Un charivari festif pour défendre les terres agricoles de Pertuis

À Pertuis, dans le Vaucluse, le 14 mai 2022. - © Sébastien Aublanc / Reporterre
À Pertuis, dans le Vaucluse, le 14 mai 2022. - © Sébastien Aublanc / Reporterre
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Étalement urbain Grands projets inutiles LuttesLes défenseurs des terres fertiles de Pertuis, dans le Vaucluse, ont manifesté le 14 mai contre la bétonisation de 86 hectares. Leur « zone à patates » est la cible de l’extension d’une zone d’activités, dont l’entreprise du maire de la ville compte bien bénéficier.
Pertuis (Vaucluse), reportage
14 heures, samedi 14 mai, 600 personnes venues de plusieurs départements voisins ont répondu à l’appel. L’annonce sur les tracts avait de quoi faire rêver les personnes sensibles à la cause : « Le parcours se fera en partie dans la zone d’activité et à travers les terres menacées : chars, costumes, fanfares… Bref, un carnaval joyeux, revendicatif et déterminé ! »
« On est là pour lutter contre l’extension infinie de la bétonisation des terres fertiles. Notamment ici pour sauver 86 hectares de terres fertiles. » C’est par ces mots que commence la conférence de presse qui réunit entre autres les Soulèvements de la terre, Pertuis terre vives, les habitants de la « Zap » (Zone à patates), la Confédération paysanne, SOS Durance Vivante… Depuis plus d’un an, des actions sont menées pour lutter contre le doublement de surface de la zone d’activité, voulu par le maire, Roger Pellenc, également fondateur de la plus grosse entreprise de la ville, et première entreprise à désirer se développer sur ces futurs sols artificialisés.

Le cortège a suivi comme prévu le déroulé déclaré, mais celui-ci a été interdit par arrêté municipal. Charles [*], membre de l’organisation du parcours, nous explique : « La manifestation a été déclarée, conformément à la loi, à la police municipale le 10 mai, mais interdite par arrêté municipal le 11 pour des raisons invoquées de sécurité : passage par la rocade de Pertuis et par l’axe principal de la zone commerciale, jugés trop dangereux. Nous avons donc proposé un second parcours le 12 mai, évitant la rocade et au mieux l’axe principal, mais un second arrête a réaffirmé cette interdiction. Ceci est de la mauvaise volonté et un abus de pouvoir du maire, nous avons donc engagé un référé liberté la veille au tribunal compétent », soit le tribunal administratif de Nîmes.
« Le seigneur de Pertuis crée lui-même la révolte qui gronde contre lui »
La fin du parcours de la manifestation passait devant un entrepôt de l’entreprise Pellenc, où une dizaine de machines agricoles servant à vendanger étaient stationnées. C’est alors qu’une action surprise d’une vingtaine de manifestants s’est produite : ils sont entrés dans le dépôt, des tags « À bas la bourgeoisie, ZAP partout » ont recouvert le slogan publicitaire de l’entreprise « De la vigne, à la cave, Pellenc ».

Un porte-parole des Soulèvements de la terre déclarait en début de manifestation : « La violence légitime répond à la violence institutionnelle. Il y a différents point de vue parmi nous sur ce sujet et cela s’appelle la diversité des tactiques. » Celia [*], une manifestante, nous répondait à ce sujet : « La première violence est celle de Roger Pellenc : il veut bétonner ces terres alors que nous sommes en pleine crise alimentaire à cause de la guerre en Ukraine, il a fait démolir en toute illégalité une maison de la Zap remplie d’amiante, il a interdit les deux parcours de manifestation déclarés. Le seigneur de Pertuis crée lui-même la révolte qui gronde contre lui. La question du stationnement ostensible de ces engins en bordure de parcours déclaré se pose évidemment ! »
La journée s’est terminée à la Zap avec concert, pizzas partagées, producteurs locaux, débat en direct sur la radio locale, Radio Zinzine. Une militante est alors montée sur une table : « Nous sommes victimes d’acharnement policier : en fin de manifestation, un camarade épuisé était en train d’uriner au bord de la route, un camion de gendarme s’est arrêté et l’a embarqué. » Un regroupement devant la gendarmerie de Pertuis s’en est suivi, mais les gendarmes ont signifié que la personne avait été transférée ailleurs. La brigade de Pertuis, contactée par Reporterre, devait nous rappeler pour communiquer sur un bilan de la journée, mais elle ne l’a pas fait à l’heure actuelle.

L’action pour défendre les terres de la « zone à patates » se déroulait dans le cadre des Soulèvements de la Terre. Ceux-ci se renouvelleront à La Clusaz (Haute-Savoie) les 25-26 juin contre les retenues collinaires, et à Saint-Colomban (Loire-Atlantique) le 3 juillet, contre l’extension d’une carrière de sable Lafarge.
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