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ReportageLuttes

Le collectif Dernière rénovation bloque les Champs-Élysées

Une vingtaine de militants de Dernière rénovation ont bloqué l’avenue des Champs-Élysées, jeudi 8 décembre. Résultat : ils ont subi l’agressivité des automobilistes et se sont fait embarquer par les forces de police.

Paris, reportage

En un clin d’œil, face à l’Arc de Triomphe, une vingtaine d’activistes du collectif Dernière rénovation se déploient au milieu de la circulation et déroulent leurs banderoles. Ce jeudi 8 décembre à Paris en milieu d’après-midi, les touristes, médusés, se pressent sur les trottoirs, téléphones en main, pour filmer la scène.

Un premier automobiliste est obligé de freiner. « Mais je dois passer, moi ! » hurle-t-il par la fenêtre de son véhicule. Un deuxième s’arrête, puis des dizaines d’autres, de chaque côté de la ligne d’activistes. En une poignée de secondes, la célèbre avenue est totalement bloquée. Les coups de Klaxon et les insultes pleuvent. Des motos tentent de passer dans les interstices, frôlant de leurs roues les militants. Des automobilistes descendent de leurs véhicules, poussent des militants, arrachent leurs banderoles. L’un d’eux traîne à terre sur plusieurs mètres un activiste, qui revient s’asseoir sur la chaussée. L’homme le rattrape, le traîne à nouveau. Impassible, l’activiste regagne sa place.

Dernière rénovation défend à la fois de justice climatique et de justice sociale. © NnoMan Cadoret / Reporterre

Pascal [*], l’un des porte-parole du groupe, ne cille pas face au déferlement d’agressivité. « Ça fait vingt ans que je m’inquiète pour le climat. Rien de concret ne se passe. Si je ne le fais pas, qui le fera ? » L’interview est vite interrompue par trois policiers qui l’attrapent sous les aisselles et le traînent sur le trottoir. En à peine dix minutes, deux fourgons de police sont arrivés. Les bloqueurs, qui ont tous reçu une formation à l’action non violente, se laissent dégager un à un sur les côtés par les forces de police, sans résister.


Ce même jour à Toulouse, tôt le matin, une dizaine d’activistes avait déjà bloqué le périphérique nord pendant une demi-heure. Depuis le début de leur mouvement en mars 2022, Dernière rénovation demande la « mise en place d’un grand plan de rénovation thermique des bâtiments capable de diviser par 4 ou 5 les émissions carbone du pays », écrivent-ils dans leur communiqué. Le secteur du bâtiment représente en effet « 44 % de l’énergie consommée en France, loin devant le secteur des transports », indique le ministère de la Transition énergétique lui-même.

« L’État doit prendre cela en charge »

Marie [*] est assise en tailleur sur le trottoir avec une dizaine de militants, obstinément silencieux face aux questions de la police. Derrière ses lunettes, cette habituée des actions de Dernière rénovation garde son calme et défend un bilan collectif : au fil des mois, « nous sommes toujours plus nombreux à entrer en résistance civile. C’est avant tout cela que l’on a gagné ».

Avec la hausse des prix de l’énergie, « beaucoup de gens ne peuvent pas payer leur logement », soutient Noémie, une passante qui observe, perplexe, les policiers encercler ces manifestants pacifiques. « Et puis, au-delà de la question économique, c’est un enjeu environnemental global. L’État doit prendre cela en charge, et pas juste faire des effets d’annonce ! »

© NnoMan Cadoret / Reporterre

Dernière rénovation défend ce double enjeu, à la fois de justice climatique et de justice sociale. « La mauvaise isolation des logements, avec la flambée des prix de l’énergie, implique nécessairement que de nombreux concitoyens ne vont pas pouvoir payer leurs factures d’énergie », soutiennent-ils dans leur communiqué.

Poursuites judiciaires

Encore une dizaine de minutes plus tard, tous les militants sont embarqués, un à un, dans les fourgons des forces de police. Lors de leur dernière action, menée jeudi 1er décembre, tous avaient également été emmenés en garde à vue. Plusieurs poursuites judiciaires ont déjà été engagées à la suite de ces gardes à vue.

Tous les militants ont été embarqués, un à un, dans les fourgons des forces de police. © NnoMan Cadoret / Reporterre

Un important procès impliquant dix activistes s’est tenu le 22 novembre : ces derniers sont poursuivis pour « entrave à la circulation », avec 500 euros d’amende requis. « Le délibéré sera rendu en janvier », indique à Reporterre Nicolas Turcev, porte-parole de Dernière rénovation. Le 9 janvier également, un autre procès aura lieu à Paris. D’autres audiences sont prévues au printemps.

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