Les ZFE pénalisent les « plus fragiles », critique le Sénat

La commission sénatoriale appelle à accélérer le verdissement du parc automobile en renforçant les aides au profit des ménages modestes. - © NnoMan Cadoret / Reporterre
La commission sénatoriale appelle à accélérer le verdissement du parc automobile en renforçant les aides au profit des ménages modestes. - © NnoMan Cadoret / Reporterre
« En l’état actuel des choses, la mise en œuvre des ZFE risque fort de laisser sur le bord de la route de nombreux usagers, à commencer par les plus fragiles et les plus éloignés des cœurs de ville. » Dans un rapport publié le 14 juin, la Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat émet plusieurs critiques à l’encontre de la mise en place des zones à faibles émissions dans les métropoles de plus de 150 000 habitants.
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Les sénateurs notent que partout où elles sont instituées, les ZFE se heurtent à « des crispations et de vives incompréhensions ». La consultation publique lancée par la mission a permis de collecter plus de 51 000 témoignages. Les remontées de terrain font apparaître différents écueils : un accompagnement insuffisant de la part de l’État, des véhicules propres financièrement inaccessibles, une offre de transports alternatifs à la voiture trop modeste...
Les ZFE, une « triple peine » pour les précaires
La commission estime que si les ZFE sont un outil pertinent pour réduire la pollution atmosphérique, elles ne sauraient « devenir l’"alpha et l’oméga" de l’amélioration de la qualité de l’air ». Déployées de manière hétérogène — chaque agglomération fixant son propre calendrier — elles complexifient les déplacements pour les usagers. « Certaines régions devraient ainsi compter six ZFE d’ici à 2025, ce qui pourrait nuire à la lisibilité du dispositif et rendre difficilement supportables les déplacements quotidiens de nombreux particuliers ou professionnels », estime la commission. Elle plaide pour une mise en œuvre concertée à l’échelle régionale.
Autre difficulté : nombre de ménages ont dû se résoudre, en raison de la hausse des prix de l’immobilier, à résider hors des agglomérations, dans des zones qui ne sont pas ou peu dotées de transports collectifs. « Leur interdire l’accès au centre-ville lorsqu’ils souhaitent s’y rendre pour travailler ou pour leurs loisirs pourrait ainsi s’apparenter à une "triple peine" » prévient le rapporteur.
Un calendrier « impossible à tenir »
Pour sortir de l’impasse, la commission appelle à accélérer le verdissement du parc automobile en renforçant les aides au profit des ménages modestes et à provoquer un « choc d’offre » de transports alternatifs à l’autosolisme. Et en attendant que ces solutions alternatives soient disponibles et suffisantes, elle juge indispensable d’assouplir le calendrier de mise en œuvre des ZFE, estimant l’actuel comme « impossible à tenir ». « Interdire de la circulation des plus grandes métropoles plus d’un tiers des véhicules qui les traversent quotidiennement, et qui plus est les véhicules les plus anciens, dans un délai d’un an et demi, risque inévitablement de creuser des fractures sociales et territoriales déjà importantes. »