Opposants à l’enfouissement des déchets nucléaires, nous sommes toutes et tous des malfaiteurs !

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Libertés Déchets nucléairesAlors que le procès pour « association de malfaiteurs » des opposants à l’enfouissement des déchets nucléaires à Bure se tiendra début juin, les signataires de cette tribune témoignent leur soutien et leur solidarité. Pour elles et eux, ce procès doit être celui de l’impasse atomique, ainsi que le moment de défendre les modes d’organisation collective alternatifs qui ont éclot dans la lutte.
En juin, cela fera quatre années que les portes des opposant.e.s au projet Cigéo d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure ont volé en éclat sous les coups de boutoir d’une instruction pour « association de malfaiteurs ». Vingt domiciles perquisitionnés, dix militants et militantes interdits de se voir pendant deux ans et demi, 100 téléphones placés sous écoute, seize années cumulées de communications enregistrées, des balises posées sous des voitures, un escadron de gendarmes mobiles harcelant les habitants et habitantes au quotidien… Cette scandaleuse traque d’État a tenté de paralyser ce mouvement de lutte vieux de 30 ans contre le plus gros projet industriel européen, dont les risques sont connus.
Les 1ᵉʳ, 2 et 3 juin se tiendra le procès des inculpé.e.s « malfaiteurs » de Bure. Nous, universitaires, artistes, autrices, journalistes, syndicalistes, éditeurs, auteurs de bande dessinées, activistes, avocat.e.s, scientifiques, élu.e.s, ami.e.s, affirmons notre profonde solidarité.
Bure nous concerne toutes et tous parce que c’est un des laboratoires de la généralisation de l’autoritarisme en France — depuis les quartiers populaires jusqu’aux luttes écologistes en passant par les gilets jaunes. Le 1ᵉʳ juin sera le procès de l’autoritarisme et de « l’association de malfaiteurs », dispositif pénal hérité des lois scélérates et de l’antiterrorisme qui dote les autorités de moyens de surveillance colossaux pour paralyser toute forme d’organisation collective.

Bure nous concerne toutes et tous, parce que le projet Cigéo est indispensable à la relance de la filière nucléaire française. Cette industrie est à un moment charnière et joue son va-tout pour obtenir la construction de six nouveaux EPR, alors que les vieilles centrales rafistolées sont plus dangereuses que jamais, que ses coûts explosent, que les déchets débordent. Le 1ᵉʳ juin sera le procès de l’énergie nucléaire, qui se prétend meilleure alliée du climat mais s’impose depuis des décennies dans un déni total de démocratie et verrouille toute transformation profonde de nos systèmes énergétiques.
Bure nous concerne toutes et tous, parce que c’est un territoire emblématique de toute la résilience et la résistance qu’il nous faut conjuguer pour fabriquer dès maintenant des mondes désirables sans attendre un hypothétique « monde d’après ». À Bure, il n’y a pas eu besoin d’attendre la pandémie de Covid-19 : la catastrophe agro-industrielle et écologique menace de transformer la région en désert social. Le 1ᵉʳ juin sera le procès d’un système capitaliste et productiviste de plus en plus irrespirable qui sacrifie les vies et les territoires au nom du profit. Bure nous concerne toutes et tous, parce qu’en dépit de la répression énorme, cette lutte où se mêlent plusieurs générations est l’un des foyers vitaux où s’allient des manières d’habiter un territoire contre une industrie mortifère, de reprendre en main nos conditions d’existence et d’inventer des relations libérées des rapports de domination. La lutte pour des vies dignes et heureuses se joue aussi, singulièrement, à Bure.

Si lutter à Bure de multiples manières équivaut à faire partie d’une « association de malfaiteurs », si se sentir touché.e.s par ce qui se joue au sein de ce territoire en lutte est suspect, alors : nous sommes toutes et tous des malfaiteurs !
Nous sommes solidaires des sept prévenu.e.s de Bure et nous en demandons la relaxe. Nous demandons l’abandon du projet Cigéo.
Cette tribune paraît simultanément sur Reporterre, Bastamag, Mediapart, Politis, Lundi Matin, Terrestres, Contretemps et Libération. Elle est toujours ouverte aux signatures de personnalités en signant ici, et/ou en envoyant un mail à l’adresse [email protected] en précisant [Prénom Nom Fonction] dans l’objet du mail.
LES 100 PREMIER.E.S SIGNATAIRES :
Corinne Morel-Darleux, écrivaine et conseillère régionale
Geneviève Azam, économiste
Pablo Servigne, auteur et chercheur in-Terre-dépendant
Alain Damasio, écrivain
Eric Beynel, syndicaliste
Jérôme Baschet, historien
Isabelle Frémeaux, activiste et artiste
John Jordan, activiste et artiste
Christophe Bonneuil, historien
Miguel Benasayag, philosophe
David Dufresne, journaliste
Étienne Davodeau, auteur de bande dessinée
Maxime Combes, économiste
Camille Louis, philosophe et dramaturge
Sezin Topçu, chercheuse
Yves Cochet, ancien ministre de l’environnement
Alessandro Pignocchi, auteur de BD
Thierry Bonnamour et Xavier Fromont, porte-paroles Confédération Paysanne Auvergne - Rhône-Alpes
Elie Lambert, secrétaire national Union syndicale Solidaires
Julie Ferrua, secrétaire nationale Union syndicale Solidaires
Rémy Toulouse, éditeur
Jean-Marc Rochette, auteur de bande-dessinée et peintre
Nathalie Quintane, écrivain
François Jarrige, historien
David Cormand, député européen EELV
Marie Toussaint, députée européenne EELV
Julien Bayou, secrétaire national d’EELV
Sandra Regol, secrétaire nationale adjointe d’EELV
Alain Coulombel, porte-parole d’EELV
Jean-Luc Mélenchon, député LFI
Mathilde Panot, députée LFI
Christine Poupin, porte-parole du NPA
Franck Gaudichaud, historien
Odile Hélier, anthropologue
Antoine Back, adjoint au Maire de Grenoble
Dominique Bourg, philosophe
Ludivine Bantigny, historienne
Fanny Madeline, historienne
Jean Gadrey, économiste
Frank Barat, journaliste
Michel Kokoreff, professeur des universités
Alexis Zimmer, enseignant - Chercheur
Josep Rafanell i Orra, psychologue, écrivain
Florent Massot, éditeur
Johan Badour, éditeur
Sophie Gosselin, philosophe
Serge Quadruppani, écrivain et traducteur
Alèssi Dell’Umbria, auteur-réalisateur
Yves Frémion, ancien député européen
Laure Noualhat, réalisatrice et auteure
Catherine Zambon, autrice
David Gé Bartoli, philosophe
Xavier Mathieu, comédien
Camille de Toledo, auteur
Christian Mahieux, syndicaliste
François Cusset, écrivain
Francine Bavay, conseillère régionale honoraire
Paul Poulain, spécialiste des risques et des impacts industriels
Gauthier Chapelle, chercheur in-Terre-dépendant
Aurélien Gabriel Cohen, doctorant et membre de la revue Terrestres
Emmanuel Lepage, auteur de bandes dessinées
Camille Besombes, épidémiologiste
Sara Aguiton, sociologue
Jean-Marc Salmon, chercheur en sciences sociales
François Chesnais, économiste
Benoit Rougelot, architecte du vivant
Florence Cerbaï, conseillère régionale
Tancrède Ramonet, réalisateur et chanteur
Pierre Khalfa, Fondation Copernic
Emilie Hache, philosophe, MCF Univ. Paris Nanterre
Christiane Vollaire, philosophe
Odile Hélier, anthropologue
Leyla Dakhli, historienne
Marie-Pierre Vieu, journaliste et editrice
Alessandro Stella, directeur de recherche au CNRS
Emmanuel Dockès, professeur de droit, université Lyon 2
Michèle Riot-Sarcey, historienne
Bertrand Berche, universitaire
Isabelle Krzywkowski, universitaire, syndicaliste
Fabrice Flipo, professeur
Marnix Dressen-Vagne, enseignant-chercheur émérite
Laurent Jeanpierre, politiste
Alice Canabate, sociologue, vice-présidente de la Fondation d’Ecologie politiqueGeorges Menahem, directeur de recherche au CNRS
Jean-Marie Harribey, économiste
Bruno Alonso, chercheur CNRS
Mathilde Larrère, historienne
Jacques Testard, biologiste
Helène Gaudy, écrivaine
Pacôme Delva, physicien
Fabrice Capizzano, écrivain
Stéphane Trouille, réalisateur
Yannis Youlountas, réalisateur
Gwen de Bonneval, auteur de bande dessinée
Gilles Kuntz, ancien adjoint à Grenoble
Frédéric Boone, chercheur
Jean Rochard, producteur de musique
Françoise Boireaud, animatrice d’un espace culturel
Corinne Iehl, sociologue
Gilles Martinet, géographe
Luc Chelly, auteur
Olivier Royer, conseiller fédéral EELV