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Climat

Comment faire face au changement climatique ? Le Giec va livrer ses solutions

Le glacier Sheridan, en Alaska, photographié en 2018, a considérablement fondu ces dernières années.

Comment lutter efficacement contre le changement climatique ? Des chercheurs du monde entier, après avoir exploré la littérature scientifique, proposent une palette de réponses qui sera publiée lundi 4 avril. Mais les gouvernements ont eu du mal à se mettre d’accord, et le rapport ne sera publié qu’en fin de journée.

Actualisation - Lundi 4 avril 2022 à 10h10 - Les négociations pour finaliser le nouveau rapport du Giec sur les solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre se sont terminées dimanche soir 3 avril avec plus de 48 heures de retard. Reporterre comptait vous en présenter son contenu ce lundi, mais les négociations sur le Résumé pour les décideurs ont traîné en longueur notamment en raison de divergences sur des questions liées à la finance, ont indiqué des participants sous couvert de l’anonymat. Les États-Unis étaient réticents à l’intégration de données qui montrent les flux financiers très importants dont auraient besoin les pays en développement pour réduire leurs émissions et respecter l’accord de Paris, tandis que la Chine voulaient les mettre en avant, selon un de ces participants. -Source : AFP et BFMTV.


Article - Publié le 2 avril 2022 à 9h20

Comment réduire drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre ? Durant cinq ans, le groupe de travail n° 3 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) a exploré une palette de solutions pour y parvenir. Les scientifiques dévoileront leurs résultats dans un rapport qui sera publié ce lundi 4 avril.

Les informations contenues dans ce rapport sont sous embargo jusqu’à lundi, mais son plan est déjà connu. « Le rapport comporte des chapitres sur les tendances et facteurs d’émissions de gaz à effet de serre, et identifie les trajectoires et les voies d’atténuation compatibles avec les objectifs fixés dans l’accord de Paris », résume auprès de Reporterre Franck Lecocq, chercheur à AgroParisTech et coordinateur du chapitre 4 intitulé « Trajectoires d’atténuation et de développement à court et moyen terme ».

« Nous mettons toutes les options sur la table »

Pour parvenir à réduire drastiquement nos émissions, les experts du Giec ont analysé un large panel de possibilités, en n’écartant pas certaines mesures contestées, comme le recours aux technologies de capture et de séquestration du carbone. « Nous ne sommes pas prescriptifs, nous mettons toutes les options sur la table, de manière à éclairer les choix des États », poursuit le scientifique, un « vétéran des rapports du Giec » auxquels il contribue depuis plus d’une quinzaine d’années.

L’efficacité de chacune des mesures a été soupesée, en fonction des résultats déjà obtenus dans certains pays du monde. Les chercheurs ont ainsi passé en revue les avantages et inconvénients de différents mix énergétiques, qu’ils penchent plutôt vers les énergies fossiles, le nucléaire, ou les énergies renouvelables. Ils se sont aussi intéressés à la structure de nos villes, et aux manières de les rendre plus sobres, aux possibilités qui s’offrent à nous pour gérer nos déchets. Ils ont dressé un état des lieux des pistes pour transformer le secteur du bâtiment et nos systèmes de transport.

Une exhaustivité du coût aux conséquences

Les chercheurs ont également étudié les pratiques de l’agriculture, la méthanisation et les usages des sols les plus performants pour atténuer les émissions du secteur. Ils ont jaugé l’importance de certains changements de modes de vie, comme la réduction de la consommation de viande. « À chaque fois, les scientifiques ont tenté de dégager le potentiel de ces options, leur coût, et leurs conséquences, sociales ou sur la biodiversité par exemple », dit à Reporterre Céline Guivarch, directrice de recherches à l’École des Ponts et co-autrice du chapitre 3 sur les « Trajectoires d’atténuation compatibles avec les objectifs de long-terme ».

Si le rapport promet d’être touffu, il ne comportera néanmoins « aucune surprise », prévient Céline Guivarch, qui rappelle que les experts du Giec « ne font pas de recherche supplémentaire, mais évaluent les informations scientifiques déjà disponibles pour établir l’état du consensus de la communauté scientifique, ainsi que les éléments encore incertains ». Il a donc pour mission d’« établir une expertise collective scientifique sur le changement climatique ».

« Plusieurs dizaines de milliers de commentaires »

Son élaboration a débuté en mai 2017. Sa rédaction a impliqué plus de 230 auteurs principaux, coordinateurs et éditeurs de toutes nationalités et de divers domaines. Sur cinq années de travail, au moins la moitié a été consacrée à des périodes de relecture et de vérification, le rapport étant ouvert aux commentaires de la communauté scientifique, « pour éviter les mauvaises interprétations, ou que des pans de la littérature soient oubliés », dit Franck Lecocq.

Les auteurs doivent répondre à chacun des commentaires, « en motivant leur choix de modification, ou non, du passage visé », dit Céline Guivarch, qui évoque un volume de « plusieurs dizaines de milliers de commentaires ». Le rapport est donc le fruit d’un processus « long et hyper collectif, par lequel nous essayons d’établir précisément l’état du consensus scientifique ». L’enjeu : « Que le rapport publié soit le plus robuste et inattaquable possible. »

© Stéphane Jungers/Reporterre

Ce document s’inscrit dans le cadre du sixième rapport d’évaluation du Giec, dont il est le troisième volet. Depuis sa création en 1988, cet organisme intergouvernemental publie tous les cinq ans à peu près des « rapports d’évaluation » (« Assessment Reports ») décrivant l’état des connaissances scientifiques sur le changement climatique. Les rapports d’évaluation sont composés de trois parties, publiées successivement. Pour ce cycle, la synthèse du groupe de travail n° 1, consacrée à l’état des connaissances scientifiques sur le climat, a été publiée le 9 août 2021. Celle du groupe de travail n° 2, publiée le lundi 28 février, porte sur les conséquences du changement climatique sur les sociétés humaines et les écosystèmes.

Les autrices et les auteurs espèrent que ce troisième volet suscitera plus d’écho médiatique et de réactions politiques que ses prédécesseurs, malgré le contexte d’élection présidentielle et la guerre en Ukraine. « Ce n’est pas évident, l’actualité est dense, mais la question du changement climatique ne peut de toute façon pas se résumer à une actualité ponctuelle, observe Céline Guivarch. Elle est permanente, dans tout ce que l’on regarde : les transports, l’énergie, l’alimentation, nos emplois, les inégalités… Ce rapport aura une durée de vie de plusieurs années, il sera un socle sur lequel les décideurs du monde entier pourront durablement s’appuyer. »

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