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TribuneÉconomie

Pour un boycott des produits brésiliens qui détruisent l’Amazonie

La dévastation de l’Amazonie se fait au nom des intérêts de l’agrobusiness brésilien, expliquent les auteurs de cette tribune. Qui lancent un appel au boycott des produits de cette industrie pour défendre la forêt, bien commun des populations autochtones et de toute l’humanité.

Le collectif citoyen Gilets verts a été créé en novembre 2018. Il est animé par des acteurs de la transition et des professionnels de l’animation sociale et de l’éducation populaire qui agissent sur leur territoire.


Notre planète est dans une situation écologique dramatique. Depuis 1992, les forêts tropicales ont perdu des centaines de millers de km², la faune sauvage a chuté de près d’un tiers, les pollutions industrielles s’étendent partout, les émissions de gaz à effet de serre et les températures battent des records.
 
En dépit de ces réalités alarmantes, le plan du président brésilien, Jair Bolsonaro, de son gouvernement et de ses partenaires industriels et lobbyistes est simple : accroître toujours plus l’exploitation industrielle des terres pour satisfaire leur pouvoir et leur enrichissement. Pour cela, ils n’hésitent pas à perpétuer la dévastation de la plus grande forêt pluviale au monde et à appliquer une politique d’intimidation et de terreur à l’endroit des populations amérindiennes et de tous ceux et celles qui s’y opposent. 
 
Nous considérons la forêt primaire d’Amazonie et les écosystèmes fragiles brésiliens comme un bien commun des populations autochtones et, au-delà, comme un bien commun de toute l’humanité. En absorbant de 25 à 30 % du dioxyde de carbone que les activités humaines rejettent dans l’atmosphère, les forêts, et a fortiori la plus grande d’entre elles, jouent un rôle de régulateur climatique à la surface de la Terre. Alors que la communauté scientifique ne cesse d’alerter sur les risques d’emballement climatique planétaire, le ravage des forêts tropicales est un acte criminel pour le vivant et suicidaire pour l’humanité elle-même. 
 

Le boycott est une arme éminemment politique, un moyen de pression dont disposent les citoyens 

Nous entendons aussi répondre à l’appel lancé à l’opinion internationale par la Coordination des peuples indigènes du Brésil. Sa présidente, Sônia Guajajara, déclarait en avril 2019 : « Nous demandons aux consommateurs de boycotter les produits issus de l’agrobusiness brésilien, jusqu’à ce que le gouvernement prenne en considération la question des démarcations de terre et des violences contre les indigènes. Car nous voulons la paix et nos peuples veulent vivre enfin une vie juste et digne. » Face aux peuples indigènes, le président Bolsonaro n’a jamais caché le racisme qui le hante. Ainsi il déclarait en 2015 : « Les Indiens ne parlent pas notre langue, ils n’ont pas d’argent, ils n’ont pas de culture. Ce sont des peuples autochtones. Comment ont-ils réussi à obtenir 13 % du territoire national ? » (Campo Grande News, 22 avril 2015).  
 

Les nouvelles zones accordées aux lobbies agroalimentaire et biotechnologique pour la production de viande et de soja et aux concessions minières ne sont pas les seules responsables des incendies et de la déforestation au Brésil et dans d’autres régions de l’Amérique du sud. Ces atteintes à l’environnement sont aussi en partie le fait de paysans pauvres qui n’ont souvent d’autre choix que de recourir aux pratiques du brûlis pour vivre ou survivre de leur travail. C’est pourquoi notre action est aussi guidée par la mise en cause des logiques économiques libérales et des effroyables inégalités sociales qu’elles génèrent. 
 
En 1955, le refus de l’Afro-Américaine Rosa Parks de céder sa place de bus à un passager blanc comme elle était tenue de le faire selon la législation en vigueur à l’époque, déclencha le boycott des bus de sa ville de Montgomery, en Alabama. Ce boycott aboutit à la décision de la Cour suprême de mettre fin à cette pratique de ségrégation raciale. Le boycott est une arme éminemment politique, un moyen de pression dont disposent les citoyens pour exprimer les valeurs et les aspirations qui les animent et renverser un rapport de force. Avec le boycott, le citoyen n’a pas à attendre qu’une future et hypothétique décision soit prise par un parlement ou un gouvernement, son action le place lui-même comme acteur de la décision politique. Boycotter c’est pour le citoyen dire non tout de suite.
 

En conséquence, nous boycottons et appelons à un boycott massif et immédiat de l’ensemble des produits commercialisés par les entreprises qui soutiennent la politique écocidaire du gouvernement de Jair Bolsonaro. 
 

Le code-barre des produits fabriqués au Brésil commence par 7.89 ou 7.90

Notre action ne cible pas le peuple brésilien mais les acteurs politiques, économiques et financiers. Nombre de banques, de compagnies et d’investisseurs étrangers, notamment européens et nord-américains participent indirectement à la destruction de l’environnement et à la violation des droits des peuples. Les acteurs du commerce équitable et les entreprises brésiliennes qui répondent à des standards rigoureux dans le respect des droits humains et de l’environnement ne sont pas concernés par notre action. Nous les assurons au contraire de notre soutien.
 
Concrètement : le code-barre des produits fabriqués au Brésil commence par 7.89 ou 7.90. Nous invitons chacun à s’informer sur la provenance de la viande, notamment bovine et de volailles, des plats cuisinés à base de viande et sur la provenance de l’alimentation des animaux. Selon la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), 91 % de la surface aujourd’hui détruite de forêt amazonienne l’est pour libérer de l’espace nécessaire au pâturage ou à la production de soja qui sera exportée pour nourrir le bétail dans différentes parties du monde. Il s’agit aussi de s’informer sur la provenance du soja, du maïs, des fruits et des jus de fruits, du café, du cacao, du sucre de canne, des cosmétiques, du bois et des meubles. D’une façon générale, nous incitons les citoyens à éviter les achats dans les enseignes de la grande distribution et à privilégier les produits de l’agriculture biologique en circuit court et les produits du commerce équitable dans les réseaux de distribution associatifs.
 
Le collectif Gilets verts organise un rassemblement pour l’Amazonie devant l’ambassade du Brésil, à Paris, mardi 3 septembre à 18 h 30. Notre collectif invite les citoyens et les organisations à exprimer notre détermination commune à défendre les droits humains, le respect du vivant et la lutte contre le dérèglement climatique et à faire barrage à la prédation et à la marchandisation du monde.

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