Limaces, Hulotscope, écriture inclusive… voici l’édito des lectrices et lecteurs

Durée de lecture : 14 minutes
Voici une sélection des nombreux courriels que nous recevons tous les jours. Réactions à des articles, coups de cœur, coups de gueule, témoignages, poèmes… cette tribune régulière vous est ouverte. Merci de nous lire et de réagir !
Si vous souhaitez participer au courrier des lecteurs, n’hésitez pas à nous envoyer un courriel à planete (arobase) reporterre.net, en spécifiant [courrier des lecteurs] dans l’objet. À bientôt !
Comment transformer les limaces en amies ?

Sur la photo, mon anti-limace en pleine gastronomie… Et tout le monde qui me répond : « Et ça marche ça... ?! — Bien-sûr, c’est radical, ce sont des gloutons obsédés par les limaces. »
Sylvain
L’écriture inclusive en débat à Reporterre
Lectrice assidue de votre journal, cette semaine, j’ai un peu tiqué quand j’ai réalisé que vos articles (peut-être pas tous !) respectaient cette bonne vieille règle grammaticale française du « masculin qui l’emporte sur le féminin », quand on trouve les deux genres dans la même phrase. L’écriture inclusive, qui consiste à remettre à égalité les genres dans notre langue, fait débat en France. Elle n’est pas obligatoire. Cependant, cela fait personnellement des années que je modifie lentement mais sûrement mon langage, écrit et oral, et que je pratique l’écriture inclusive, car c’est pour moi du bon sens. Surtout je ne supporte plus que les femmes soient encore mises de côté, de toutes les manières possibles. Ce mail, qui se veut sans prétention, est simplement une suggestion pour les auteur.e.s des articles de Reporterre à pratiquer l’écriture l’inclusive s’ils et elles le désirent, afin d’apporter plus de visibilité aux femmes, et d’égalité entre les genres.
Pauline
- Reporterre — Nous discutons régulièrement au sein de la rédaction de l’écriture inclusive et de la prise en compte des différents genres dans nos textes. Notre ligne, qui peut encore évoluer, est de respecter l’écriture inclusive dans la féminisation des noms de fonction et de métier (autrice ou auteure ; professeure et chercheuse). Nous pratiquons parfois aussi l’accord de proximité — par exemple « ces hommes et ces femmes sont lectrices de Reporterre » — et plus rarement, un accord de majorité — « trois hommes et cinq femmes sont venues dans nos bureaux ». C’est au sujet du point médian que la question se pose de la façon la plus aigüe, notamment du fait des implications d’édition qu’il entraîne. À son sujet, nous appliquons pour le moment la règle suivante : nous ne rectifions pas les contributions (tribunes, articles) qui nous parviennent avec le point médian.
Ils aiment tellement les abeilles qu’ils ne prennent pas leur miel

Apicultrice professionnelle, j’ai été choquée par certains passages de l’article. Non, « la manière la plus efficace de lutter contre les difficultés que rencontrent les abeilles » n’est pas de « les laisser trouver seules la réponse à ces nouveaux défis ». Non, la « principale cause de disparition des abeilles » n’est pas « la manière de pratiquer l’apiculture aujourd’hui ». L’immense majorité des apiculteurs ont beaucoup de mal à vivre la catastrophe qu’ils ont tous les jours sous les yeux, depuis l’apparition des néonicotinoïdes. Ils se battent au quotidien pour préserver leurs ruchers. Mais la lutte est tellement difficile que ce serait sympa de ne pas en plus nous savonner la planche !
Élisabeth
Pourquoi faut-il diminuer la vitesse sur les autoroutes ?
Question à Stéphane Chatelin : pourquoi ne pas réclamer la réduction de la vitesse en ville (45 ou 30 km/h) ? Certes, il semble que la vitesse y fasse moins de morts que sur les routes, mais elle produit de la pollution sonore, par les particules et pourrit la vie des piétons, des cyclistes et des riverains des rues très fréquentées. Y a-t-il des raisons objectives pour que cette revendication n’apparaisse jamais ?
Jean-Louis
- Reporterre — Certaines villes, à l’instar de Grenoble, ont en effet mis en place la limitation à 30 km/h, avec des effets positifs sur la baisse de la pollution et l’incitation aux modes de transport doux.
Énergies renouvelables : les prix baissent, l’avenir s’ouvre

Que les prix des énergies renouvelables baissent, c’est une bonne chose ! Le nucléaire n’a ainsi plus sa justification principale, puisqu’il est censé être moins cher : fermons donc les centrales plus vite, et aussi les centrales à charbon. Mais les éoliennes massives et les panneaux solaires sont dépendants du pétrole. Ils sont produits par la « société du pétrole » : pourra-t-on fabriquer des éoliennes sans pétrole ? L’avenir est au déclin de l’énergie disponible et au déclin des métaux… donc au déclin de la société industrielle « moderne ».
Roger
Le Hulotscope en débat

J’aime votre média et je le suis et le soutiens depuis maintenant trois ans. Mais depuis bientôt un an, je ne puis que constater avec quel acharnement vous semblez attaquer, jour après jour, l’action de M. Hulot à la tête du ministère de l’Environnement. Cela me paraît malheureusement symptomatique de nombreux écologistes qui préfèrent bien souvent utiliser leurs énergies respectives à se tirer dans les pattes plutôt que de regarder ensemble dans une direction essentiellement commune et largement opposée à celle d’une grande partie de la société. Je reconnais que l’action de M. Hulot ne semble pas aussi positive et efficace que l’on pourrait le souhaiter. Cependant, les arbitrages gouvernementaux sont une réalité à prendre en compte et M. Hulot semble être dans son rôle, aussi difficile soit-il. Et juger un homme politique sur un an de travail ne me semble pas très en accord avec la vision long-termiste que nécessite l’écologie.
Grégoire
Je n’ai guère de sympathie pour ce gouvernement mais je soutiens le courage de Nicolas Hulot qui se bat au quotidien contre des conflits d’intérêts monstrueux. À sa place, personne ne ferait mieux. Il est allé au charbon, alors soutenons-le plutôt que de l’enfoncer. Tout est affaire de négociation et de marchandage dans notre société malade et corrompue : chaque fois qu’il se bat pour avancer un pion, il doit sacrifier un autre pion. « Diviser pour mieux régner », c’est la stratégie des pouvoirs en place : ne tombons plus dans le piège et resserrons les rangs.
Aude
J’essaie de faire ma part, comme mon pote colibri. Et je pense que, justement, Nicolas Hulot fait assurément sa part, pour le moins ! D’où mon étonnement sur le titre à charge de votre article. « Bilan : négatif », précise même l’auteur. Vous précisez que 33 % des mesures ne dépendent pas directement de M. Hulot, alors pourquoi les intégrer dans le calcul ? Ou bien dans ce cas, intitulez votre outil le « Macronenvironnnementscope » ! Vous savez, mieux que personne, la politique néolibérale que mène ce gouvernement. Par conséquent, toutes les mesures qui s’apparentent à des contraintes pour un marché seront considérées comme des freins pour le business, et donc systématiquement combattues par tout un gouvernement et ses amis financiers. À commencer par l’actuel ministre de l’Agriculture qui lui, en revanche, n’a pas le droit à son « Travertoscope ».
On peut ne pas aimer Nicolas Hulot, l’homme ou ce qu’il représente de par son parcours. Mais on ne peut lui enlever ses convictions en matière d’environnement, sa réelle volonté de faire avancer les choses dans le sens d’un développement durable. Alors, pourquoi ne pas le soutenir et donc insister sur le positif et signifier que chaque avancée se fait au prix d’une âpre lutte. Ce type est comme un petit poisson-pilote entouré de squales, alors certes, il avale de nombreuses couleuvres… Mais ferions-nous mieux ? S’il part, qui à sa place ? Un squale ou une huître ?
M. Hulot est certes un colibri qui jette des petites gouttes d’eau sur l’incendie. Mais à la différence de cette fable qui voit tous les animaux fuir le feu, dans notre fable à nous, bien réelle finalement, des carnassiers l’alimentent, et au passage essaient de flinguer le gentil colibri ! Ça commence à faire beaucoup pour le petit piaf !! Bref, soyons solidaires dans ce monde imparfait et surtout : Hasta la verde revolucion, siempre !
François
- Reporterre — En tant que quotidien de l’écologie, Reporterre s’intéresse de près depuis un an aux politiques environnementales du gouvernement d’Édouard Philippe, portées et incarnées par Nicolas Hulot. D’après nous, l’urgence écologique impose un volontarisme politique, il est donc important de scruter attentivement les mesures mises en place, et de distinguer les discours des actes. C’est pour tenter d’objectiver le poids et la place de Nicolas Hulot — et donc des politiques environnementales sous la présidence d’Emmanuel Macron — que Reporterre a créé le Hulotscope. « Hulotscope » plutôt que « Macronscope », car en tant que ministre d’État, numéro 3 du gouvernement, il nous semble que M. Hulot peut être tenu pour responsable des politiques environnementales du gouvernement auquel il appartient. Ce « thermomètre » est surtout une grille de lecture, évolutive et perfectible : vos retours, suggestions et ajouts sont bienvenus ! Quant à l’analyse de l’action de M. Hulot, vous pourrez lire l’entretien avec le politologue Simon Persico. D’après le chercheur, « l’inaction de Hulot est d’autant plus visible et problématique que le reste du gouvernement paraît hyperactif. L’unique domaine qui mériterait vraiment d’être “disruptif”, d’agir de manière radicale et immédiate, si l’on en croit les scientifiques, c’est l’environnement. Et c’est l’un des seuls domaines pour lesquels l’exécutif considère qu’il ne faut pas faire de réforme radicale. »
À Notre-Dame-des-Landes, l’Acipa se saborde tristement

Nous sommes avec mon épouse membres de l’Acipa depuis de nombreuses années, bien qu’habitant dans le sud de Toulouse, où nous coulons une retraite heureuse et militante. Nous avons effectué plusieurs fois en bus et même à vélo le déplacement à Notre-Dame-des-Landes. N’ayant pas pu nous exprimer ni voter contre la dissolution de l’association, nous sommes très déçus des conditions de la consultation organisée. J’espère que cette dissolution ne signera pas l’abandon des projets des « zadistes » au profit des « légalistes » et que l’objectif de participer à un changement de paradigme sera maintenu malgré l’abandon du projet d’aéroport.
Christian
L’éolien est-il écologique ?

J’entends souvent parler de Reporterre à la radio, aussi ai-je fini par aller visiter votre site et lire quelques articles au sujet de mon sujet de prédilection : l’éolien. Je regrette le traitement que vous en faites, j’ai l’impression que vous n’y êtes pas favorable dès lors qu’il s’agit du sujet principal de votre article ou lorsqu’il n’est pas porté par des particuliers. Cela revient à critiquer la démarche intrinsèque de l’entreprise, de l’entrepreneur, comme s’il n’existait de démarche honnête que de la part du particulier. Des sociétés font de l’éolien pour de l’argent ? La belle affaire ! Je préfère voir quelqu’un faire une bonne action par intérêt plutôt que ne pas l’accomplir du tout. Et dans notre monde capitaliste si déplaisant, nous devrions aussi nous satisfaire de ces petits pas, car la planète n’est pas près de le voir s’effondrer pour l’ordre nouveau, associatif, solidaire, alternatif que vous appelez, à raison, de vos vœux. Qu’EDF fasse de gros projets parce que c’est ce qui rapporte le plus ? Tant mieux, c’est toujours moins d’argent investi dans les vieux pots du thermique et du nucléaire.
Bernard
Poème : « Gendarmes, cessez-le-feu ! »
Ce jour d’avril,
en approchant un champ de bataille
j’ai rencontré trois gendarmes
La peur dans six yeux
Qui peut détendre nos soldats intérieurs ?
Sur la route, un jeune homme m’a dit
Souhaiter une vie meilleure
Que nos vieux leaders admettent l’erreur
d’avoir trop été, nez à nez, avec l’horreur,
l’héritage déposé, cessez le feu.
Ensoleillés, vulnérables, yeux ridés,
Regardez de nouveau l’immense orée.Gabrielle
Polluant, coûteux, démodé, le Grand Prix de Formule 1 revient en France

Vous écrivez [il s’agit d’une tribune] « les Français, comme les autres Européens, réclament de plus en plus des politiques de modération de la circulation : limites de vitesse et restrictions de la place accordée à la voiture. Ce mouvement lent mais inéluctable a commencé dans les grandes villes, puis s’étend aux villes moyennes et petites […]. Les campagnes résistent encore fortement, comme le montre la fronde actuelle contre la limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes à deux voies. »
Je fais partie de ces « campagnards résistants », l’arrière garde, ceux qui viennent après les « milieux aisés » des centres-ville, la dernière roue du carrosse (si vous me permettez cette métaphore routière). Il me semble que les citadins soutiennent facilement les mesures coercitives qui ne les touchent pas, comme la limite de vitesse à 80 km/h.
J’habite à 30 km de mon lieu de travail, je parcours donc 60 km quotidiennement, en voiture. Je ne demanderais pas mieux que de faire ce trajet en transport en commun, en train, voire à vélo, seulement c’est impossible. La rue que j’habite a été rebaptisée il y a une cinquantaine d’années. Avant, c’était l’avenue de la Gare. Quand ils ont fermé la ligne de train, c’est devenu la rue Adrien-Philippe. La gare est toujours là, à 100 mètres du pas de ma porte. Elle a été vendue, aujourd’hui c’est la maison d’un particulier. Ici, les routes sont étroites, et les bas-côtés peu stabilisés : rouler en vélo sur ces axes est extrêmement dangereux — bien plus dangereux que de rouler à vélo dans Paris. Se faire doubler par un 44 tonnes alors que vous circulez à vélo vous transforme vite en cascadeur — sauf qu’il n’y a personne pour vous filmer. Tout ça pour vous expliquer que si, dans les « campagnes », tout le monde prend sa voiture, ce n’est pas par choix, mais bien parce qu’il n’y a pas d’alternative.
Arrêtons donc de critiquer les « campagnes », attelons-nous à des causes utiles, comme la promotion de la construction de pistes cyclables intercités, la réouverture de lignes de chemin de fer ou le développement des transports en commun.
Olivier
Halte au massacre des arbres d’alignement

Je viens d’un département, la Haute-Savoie, où la nature est très présente. Sa place dans ma vie est si importante que j’en ai fait mon métier, accompagnatrice en montagne. Tout ça pour dire que je suis bien plus proche de la nature que du bétonnage.
Dans votre article [qui est une tribune], on dénonce l’abattage de platanes magnifiques pour l’aménagement de trottoirs plus larges, pour piétons. Sur les photos, on distingue aussi de petits arbres qui un jour deviendront grands !
Je comprends qu’on défende ces arbres bicentenaires. Mais je me dis qu’avec la surpopulation actuelle d’homme et d’automobilistes, il me paraît normal de faire des aménagements de voirie qui semblent en faveur des piétons.
Cécile
Qu’il soit « éthique » ou de masse, le tourisme épuise le monde

J’ai beaucoup apprécié votre article sur le Manuel de l’anti-tourisme de Rodolphe Christin. J’ai eu envie de rebondir sur l’une des dernières citations de l’article : le tourisme « n’a pas fait progresser la paix entre les peuples, il n’a pas résolu les problèmes du monde. A-t-il seulement contribué à une meilleure compréhension interculturelle ? Pas sûr ». Peut-être a-t-il même bien plutôt entériné une fracture entre deux catégories, celle des « touristes » et celle des « vagabonds », comme le développe Zygmunt Bauman dans son ouvrage Le coût humain de la mondialisation. Les premiers peuvent circuler à leur guise, les frontières leur sont ouvertes ; les seconds sont contraints de quitter leur pays mais les frontières se ferment devant eux. Les premiers sont partout chez eux, les seconds n’ont nulle part où se poser. Pour ma part, je trouve fort gênant d’aller se promener dans les pays de ceux qui restent à la porte de chez nous.
Marjolaine