Strasbourg : ils mazoutent des portraits de Macron, « saboteur du climat »

Action des décrocheurs de portraits d'Emmanuel Macron mercredi 19 janvier à Strasbourg. - ANV-COP21 Bouches-du-Rhône
Action des décrocheurs de portraits d'Emmanuel Macron mercredi 19 janvier à Strasbourg. - ANV-COP21 Bouches-du-Rhône
Ce mercredi 19 janvier, Emmanuel Macron présentait sa feuille de route de la présidence de l’Union européenne devant les eurodéputés, à Strasbourg. Pour l’occasion, une quarantaine de militants ont recouvert de fioul des portraits du président près du Parlement européen. Ils ont dénoncé son bilan écologique « catastrophique ».
Strasbourg, correspondance
Des portraits, du fioul, et un baril en guise d’accusation. Sur un parking situé à 300 mètres à vol d’oiseau du Parlement européen, vingt-quatre militants d’Action non-violente COP21, Greenpeace et des Amis de la Terre ont brandi à bout de bras et en silence des cadres contenant la photo officielle d’Emmanuel Macron, mercredi 19 janvier au matin. L’action s’est déroulée alors que le chef de l’État devait s’exprimer devant le Parlement européen en fin de matinée et dérouler la feuille de route de la présidence française du Conseil de l’Union européenne.
Les portraits avaient été prélevés par les militants dans les mairies dans le cadre de l’opération « Décrochons Macron ». Lancée en 2019 par Action non-violente COP21 (ANV COP21), cette campagne de décrochage, qui laisse un mur vide à la place de la photo officielle, vise à dénoncer l’absence de politique sérieuse de lutte contre le réchauffement climatique de la part du gouvernement français.

Dans le froid strasbourgeois, une partie des 151 portraits récupérés à l’occasion de cette opération regardait une poignée de militants remplir de mazout un baril portant l’inscription « Macron Guilty » — « Macron coupable », avant d’y plonger des cadres. « Pour symboliser un président Macron englué dans les modèles du passé, dans une vision périmée du monde, nous avons choisi de mazouter son portrait », a déclaré Zoé Mary, porte-parole d’ANV COP21.
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« Il ne manquera pas de se présenter à nouveau comme un champion de la Terre. C’est absolument inacceptable, réagit la militante. Nous sommes venus faire le véritable bilan d’Emmanuel Macron. Le bilan de quelqu’un qui est coupable de sabotage climatique. Il fait partie des coupables de l’aggravation du dérèglement climatique et il n’est plus possible de le laisser agir. »
Le bilan sur la transition énergétique du gouvernement est « catastrophique » a poursuivi Pauline Boyer, de Greenpeace, « que ce soit en termes de retard dans le développement des énergies renouvelables, d’abandon des promesses de sortie du charbon d’ici la fin du quinquennat, ou de la division par deux du nombre de passoires énergétiques en France. Aucune véritable politique de sensibilisation à la sobriété énergétique, au questionnement de l’usage que nous faisons de l’énergie et de son développement n’a été posée », a-t-elle regretté.
La porte-parole de l’ONG a ensuite critiqué le lobbying français dans l’élaboration de la taxonomie européenne, visant à distinguer les énergies polluantes des renouvelables. Cette classification permettra dans un second temps de flécher les investissements financiers dans le développement d’énergies propres. Or, « depuis quelques mois, la France a pris la tête d’un lobby en s’alliant avec des pays progaz pour inclure le gaz fossile et le nucléaire dans cette taxonomie, a dénoncé Pauline Boyer. Assimiler ces énergies polluantes aux énergies qui permettraient une vraie transition reviendrait à détourner de l’argent qui devrait être au contraire utilisé pour sortir des énergies fossiles. […] Emmanuel Macron ne sauve pas le climat, il prend l’Europe en otage pour sauver le nucléaire. »
« Le gouvernement soutient les projets de Total en Ouganda »
Frédéric Amiel, porte-parole des Amis de la Terre, était le dernier à prendre le micro. Derrière la multiplication des participations à des sommets internationaux et des prises de parole en faveur du climat, le chef de l’État a « continué à soutenir, avec tous les moyens de la diplomatie française — les projets de Total en Ouganda par exemple — ou ceux de grands pipelines traversant l’Afrique. Il a surtout refusé de s’engager sur la fin des énergies fossiles. »

Tandis que la prise de parole se poursuivait, les portraits ont été noircis un à un dans le baril. À 10 h 15, un groupe de CRS a lancé une première sommation pour mettre fin à cette « manifestation illégale ». Les activistes ont quitté les lieux escortés par les forces de l’ordre. Les portraits, eux, ont été abandonnés sur le bitume.
Quelques heures plus tard, une fois le discours prononcé — M. Macron a qualifié le « défi climatique » de premier défi du siècle — Greenpeace a confirmé par communiqué ses craintes du matin. L’ONG a évoqué « une liste à la Prévert de différentes mesures, sans en développer ni la cohérence, ni la portée ». Elle a, notamment, dénoncé les annonces sur la protection des océans alors que le président « soutient le développement de l’exploitation minière en eaux profondes ». Quant à l’énergie, « le Président a pudiquement évité le sujet dans son discours ».