut tout le monde, pour tout changer" :
Dans la foule, beaucoup reconnaissaient faire parmi leurs premières manifestations. « Je n’avais fait que quelques manifestations étudiantes, mais c’est ma première sur un tel sujet », explique Barry, Irlandais, et séduit à l’idée que le même événement se déroule simultanément à Dublin.

Pour d’autres, comme James, qui porte son fils Arthur, trois ans et demi, sur ses épaules, cela fait « plus de quinze ans qu’on n’avait pas participé à une manifestation pédestre ». L’action de marche est un geste d’engagement ponctuel ; la plupart refuse d’ailleurs l’étiquette de « militants », comme en témoigne Emilie :
- Ecouter Emilie :
Cette mobilisation des non-militants témoigne du succès de la manifestation. Jouer sur une perception nouvelle de la gravité de la situation et la sortir des seules sphères politiques : c’était un parti pris, depuis le début, par Avaaz, coordinateur de l’événement et dont l’objet est d’animer des campagnes de mobilisation internationale sur internet : « Cette marche doit être un signal fort de la société civile à l’égard de ses dirigeants. C’est d’autant plus vrai en France, où le gouvernement doit prendre le leadership sur le climat en vue de la COP 21 à Paris en décembre 2015 », explique Marie Yared, chargée de campagne pour Avaaz.
L’action est un moyen de sensibilisation sur un thème crucial, thème qu’a déjà bien saisi Clémence :
- Ecouter Clémence :
Dépolitiser le débat : serait-ce la clé de la réussite dans la lutte contre le changement climatique ? « Il est essentiel de revenir à une définition noble de la politique, dans laquelle c’est l’ensemble de la société que l’on porte en attention, nous répond Nicolas Hulot à la descente de l’estrade où il aura prononcé quelques mots. C’est ce qui a tué l’écologie, ce paradoxe d’un enjeu universel qu’on a réduit à un enjeu partisan. C’est un sujet qui doit dépasser tous les courants. C’est un sujet humaniste, qui ne peut donc pas se réduire à un parti ».
Au milieu du bain de foule, Jean-Luc Mélenchon répond à Reporterre qu’il ne partage pas cet avis : « Il ne faut sûrement pas dépolitiser le débat, ce serait une erreur terrible. C’est une question fondamentalement politique : comment peut-on expliquer la stupidité des superstructures politiques devant le changement climatique autrement que par la pression des intérêts privés ? ». Pour autant, celui qui s’est fraîchement retiré de ses responsabilités au sein du Parti de Gauche admet qu’il faut « sortir le sujet du contexte partidaire, c’est le meilleur moyen de faire avancer la cause ».
Les partis politiques étaient d’ailleurs loin d’être absents de la manifestation. Si seule Delphine Batho, isolée en tête de cortège, représentait le parti au gouvernement, les drapeaux d’Europe Ecologie-Les Verts ou du Parti de Gauche, notamment, faisaient bonne figure. Fondateur de Nouvelle Donne, Pierre Larrouturou justifie l’articulation entre tous ces acteurs : « Il faut agir en tenaille. C’est une très bonne nouvelle qu’il y ait beaucoup de gens en dehors des ONG classiques, des partis politiques, des syndicats qui ont envie de s’impliquer et de faire bouger les choses. Et c’est très bien que dans les hémicycles et parmi ceux qui font la loi, il y en ait qui porte cette urgence ».
Faire du climat un enjeu incontournable, voilà en tout cas l’objectif commun à tous les participants d’hier, quelles que soient leur expérience ou leur tendance politique. A plus d’un an de l’échéance de la conférence COP 21 qui aura lieu près de Paris en décembre 2015, la manifestation d’hier se veut une première étape.

Combien de participants ? 5.000 selon la préfecture de police. L’occupation totale et continue de la longue rue Beaubourg pendant plus de deux heures conduisait pourtant les organisateurs à quintupler cette estimation, jusqu’au nombre de 25.000 manifestants.
Si l’on peut supposer que près de 15 000 personnes ont bien participé à l’action collective, il est surprenant de constater qu’ils étaient vraiment là pour le climat, et pas pour le concert qui a suivi : le chanteur Patrice a clôturé l’après-midi devant un auditoire étonnamment réduit. Un mal pour un bien selon Elika, qui écoutait d’une oreille distraite les notes de reggae du chanteur allemand : « Cela prouve que les gens se sont bien bougés pour la marche, et non pour la musique ».
PLUS DE TROIS CENT MILLE MANIFESTANTS A NEW YORK

La manifestation pour le climat à New York a connu un succès retentissant avec plus de 300.000 personnes dans les rues.
D’autres marches ont eu lieu dans le monde, à Melbourne (Australie), Jakarta (Indonésie), Amsterdam, Londres, Bruxelles, etc. (The Guardian.)