Élevage, trains, vaccins, climat… voici l’Édito des lecteurs

Durée de lecture : 14 minutes
Voici une sélection des nombreux courriels que nous recevons tous les jours. Réactions à des articles, coups de cœur, coups de gueule, témoignages, poèmes… cette tribune régulière vous est ouverte. Merci de nous lire et de réagir !
Si vous souhaitez participer au courrier des lecteurs, n’hésitez pas à nous envoyer un courriel à planete (arobase) reporterre.net, en spécifiant [courrier des lecteurs] dans l’objet. À bientôt !
En 2018, réveillons notre humanité !
Alors même que deux fous dirigeants font trembler le monde par leur bêtise ; alors même que les richesses de la vie animale et végétale s’amenuisent dans l’indifférence générale ; alors même que dans nos pays « riches » d’inhumanité, des migrants, fuyant les affres de la guerre, sont expulsés sans vergogne, sous prétexte que la misère n’est pas désirable ; alors même que l’intolérance suicidaire gagne sans bruit, chaque seconde, du terrain sur le rêve d’un futur désirable ; alors même que ces exemples sont des gouttes dans l’océan de la vie… mais que le temps presse… et que la vie passe…
Une question s’agite dans ma tête, envahit mon esprit et bouscule mon utopie. Sommes-nous encore humains ? Humains aveuglés sûrement. Désespérés devant l’immensité de la tâche. Certainement. Effrayés, peut-être… Mais, sont-ce des raisons suffisantes ? Il est tellement plus confortable de faire semblant, de continuer à construire sa vie en détournant le regard, de poursuivre dans les méandres du plaisir sans penser au futur. Pourtant, ce choix individuel et collectif a un prix. Vivre l’instant présent n’a jamais justifié et ne justifiera jamais de détruire l’avenir.
Cette confusion tenace entre plaisir et bonheur nous consume à petit feu. Car non, l’accumulation de plaisirs n’a jamais conduit et ne conduira jamais sur le chemin du bonheur.
Le choix, nous l’avons. Ayons le courage de nous poser collectivement la question du bonheur. Elle seule nous relie tous. Sommes-nous heureux ? Sommes-nous heureux de contribuer au maintien de cette société de compétition qui valorise la loi du plus fort, de cette société d’inégalités qui tolère la famine et l’asservissement ?
Qu’avons-nous à perdre ? Si rien n’évolue, l’issue est connue. Essayer ne présente aucun risque, au contraire. Osons même si la finalité est incertaine. Être en accord avec soi-même, relié à la nature et aux autres, défendre son idéal sont les seuls chemins qui conduisent au bonheur.
Laissons notre intelligence collective prendre le pouvoir. Si nous sommes en mesure de créer des armes de destruction massive, nous sommes également en capacité d’imaginer les conditions d’une vie durable, équitable.
Nous avons bien plus de pouvoir que nous ne pouvons l’imaginer et peut-être que nous voulons bien nous l’avouer… Car oui, c’est une véritable responsabilité.
Une chose me rassure. Je n’ai aucun doute. Nous aimons, vous aimez la vie. Nous l’aimons parfois mal mais nous l’aimons. Alors : Osons — Soyons — Essayons — Rêvons — Réveillons notre humanité !
Florient, squatteur éphémère de la planète
Une bonne année s’annonce à Saint-Jean-de-Braye (Loiret)
Bonne année à tous et toutes ! Nous profitons de ces vœux pour vous informer de la suite de notre lutte pour sauvegarder 16 hectares de terres d’une zone commerciale « village Decathlon » à l’est d’Orléans : toujours pas l’ombre d’une pelleteuse !
Le maire a beau avoir annoncé dans la presse que « le projet était toujours d’actualité, et que Decathlon travaillait avec le préfet sur la zone humide », les services préfectoraux nous affirment le contraire.
Mieux, la cour administrative d’appel de Nantes vient de nous prévenir que la société Les Pins de BBA, la société foncière de Decathlon, s’est même retirée de l’appel qu’elle avait engagé contre la décision de la Commission nationale de l’aménagement commerciale en notre faveur de juin 2016. C’est donc une très bonne nouvelle mais nous restons vigilants.
Ci-dessous, le géant Youpiterre, qu’une amie artiste nous a aidés à confectionner. Il porte haut nos espoirs d’un monde en respect avec notre état de nature, où nous cessons les violences. Terrien, les pieds sur terre et la tête dans les étoiles.
Sophie, pour le Collectif pour un site préservé entre Loire et forêt

Le Cévenol : la SNCF s’acharne contre un train vital

On ne voit pas assez les conséquences de ces « désertions » de lignes [comme celle du Cévenol, dont Reporterre a parlé ici]. Il y a quelques années, mon conjoint, chirurgien hospitalier, a renoncé à un poste à l’hôpital de Millau avec, parmi les motifs, la desserte catastrophique de la ville par le train. En cascade, un poste non pourvu peut entraîner le départ d’autres praticiens dont la charge de travail (et le nombre de gardes) devient insupportable. Et l’absence ou la mauvaise couverture d’une spécialité médicale importante peut déstabiliser un hôpital.
Marie-Christiane
- Reporterre — La semaine passée, nous avons publié cinq articles sur ces « lignes menacées » partout en France :
Parole d’éleveur sur l’absurdité du modèle agricole
Alors, il dit quoi ton toubib ?
— Il m’a dit que, si je continuais à boire deux litres de vin par jour, je courais droit vers la cirrhose, que j’allais ruiner ma santé et mon portefeuille !
— Balivernes, tous des vendus, ces toubibs. C’est bien connu, ils sont à la solde des labos pharmaceutiques !
— Tu crois ? Et pourtant je sens bien que…
— Que nenni, des conneries te dis-je, ton voisin Pierre, il boit trois litres par jour et Jean Bat au moins quatre litres et tu vois bien qu’ils pètent la forme, allons, allons, ne te laisse pas prendre au jeu de ton toubib, ce n’est juste qu’un bon à rien, je te mets combien de bouteilles ce mois-ci ? »
Tel est le dialogue entre un marchand de vin et un client. Bien évidemment le comportement du marchand de vin est irresponsable, mais il pense d’abord à son chiffre d’affaires plutôt qu’à la santé de son client. Cette histoire, qui n’est que pure invention ne vous rappelle-t-elle pas quelque chose ? Si vous remplacez l’alcool par les impayés, les dettes aux fournisseurs, les emprunts bancaires… Toujours rien ? Oui, cette histoire est un transposé de l’état général de l’agriculture d’aujourd’hui.
Franchement, il n’y a pas une profession qui soit plus accompagnée que le métier de paysan. Autour du paysan nous trouvons une armée de conseillers en tout genre, le comptable, le contrôle laitier, les banques, les groupes d’échanges, les conseillers de chambres d’agriculture, les conseillers en gestion, les conseillers techniques des coopératives, les fiscalistes. Tout cela pour faire en sorte que les paysans produisent toujours plus. Tout ça pour arriver à ce que le paysan n’arrive même plus à dégager un revenu pour lui, il crève de faim dans sa ferme après avoir produit des centaines de milliers de litres de lait, des centaines de kilos de viande, et parfois des légumes et des céréales. Par contre, tous ceux qui gravitent autour de lui se portent plutôt bien. De crise agricole en crise agricole, tout ce système continue, on dégage du paysan, on agrandit les fermes de plus en plus, mais tous ceux qui sont en relation directe avec le paysan, eux, continuent à prendre leur « louchée » au passage… Cette logique peut-elle durer ?
Pierrick Berthou, producteur de lait bio à Quimperlé
Abaisser la vitesse de circulation sur les routes permet de moins polluer

Très énervé par le moralement correct à propos de la limitation de vitesse à 80 km.
Très énervé surtout que Reporterre relaye en approuvant sans réserve aucune.
Avez-vous roulé en région hors des autoroutes ?
Je suis très loin d’être un bolide. Plus souvent qu’à mon tour, je peste contre des chauffards. Je n’ai plus de voiture depuis longtemps : nous louons un véhicule ou nous en faisons prêter pour la virée estivale dans des coins de France tranquilles et ruraux. Nos dos nous commandent d’utiliser l’autoroute au départ de Paris sur une distance plus longue qu’autrefois. Mais dès que nous le pouvons, nous en sortons pour découvrir des paysages, être surpris par des lieux, trouver des coins pour pique-niquer… et il y parfois des routes, des départementales toutes droites sur de grandes distances, sans platane ( snif !) , et des routes un peu moins droites mais dont les virages sont bien conçus. Et si on aime musarder, regarder le paysage, il y a parfois des kilomètres à parcourir, du temps à rattraper, quand on a dû rouler prudemment sur des portions qui ne permettaient pas de rouler bien vite, ou encombrées par une caravane, un camion, un tracteur.
Continuer à applaudir ces limitations agrandit le fossé entre urbains et ruraux. Abaissons la vitesse à 80 (et jusqu’où ?) et préparons la voie aux véhicules automatiques !
Antoine
- Reporterre — En 2014, le Réseau action climat (RAC) expliquait, étude à l’appui, qu’une « réduction de 10 km/h seulement permettrait d’éviter les émissions de quatre millions de tonnes de CO2 par an et une économie sensible de carburant, de l’ordre de 10 à 15 %, soit près d’un litre aux cent kilomètres, ou cent à deux cents euros par an. C’est un levier indéniable pour permettre aux automobilistes de faire des économies significatives et pour soulager notre facture énergétique. » Ceci dit, l’évolution de nos modes de transports ne doit pas reposer sur la seule initiative (ou sanction) individuelle : les pouvoirs publics pourraient aussi plancher sur une fiscalité écologique (type écotaxe), financer les modes de transport dits « doux », sanctionner les industriels qui ne respectent pas les normes antipollution, ou ne pas autoriser les projets autoroutiers destructeurs pour l’environnement, comme à Strasbourg.
En cinq jours, j’ai réduit mon empreinte écologique

Suite à l’article de Juliette Duclos, j’ai calculé mon empreinte à partir du site du WWF qui était en lien. Il ne faudrait que 1,28 planète si l’ensemble de la population mondiale avait la même empreinte que moi. Je suis « meilleur que Juliette », mais c’est encore trop. Alors, j’ai demandé au WWF, ce que je pourrais faire. Résultat : acheter plus de bio pour me nourrir ; mais encore faudrait-il que je ne sois pas obligé de faire 40 km en voiture pour acheter ce bio dans ma région ! Changer mon chauffage à gaz : mais dans un immeuble en copropriété vieux de 60 ans, c’est impossible. Remplacer ma voiture à essence par une voiture électrique : mais si tout le monde en fait autant, nous ne sommes pas près d’arrêter les centrales nucléaires et les personnes qui se tuent pour nous fournir les matériaux nécessaires aux batteries vont mourir encore plus vite. Utiliser les transports en commun : mais c’est impossible. Dans ma petite ville, je fais tout à pied, et pour les longs trajets que j’effectue deux fois par an, il n’y a pas de transports en commun vraiment pratiques. Bref, si l’on s’en tient à une politique individuelle et responsable, on n’est pas sorti de l’auberge !
Quand on sait qu’un seul porte-conteneur chinois qui nous apporte des gadgets pourris et des tee-shirts éthiquement douteux pollue plus que 50 millions de voitures, il serait plus intéressant de lancer une campagne de boycott des produits lointains que de mettre des brise-jets sur nos robinets et des bouteilles plastiques dans nos chasses d’eau ! Mais le plus efficace serait encore de militer pour sortir de cette société marchande qui induit mécaniquement tout ce que les écologistes dénoncent désespérément.
Jean-François
- Reporterre — Nous partageons votre point de vue : les initiatives individuelles sont essentielles mais ne se suffisent pas. La crise écologique exige des changements systémiques et des réponses politiques globales.
Vaccins et aluminium : ce danger que l’État refuse de voir

Je sais que c’est à la mode en ce moment de tirer sur l’ambulance vaccinale mais encore faut-il le faire de manière vraiment argumentée. Or, [dans l’article de Reporterre] comme pour pas mal d’articles sortant sur la question, les mêmes problèmes subsistent :
- la plupart des travaux sur la myofasciite à macrophages proviennent de l’équipe d’Henri-Mondor. Qu’est-ce que cela veut dire ? Les autres virologues à travers le monde seraient-ils donc tous nuls ? Ou vendus à l’industrie pharmaceutique ?
Je vous souffle une idée alternative : et si la myofasciite à macrophages n’existait pas vraiment ? Maladie à l’étiologie floue et mal définie, elle semble n’exister qu’en France et surtout dans les travaux de Gherardi. D’ailleurs, plusieurs papiers étrangers mettent en doute son existence. Je ne nie pas que les malades souffrent mais le lien entre leurs troubles et la vaccination n’existe pas ailleurs que dans les travaux de l’équipe française. - Cela fait près de 20 ans que Gherardi & co travaillent sur cette question. Vous pensez vraiment que s’il y avait un vrai problème d’adjuvant aluminique dans les vaccins, d’autres ne l’auraient pas également mis au jour ? Gherardi n’est pas l’« Irène Frachon » des vaccins. Pour une simple raison : à partir du moment où la pneumologue a soulevé le lièvre de l’utilisation détournée du médiator, d’autres chercheurs ont très vite corroboré ses résultats. Là, nada.
Hervé Ratel, journaliste scientifique
- Fabrice Nicolino — D’après vous, l’équipe Gherardi serait isolée. C’est vrai (même si c’est de moins en moins vrai). Seulement, est-ce bien un argument scientifique ? Je crois me souvenir que la connaissance scientifique avance de curieuse manière, et bien souvent par des phénomènes de rupture par rapport aux cadres explicatifs habituels. Cela ne prouve aucunement que Gherardi a raison, mais cela démontre en tout cas que votre argument n’est pas recevable. La science, depuis deux siècles, n’aura cessé de s’accrocher à des conceptions anciennes avant de capituler devant l’irruption de découvertes et de nouveaux paradigmes.
Il n’y est évidemment pas question d’un quelconque complot. Tout au long de mon enquête en trois volets (les deuxième et troisième volets sont également en ligne), j’ai pris soin de montrer ce qu’un esprit scientifique fait quand il cherche. Posément, prudemment, sans se laisser détourner dès lors que les résultats sont là. Or l’ennui est que les résultats, qui sont loin d’être définitifs, sont là.
Les fantasmes d’une aviation écologiquement responsable

[Ce lecteur réagit au diagramme ci-dessus, publié dans notre article sur le mirage de l’aviation verte]. Comme souvent, le train est présenté comme le champion toutes catégories de l’écologie. C’est faux. Une locomotive diesel consomme entre 3 et 4 fois plus de pétrole qu’un avion moyen-courrier pour une vitesse 8 fois inférieure. Que dire de la traction électrique, qui est la meilleure amie des centrales nucléaires ?
Et n’oublions pas que l’entretien des voies ferroviaires n’a d’égal que l’entretien des parcours de golf : il empoisonne la terre et les nappes phréatiques.
Et le pire des moyens de transport collectif est la voiture, qui rejette huit fois plus qu’un moyen-courrier et 46 fois plus qu’un long-courrier (en passager par kilomètre, bien sûr).
Je suis en revanche totalement d’accord avec la solution qui consisterait à diminuer les déplacements.
Jean
- Reporterre — La question de la quantification des émissions est très délicate. Prend-on en compte seulement les émissions de CO2 ? Prend-on en compte les autres sources de pollution (destruction de l’environnement liée aux aéroports ou à la construction des voies ferroviaires ou des autoroutes) ? Sur quelle durée s’appuie-t-on ? Le diagramme auquel vous faites référence provient des données officielles des autorités autrichiennes et prend en compte les taux d’occupation moyens des différents modes de transport. L’Agence de l’environnement autrichienne utilise un facteur de 2,7 pour refléter l’impact des autres émissions (hors de CO2) de gaz à effet de serre.
Poème : ode aux éleveurs
À la suite notamment du documentaire de Cash Investigation et à ma découverte de la réalité des travailleurs laitiers, j’ai composé un poème…
éleveurs inconnus
morts pour nourrir la population
éleveurs inconnus
à qui on a mis la corde au cou
éleveurs inconnus
qui ont fait ce métier par passion
éleveurs inconnus
sur les abattoirs du libre coûtle ministère est là
après qu’on bloque des périfs
pour dir’ qu’il nous comprend
ça on attend toujours la suitecompétitivité
le maître mot des financiers
compétitivité
laitiers qui saignent sans vacances
compétitivité
pour les huissiers des nourriciers
compétitivité
des bains de champagne en croissanceméfiez-vous de la souffrance
la souffrance mène au soufre
du nord au sud de la France
éleveurs au bord du gouffreJulien