Face aux doutes, l’aspartame classé cancérogène possible

L'aspartame est présent dans de nombreux produits industriels. Par exemple, les coca-cola sans sucres ou light. - Pxhere/CC0 1.0
L'aspartame est présent dans de nombreux produits industriels. Par exemple, les coca-cola sans sucres ou light. - Pxhere/CC0 1.0
Coca-Cola en met dans ses sodas « sans sucres » et « light », Yoplait dans ses yaourts « Panier 0 % », Mentos dans ses chewing-gums « Pure Fresh sans sucres »… L’aspartame (ou E 951) est largement utilisé comme édulcorant en raison de son pouvoir sucrant environ 200 fois supérieur au saccharose. On en trouve jusque dans des médicaments, comme l’Efferalgan 500 mg orodispersible. Mais ce produit de synthèse fait l’objet de questionnements scientifiques. Le 14 juillet, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a décidé de classer l’aspartame comme « peut-être cancérogène pour l’homme ».
Le Circ — qui dépend de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) — juge qu’il existe une « indication limitée » de cancer chez l’homme (en particulier, pour le carcinome hépatocellulaire, qui est un type de cancer du foie) et chez l’animal. Autrement dit, le risque de cancer n’est aujourd’hui pas établi, mais le doute est suffisamment important pour que de nouvelles études soient menées. Selon Francesco Branca, directeur du département nutrition et sécurité sanitaire des aliments de l’OMS, « si la sécurité sanitaire ne constitue pas une préoccupation majeure compte tenu des doses couramment utilisées, des effets potentiels ont été décrits et doivent faire l’objet d’études plus nombreuses et plus approfondies ».
Dans le même temps, le comité mixte d’experts des additifs alimentaires de l’OMS a conclu que rien ne justifiait pour l’heure une modification de la dose journalière admissible, établie à 40 mg par kilogramme de poids corporel. Par exemple, avec une canette de boisson gazeuse light contenant 200 ou 300 mg d’aspartame, un adulte pesant 70 kg devrait consommer plus de 9 à 14 canettes par jour pour dépasser la dose journalière admissible, « en supposant aucun autre apport en aspartame provenant d’autres sources alimentaires », précise l’OMS.
Un risque accru de prise de poids
L’aspartame est par ailleurs en cours de réévaluation au sein de l’Efsa, autorité européenne de sécurité des aliments. Une réévaluation que l’association de consommateurs Foodwatch appelle de ses vœux. « En soulignant les risques possibles de cancer liés à l’aspartame et la nécessité de poursuivre les recherches, l’OMS a envoyé un signal clair sur les dangers de cet additif », réagit Camille Dorioz, responsable de campagnes de l’association dans un communiqué. La consommation d’édulcorants non sucrés pourrait être aussi associée à un risque accru de diabète de type 2, de maladie cardiovasculaire et de mortalité toutes causes confondues. Foodwatch demande que tout édulcorant ou additif alimentaire potentiellement dangereux pour la santé des consommateurs soit retiré du marché européen jusqu’à ce que son innocuité soit prouvée.
Foodwatch note que l’efficacité des édulcorants artificiels est également remise en cause par l’OMS. Dans une directive du 15 mai, l’OMS alertait : « L’utilisation des édulcorants sans sucre ne confère aucun avantage à long terme dans la réduction de la graisse corporelle chez les adultes ou les enfants. »
Une étude de l’Inrae publiée en 2019 suggère même que la prise d’un mélange d’acésulfame K-sucralose, mélange d’édulcorants largement répandu, pourrait conduire à une prise de poids. « Sans qu’on puisse expliquer pourquoi à ce stade, les phénomènes observés sont les mêmes que ceux qui surviennent au cours de la prise pondérale chez l’obèse », expliquaient alors les scientifiques. Selon l’OMS, le consommateur ne devrait pas avoir à choisir entre un soda avec du sucre et un soda avec des édulcorants. Foodwatch rapporte que Francesco Branca a estimé qu’« il devrait y avoir un troisième choix : l’eau ».