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La pollution dans le métro parisien est largement sous-évaluée, selon une étude

Depuis des années, la RATP affirme surveiller la pollution de l’air dans le métro au moyen d’un dispositif baptisé Squales. Mais une nouvelle étude, commanditée par l’association Respire et le syndicat autonome de la RATP et réalisée dans dix stations parisiennes, montre que les données de la RATP sont trompeuses. Les valeurs ne correspondent pas à la pollution réelle dans les stations, avec des écarts qui atteignent un facteur dix.

L’étude a été menée par Jean-Baptiste Renard, directeur de recherche au LPC2E-CNRS à Orléans, qui a développé un outil de haute précision baptisé LOAC. Cet instrument est installé depuis des années sur le ballon de Paris. Il mesure également la pollution dans trois stations de métro et a servi à la réalisation d’une campagne de mesures dans plusieurs autres stations entre le 24 septembre et le 2 décembre 2020.

D’après cette nouvelle étude, les données communiquées par la RATP pour la station Châtelet sont fausses : le capteur est encrassé et donne des valeurs surévaluées et incohérentes. La station Auber est exposée à une pollution très importante, très au-dessus des valeurs habituelles.

Selon l’étude, les capteurs de la RATP ne révéleraient pas non plus les pics très élevés, les « sursauts » qui peuvent atteindre 500 μg/m3 (soit dix fois le seuil d’un pic de pollution en extérieur) sur des durées courtes mais qui représentent une exposition majeure pour les usagers sur les quais.

Les données dans les autres stations montrent une grande diversité de situations : les valeurs vont de 20 à 100 μg/m3, soit une échelle de 1 à 5, sans corrélation avec les données du réseau Squales.

Les stations de RER semblent particulièrement polluées, peut-être parce que le freinage des rames de RER, plus lourdes, génère plus de particules à l’entrée en station, suggère l’étude.

Ce n’est pas la première fois que de tels écarts sont constatés. En septembre 2019, une étude de Respire avait déjà montré que la pollution de l’air à l’intérieur du métro était jusqu’à dix fois plus élevée qu’en surface. Si les référentiels de l’air extérieur étaient utilisés, de nombreuses stations seraient en pic de pollution permanent. De plus, la pollution dans les stations est essentiellement composée de particules ultrafines, qui pénètrent plus profondément à l’intérieur du corps humain, indique l’étude.

En conclusion, les capteurs actuels, « mal entretenus et peu performants, ne donnent pas une image réaliste de la situation de la pollution dans les stations. Par ailleurs, la diversité des situations est telle que les deux ou trois capteurs de la RATP, même s’ils fonctionnaient correctement, ne pourraient en aucun cas donner une image fidèle de la situation sur l’ensemble du réseau », critique l’association.

« Notre étude montre que la RATP ne fait pas les efforts nécessaires pour évaluer sérieusement la qualité de l’air à l’intérieur des enceintes, alors que les niveaux mesurés atteignent des seuils préoccupants. Mesurer la gravité du problème est la première étape pour pouvoir le résoudre. La RATP ne prend pas les mesures nécessaires pour protéger ses employés et ses utilisateurs », déclare Olivier Blond, directeur de Respire.

« Les agents de la RATP sont les plus exposés et rien n’a été mis en place par l’entreprise pour préserver leur intégrité physique comme le prévoit le code du travail alors même que la présidente et ses délégataires n’ignoraient pas le danger que nous encourions. Nous avons donc décidé de participer activement à cette étude afin de mettre un terme à ce scandale sanitaire. Nous n’oublions pas non plus les voyageurs qui eux aussi sont victimes de cette pollution », déclare Reda Benrerbia, secrétaire général de SAT-RATP.

L’association Respire exige qu’un véritable système de surveillance de la qualité de l’air soit mis en place et que ses données soient accessibles publiquement en permanence.

Quatre millions d’usagers et des dizaines de milliers de salariés utilisent quotidiennement les enceintes du métro parisien.

  • Source : Association Respire
  • Photo : Le capteur encrassé de la RATP au métro Châtelet. Association Respire

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