Une pollution marine menace l’île de La Réunion

Le vraquier mauricien «Tresta Star» échoué sur la côte de Saint-Philippe. - @ Bastien Doudaine/Reporterre
Le vraquier mauricien «Tresta Star» échoué sur la côte de Saint-Philippe. - @ Bastien Doudaine/Reporterre
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Eau et rivières MondeUn vraquier s’est échoué sur une côte de l’île de La Réunion, et du pétrole a commencé à s’écouler. Un nouveau cyclone ce week-end risque de précipiter une petite marée noire.
La Réunion, correspondance
Le pétrolier mauricien Tresta Star a fait naufrage sur la côte du Tremblet, à Saint-Philippe le 3 février. Mais c’est hier, vendredi 18 février, que des nappes de fioul ont été constatées autour du navire, elles s’étendent désormais sur plus de 2,5 km. En cause, les failles dans la coque du bateau et une météo qui complique toute opération. Associations et élus alertent sur cette pollution maritime.
« On est très en colère parce qu’on avait prévenu, il n’y a pas de petite pollution ! » dit à Reporterre Tiphaine, coordinatrice de Greenpeace Réunion qui représente aussi ses alliés d’Attac et d’Extinction Rébellion. Avant le naufrage, le ministre des Outre-Mer, Sébastien Lecornu, se voulait rassurant : l’armateur mauricien voyageant à vide, il n’y aurait eu à ce stade « pas de risque de pollution maritime grave par hydrocarbures ». Ces propos n’avaient pas suffi à rassurer les écologistes réunionnais qui s’étaient rendus sur le site du naufrage dès la nouvelle connue. « Il y avait déjà des petites traces d’hydrocarbures dans l’eau et c’est logique quand on voit comment le bateau est enfoncé dans les rochers. Il y a forcément une faille et cela s’échappe », décrit la militante.
Le cyclone Emnati risque d’aggraver la situation

Le Tresta Star s’est échoué sur les côtes réunionnaises le 3 février, pendant le cyclone Batsirai. En détresse, c’est sur la côte du Tremblet, à Saint-Philippe, qu’il a fini sa course. Mais le site est particulièrement accidenté. En effet, il y a là une coulée de lave apparue en 2007, composée de roches volcaniques qui rendent toutes les manœuvres très délicates. Les opérations de dépollution commencées il y a quelques jours auraient permis d’évacuer, via le remorqueur Vasileios, du carburant présent dans la cale du bateau ainsi que des déchets. Mais au moins quatre brèches dans la coque compliquent les opérations visant à renflouer ou extraire le navire. Des équipes de dépollution sont attendues sur place dès que la météo le permettra.
Mais elles semblent compromises durant les prochains jours puisqu’un nouveau cyclone baptisé Emnati est annoncé sur l’île en fin de week-end.
Dès vendredi 18 février, le préfet de la Réunion a activé le centre de stockage Polmar terre, un centre qui dispose de matériel dédié à la lutte contre les pollutions maritimes, des équipements qui ne pourraient finalement être mise en place qu’après le passage du cyclone. « Mais pourquoi cela n’a-t-il pas été fait plus tôt ? » demande Tiphaine ; « c’est comme pour le réchauffement climatique : on a ignoré le risque de naufrage d’un pétrolier alors même que c’était évident vu le nombre de passages au large de l’île. Malgré ce qui est arrivé à Maurice, ils n’ont rien anticipé, ils n’étaient pas prêts ».
La biodiversité en péril
Le maire de Saint-Philippe, Olivier Rivière, ne décolère pas non plus et dénonce de son côté un manque de transparence du propriétaire du Tresta Star. « On nous annonçait 8 m3 de fuel dans la cale et, il y a deux jours, on a appris qu’ils avaient pompé 21 m3 du fuel. C’est donc qu’il y en avait beaucoup plus ! Il en resterait encore mélangé désormais à de l’eau mais en quelle quantité ? », dit-il à Reporterre. L’élu confirme que pour l’heure, nous ne sommes pas dans un cas de marée noire mais que des nappes d’hydrocarbures sont visibles et, surtout, il s’inquiète de l’état du navire. « Mes équipes sur place ce matin ont constaté un trou béant à bâbord. Avec les vagues attendues avec le cyclone Emnati, on craint une dislocation ».
Olivier Rivière a obtenu des services de la préfecture qu’un poste de commandement avancé soit mis en place dès la levée de l’alerte cyclonique afin de ne pas perdre de temps dans les opérations. Il rappelle aussi les efforts mis en place pour protéger la biodiversité et notamment l’obtention pour la réserve biologique dirigée du littoral du label de la Liste verte des aires protégées décerné par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) ainsi que la volonté de faire perdurer la pêche artisanale. Pour le maire de Saint-Philippe, le principe du pollueur-payeur doit être appliqué et il n’exclut pas d’engager des poursuites judiciaires contre l’armateur si ceci n’est pas respecté.