39 menhirs détruits pour construire un Mr Bricolage

Photo d'illustration qui ne représente pas les mégalithes qui étaient installés sur le site du chantier de Mr Bricolage. - Capture d'écran d'une vidéo de l'office de tourisme de Carnac (Morbihan).
Photo d'illustration qui ne représente pas les mégalithes qui étaient installés sur le site du chantier de Mr Bricolage. - Capture d'écran d'une vidéo de l'office de tourisme de Carnac (Morbihan).
Durée de lecture : 3 minutes
Étalement urbainVa-t-on vers une affaire de Carnac ? Début juin, Christian Obeltz, passionné d’archéologie, dénonçait dans un article publié sur le site de l’association Sites et monuments plusieurs aménagements « brutaux » réalisés aux abords des alignements de menhirs. Des travaux qui, selon lui, dénaturent « ce site mondialement connu ».
L’archéologue amateur pointe, entre autres chantiers, un permis de construire délivré en août 2022 par le maire de Carnac pour la construction d’un magasin Mr Bricolage. Cette dernière a entraîné la destruction de trente-neuf menhirs situés sur le Chemin de Montauban. Ce site était pourtant identifié depuis avril 2015, explique Ouest-France qui a révélé l’affaire le 7 juin. Un rapport de l’Institut national de recherches archéologiques préventives réalisé après des fouilles concluait à l’époque à la découverte probable « d’un alignement mégalithique inédit ».
Des blocs manifestement déplacés pour construire un muret
Contacté par Ouest-France, le maire de Carnac, Olivier Lepick, indique ne pas avoir été au courant que la zone était référencée. « L’affaire semble en effet complexe. Selon la mairie, la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) avait placé le site en zone de prescription dans l’ancien Plan d’occupation des sols (POS). Mais pas dans l’actuel Plan local d’urbanisme (PLU) », détaille le quotidien breton.
La Direction régionale des affaires culturelles (Drac) a réagi le 7 juin sur cette affaire. Elle reconnaît qu’en 2015, elle avait demandé au maître d’ouvrage de procéder à une fouille de 2 000 m2 sur la zone à construire, à la suite de la découverte de blocs manifestement déplacés pour construire un muret et de blocs de 0,50 à 1 mètre de haut implantés plus profondément dans la terre. « Quatre d’entre eux présentaient les marques d’une usure en position dressée depuis très longtemps », précise la Drac. Les fouilles n’auront jamais lieu : « Aucune suite n’a été donnée par le maître d’ouvrage à cette prescription puisque le permis de construire pour le supermarché a finalement été refusé pour des raisons non liées à l’archéologie. »
Un ensemble de stèles parmi les plus anciens de Carnac
Après une nouvelle demande de permis de construire en 2022, l’architecte des bâtiments de France a rendu un avis favorable. Par ailleurs, le PLU de la commune prévoit que la zone du projet est une zone d’activité, selon la Drac. Elle précise que ce terrain n’est pas répertorié parmi les zones de présomption archéologique, qui justifient un avis du service régional d’archéologie. « Du fait du caractère encore incertain et dans tous les cas non majeur des vestiges tels que révélés par le diagnostic, l’atteinte à un site ayant une valeur archéologique n’est pas établie », conclut la Drac. Un avis très différent de celui de Christian Obeltz.
« Ces petits menhirs constituaient sans doute l’un des ensembles de stèles les plus anciens de la commune de Carnac, à en juger par les datations Carbone 14 obtenues en 2010 sur le site voisin de la Z.A de Montauban : 5 480-5 320 avant J.-C., soit la datation la plus haute obtenue pour un menhir dans l’ouest de la France ! », écrit le spécialiste en archéologie. Une perte peut-être inestimable alors qu’un dossier de candidature au Patrimoine mondial de l’Unesco est actuellement en cours de constitution. Il concerne 397 mégalithes de Carnac et des rives du Morbihan, répartis sur 27 communes.