La sécheresse s’installe de nouveau en Californie

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Climat Monde Eau et rivièresL’état d’urgence est déclaré dans presque toute la Californie, en raison d’une sécheresse précoce et massive.
Au 5 mai, il y avait déjà, en Californie, l’État le plus peuplé des Etats-Unis, sept fois plus d’hectares brûlés par des incendies que l’année dernière à la même époque. Le gouverneur Gavin Newsom, a donc élargi le 10 mai, sa déclaration d’urgence pour cause de sécheresse à presque tout l’État en raison de pénuries aiguës d’eau dans le Nord et le Centre : 41 comtés sur 58, affectant 30 % de la population de 40 millions de Californiens.
Tout l’Ouest américain est en proie à une grande sécheresse, quelques années seulement après que la Californie soit sortie en 2017 d’une période de sécheresse pluriannuelle éprouvante. Le manque de pluie et la maigre production neigeuse de la Sierra Nevada explique en partie pourquoi le U.S. Drought Monitor, une analyse hydrologique hebdomadaire du gouvernement fédéral, indique que 93 % de la Californie connaît une sécheresse « grave », « extrême » ou « exceptionnelle ». Il y a un mois, seuls deux tiers environ de l’État étaient confrontés à ces conditions.
Les neiges fondent plus tôt sans remplir les réservoirs
Le manteau neigeux de la Sierra Nevada, qui fournit environ un tiers de l’eau de l’État, n’atteignait au 1er avril, que 59 % de sa moyenne habituelle, alors qu’il est normalement à son maximum à cette période. Ce sont les températures extraordinairement chaudes enregistrées en avril et début mai, inédites dans l’histoire de l’État, qui ont entraîné la fonte rapide des neiges vers les cours d’eau qui alimentent le fleuve Sacramento, lequel fournit une grande partie de l’approvisionnement en eau de l’État en été. Le problème a été aggravé par le fait qu’une grande partie de la neige s’est infiltrée dans le sol au lieu de couler dans les rivières et les réservoirs.
« Il faut voir les choses en face. Tout laisse penser que la saison des incendies va être très difficile cette année, en Californie et même dans une grande partie de l’Ouest des Etats-Unis », a dit à la chaîne CNN Daniel Swain, climatologue à l’université UCLA et à l’association The Nature Conservancy. « Une combinaison de facteurs - dont une sécheresse sévère à extrême à très court terme et le changement climatique à long terme - concourent à un risque exceptionnellement élevé pour la majorité des endroits potentiellement inflammables en Californie », explique M. Swain, « Il n’y a déjà pratiquement plus de neige dans les montagnes, et ce qui m’étonne, en tant que climatologue, c’est de voir la neige fondre, et de constater que les rivières, les lacs et les fleuves ne répondent pas. Le sol sous la neige est tellement sec et craquelé qu’il n’y a pas de ruissellement. C’est l’une des raisons pour lesquelles je pense que la plus forte augmentation du risque d’incendies violents sera probablement dans les forêts. La Sierra Nevada, les contreforts entourant la vallée centrale et les forêts côtières, y compris les séquoias, sont très menacés. »
Le manque d’eau affecte l’agriculture et les oiseaux migrateurs
L’aggravation rapide de la sécheresse a entraîné des réductions de plus en plus importantes des dotations en eau pour ceux qui dépendent du réseau complexe de barrages, de réservoirs et de canaux de la Californie. De nombreux agriculteurs de la vallée de Sacramento espéraient recevoir cette année une allocation de 5 % du projet de la vallée centrale du gouvernement fédéral. Mercredi 12 mai, le Bureau of Reclamation a suspendu cette maigre allocation, expliquant que la fonte des neiges ne contribuait pas suffisamment à alimenter les réservoirs.
Cette annonce a été une mauvaise nouvelle en particulier pour les riziculteurs de la vallée de Sacramento, qui produisent 97 % de la récolte de riz de l’État. Bien que de nombreux agriculteurs de la vallée aient des droits contractuels spéciaux qui leur permettraient d’augmenter leur approvisionnement en eau venant du Central Valley Project, tous les producteurs sont confrontés à une réduction minimale de 25 %, a déclaré Jim Morris, porte-parole de la California Rice Commission. Selon M. Morris, les agriculteurs prévoient de planter 400 000 acres de riz ce printemps, laissant environ 100 000 acres en jachère à cause du manque d’eau. Cette situation va déprimer les économies rurales de la vallée, où le taux de chômage est déjà entre 7,3 % et 15,4 %.
Cela nuira également à la voie migratoire du Pacifique, la route de migration de millions d’oies et d’autres oiseaux aquatiques qui dépendent des rizières pour se nourrir.
Les autorités craignent aussi que ce printemps extraordinairement sec n’annonce une nouvelle saison de feux de forêt, comme l’an dernier où les flammes ont brûlé une surface record de 16 996 km². Les incendies font désormais partie du mode de vie dans tous les États de l’Ouest. La question n’est plus de savoir s’il y en aura ou pas, mais quand, où et avec quelle intensité. La sécheresse et les incendies de 2020 ont été les plus graves de l’histoire de l’État.