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Un problème de soudures à l’EPR de Flamanville fait craindre de nouveaux surcoûts

Nouveau coup dur pour le chantier de l’EPR de Flamanville (Manche). Le 3 mars, EDF a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un écart de conception concernant trois piquages du circuit principal du réacteur en construction. Ces défauts pourraient entraîner de nouveaux retards et surcoûts dans la mise en service du réacteur de troisième génération, prévue en 2023.

Les piquages permettent de connecter le circuit primaire, qui contient l’eau qui permet de refroidir le cœur du réacteur et de transférer l’énergie issue de la réaction nucléaire aux générateurs de vapeur, et plusieurs circuits auxiliaires. Selon l’ASN, les soudures de ces trois piquages « ne respectent pas les exigences de la démarche d’exclusion de rupture » engagée par EDF pour cette partie des tuyauteries du circuit primaire. Or EDF et Framatome avaient élargi le diamètre de ces soudures par rapport à la conception initiale, ce qui pourrait entraîner une brèche plus importante que prévu en cas de rupture — et rend en tout cas caduques les études de sûreté transmises par EDF à l’ASN.

En réaction, l’ASN a demandé à EDF d’identifier les causes profondes de cet écart et les raisons de sa détection tardive. L’électricien est également sommé de lui indiquer sa « stratégie de traitement » du problème et de « mettre en œuvre les actions correctives qui devront notamment permettre de s’assurer de l’absence d’autres écarts sur le circuit primaire principal ».

EDF a indiqué au quotidien Le Monde étudier « différentes options » sans qu’« à ce stade, aucune option n’[ait] été arrêtée ». « EDF a probablement deux options : soit reprendre les soudures pour leur appliquer une qualité conforme à cette exigence d’"exclusion de rupture", soit reprendre les études de sûreté pour intégrer une brèche de plus grande taille. Aucune de ces options n’est a priori facile », a commenté sur Twitter le consultant en énergie et nucléaire Yves Marignac, expert à l’institut Négawatt.

La facture du projet devrait s’établir à 12,4 milliards d’euros selon EDF

Ces défauts pourraient entraîner un nouveau retard dans la mise en service du réacteur, prévue pour mi-2023. La facture du projet, qui dervait s’établir à 12,4 milliards d’euros selon EDF, pourrait encore grimper. Lancé en 2007, le chantier de l’EPR de Flamanville était censé s’achever en 2012 et coûter 3,3 milliards d’euros.

Ce contretemps est désastreux pour EDF. Certes, un porte-parole du groupe a indiqué au Monde qu’« à date, il n’y a pas d’impact sur le coût et sur le planning du projet ». Mais en interne, on serre les dents. Dans son document d’enregistrement universel, remis le 15 mars à l’Autorité des marchés financiers, le groupe admet que « le projet n’a plus aucune marge, ni en termes de calendrier ni en termes de coûts ».

Sur Twitter, les commentaires oscillent entre colère et consternation. « "Oups !" On attend avec impatience la prochaine réévaluation à la hausse du coût total de l’EPR par la Cour des comptes. On en était à 19,1 milliards. Qui tient les paris ? » a ironisé Célia Gautier, de la Fondation Nicolas Hulot. « EDF savait dès 2013 que les piquages n’étaient pas conformes, mais comme d’habitude elle compte sur le fait accompli pour imposer à l’ASN de valider. Il s’agit du circuit primaire, le risque est énorme. Ça rappelle une histoire de cuve, non ? » a réagi Yannick Rousselet, de Greenpeace France.

Au-delà de ce chantier, c’est toute la filière nucléaire qui retient son souffle. En effet, EDF et l’exécutif envisagent de construire six nouveaux réacteurs EPR pour remplacer une partie du parc actuel. Mais bien qu’EDF ait déjà commandé certaines pièces forgées à Framatome, Emmanuel Macron et le gouvernement ont prévenu qu’aucune décision ne serait prise avant la mise en service de l’EPR de Flamanville.

  • Sources : Reporterre
  • Photos :
    . Chapô : L’EPR de Flamanville en juin 2018. © Émilie Massemin/Reporterre
    . Illustrations : © Autorité de sûreté nucléaire

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