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En brefGrands projets inutiles

Le projet de contournement est de Rouen abandonné par la métropole

C’est une belle victoire pour les opposants au projet de contournement est de Rouen. Lundi 8 février 2021 dans la soirée, après plus de cinq heures de débats, le conseil métropolitain a voté contre le financement de cette portion de 41,5 kilomètres à péage entre les autoroutes A 13 et A 28 — 76 voix pour l’abandon, 43 voix contre et 4 abstentions. La métropole s’était pourtant engagée, il y a plus de deux ans, à débloquer 66 millions d’euros sur un budget global de près de 900 millions d’euros. Ce revirement est un coup fatal porté au projet, car le préfet de Normandie, Pierre-André Durand, avait annoncé le 26 janvier à la presse que l’État — engagé à hauteur de 245 millions d’euros — « n’imposera pas cette infrastructure ».

Ce revirement a été rendu possible entre autres par le changement de bord de socialistes locaux. « Europe Écologie-Les Verts et La France insoumise ont toujours été contre ce projet. Le Parti communiste a été favorable à un ancien tracé avant de s’opposer au projet à partir des années 2000. Mais le maire de Le Grand-Quevilly et ancien président du conseil départemental de Seine-Maritime, Nicolas Rouly, et le maire de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, d’obédience socialiste et encore récemment favorables au projet, ont évolué à partir de 2019, explique à Reporterre Guillaume Grima, de l’association Effet de serre toi-même. Nicolas Mayer-Rossignol a ainsi officialisé son opposition au projet lors d’un débat entre les candidats aux élections municipales de 2020 organisé par notre association. »

Cette décision a été saluée par de nombreuses personnalités politiques et association écologistes normandes et nationales. « Abandon du contournement est de Rouen par la métropole : une victoire écologique ! Au nom de la responsabilité climatique et financière, il fallait avoir le courage d’abandonner ce projet, coûteux pour la planète et inefficace pour répondre aux besoins des Normand.es ! » s’est réjoui la porte-parole d’Europe Écologie-Les Verts Eva Sas sur Twitter.

« Les élu.es ont décidé de suspendre la participation du territoire à un projet anachronique dont les impacts sur l’air, l’eau (notamment des ressources stratégiques pour l’approvisionnement en eau potable des habitants de la métropole), les sols, les milieux naturels et les espèces sauvages, le rendaient écologiquement insoutenable, a écrit France Nature Environnement Normandie dans un communiqué transmis par courriel à Reporterre. FNE-Normandie se félicite de ce résultat. »

Des substituts au contournement ont même été évoqués lors du conseil métropolitain : la mise en place d’un péage pour les poids lourds au Pucheuil sur l’A28, l’interdiction des poids lourds au-dessus d’un certain gabarit dans l’intra-boulevard rive gauche et rive droite, la mise en place de plates-formes logistiques du dernier kilomètre et la mise en place d’un bus à haut niveau de service sur l’axe Rouen-Barentin sur l’A150. « Nous en sommes très satisfaits, se réjouit M. Grima. Le projet d’autoroute à péage n’améliorait pas la question des émissions de gaz à effet de serre et de la pollution atmosphérique, alors que la région Normandie est le premier émetteur de gaz à effet de serre de France et que toutes les études épidémiologiques depuis les années 2000 alertent sur le niveau de pollution aux particules fines à Rouen. Alors que ces alternatives, qui peuvent sembler plus complexes parce qu’elles reposent sur du report modal et des chaînes multimodales, sont plus prometteuses pour l’avenir climatique car elles s’attaquent aux émissions à la source. » L’associatif s’interroge néanmoins sur « la mise en opérationnalité, le portage démocratique et le budget » de ces alternatives, qui restent « flous ».

Le vote du conseil métropolitain met un point final à un projet vieux de cinquante ans. Il était apparu pour la première fois au schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) du territoire dès 1972. En 2017, après enquête publique, il était déclaré d’utilité publique par décret, alors que Nicolas Hulot était ministre de la Transition écologique et solidaire et malgré une importante mobilisation locale.

Reste à savoir ce que décideront les autres financeurs du projet. Le 14 janvier, le département de Seine-Maritime avait renouvelé son engagement à participer au financement du contournement à hauteur de 22 millions d’euros. La région Normandie donnera sa décision lundi 15 février.

  • Source : Reporterre
  • Photo : Dans les environs de Rouen, à l’automne 2016. © Barnabé Binctin/Reporterre

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