Pollution : Paris voudrait limiter la vitesse à 50 km/h sur le périph

La vitesse maximale de circulation sur le périphérique parisien pourrait être baissée de 20 km/h fin 2024. - Chabe01 / CC BY-SA 4.0 / Wikimedia Commons
La vitesse maximale de circulation sur le périphérique parisien pourrait être baissée de 20 km/h fin 2024. - Chabe01 / CC BY-SA 4.0 / Wikimedia Commons
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Pollutions TransportsPour réduire la pollution, la Ville de Paris veut limiter la vitesse à 50 km/h sur le périphérique. Mais pas sûr que la mesure suffise à assainir l’air de ses riverains, particulièrement exposés.
C’est une ceinture grise qui étouffe la capitale. Construit il y a cinquante ans, le boulevard périphérique constitue « la principale source de danger sanitaire dans la région parisienne », selon Frédéric Leonhardt, de l’association Respire. Particules fines, dioxyde d’azote, bruit. Pour y remédier, la Ville de Paris a sa solution : abaisser la vitesse maximale de 70 à 50 kilomètres par heure dès fin 2024, avec la mise en place d’une voie dédiée au covoiturage et aux transports collectifs [1].
Il s’agissait d’une des promesses de la candidate Hidalgo, lors des élections municipales : transformer la rocade polluée en « boulevard urbain » apaisé et verdoyant. Les Jeux Olympiques sont venus donner un coup d’accélérateur : la capitale s’est en effet engagée à mettre en place des « voies réservées » pour les athlètes et le personnel. Dès fin 2024, ces sections devraient être dédiées au covoiturage et aux transports collectifs. Avec, dans le même temps, une réduction des limites de vitesse.
1,5 million de déplacements par jour
Sur le papier, les effets attendus sont enthousiasmants : « Améliorer la qualité de l’air, diminuer les nuisances sonores, résorber la congestion automobile. » En 2022, David Belliard, l’élu en charge des mobilités, espérait retirer ainsi « 80 000 véhicules de la circulation ». Aujourd’hui, 1,5 millions de déplacements sont comptabilisés chaque jour sur le boulevard.
Le projet de la ville est soumis à consultation publique jusqu’au 28 mai. Sur le site dédié, les avis négatifs bouchonnent. Certains dénoncent « une mesure idéologique, inefficace », d’autres pointent une « fausse écologie ».
« Plus il y a de bouchons, plus il y a de pollution »
Limiter la vitesse à 50 km/h, bonne idée ou fausse solution ? Pas si simple de répondre selon Antoine Trouche, ingénieur à Airparif. « L’abaissement de la vitesse a un impact sur la pollution de l’air, mais il est indirect et difficile à mesurer, dit-il. La mesure a un effet si la réduction de la vitesse permet de diminuer les embouteillages — plus il y a des bouchons, plus il y a de pollution — et si ça décourage les automobilistes de prendre la voiture. »
En 2014, la limitation de la vitesse à 70 km/h sur le périph avait permis une réduction d’un tiers des embouteillages. D’après l’Ademe, la majorité des études montre un effet « plutôt positif » de l’abaissement de la vitesse — de 130 km/h à 110 km/h ou de 90-80 km/h à 80/70 km/h — sur les émissions et les concentrations de polluants. En revanche, les résultats étaient « plus contrastés » sur les voies urbaines — abaissement de 50 km/h à 30 km/h.

Autre problème, soulevé par Frédéric Leonhardt, cette proposition de boulevard urbain pourrait bien être hors sujet : « Pourquoi pas favoriser le covoiturage et réduire la vitesse, mais ce n’est pas la priorité, demande-t-il. L’urgence, c’est de stopper l’urbanisation aux abords du périph. » Près de 40 000 personnes respirent un air trop pollué, parce qu’elles habitent trop près du boulevard — sans compter les écoles adossées à la rocade.
« Limiter les vitesses ne changera pas le fond du problème, les personnes qui vivent à côté vont continuer de souffrir, même si on a quelques dizaines de milliers de véhicules en moins », tranche l’écologiste. Il craint également un effet pervers : « Tout ce discours et ces politiques visant à “réhabiliter” le périph vont de pair avec une volonté des autorités d’urbaniser encore et toujours sur le périph, ce qui est un non-sens total. »
Appétits immobiliers
Autrement dit, il ne faudrait pas que les 50 km/h soient l’arbre qui cache la forêt immobilière. En quête de terrains à bâtir, la Ville de Paris lorgne en effet sur les abords du boulevard. Porte de Montreuil, un vaste projet mêlant réhabilitation et construction est ainsi vivement contesté.
L’association Respire demande donc l’interdiction de tout nouveau bâtiment accueillant du public à proximité du périphérique, et une relocalisation loin de cette voie polluante d’un certain nombre de lieux sensibles, en particulier les écoles. Pas sûr que cette proposition soit reprise par Anne Hidalgo, qui devrait trancher cet été, après la fin de la consultation publique, sur l’avenir du boulevard parisien.