En Loire-Atlantique, paysans et militants s’opposent au maraîchage industriel

Lundi 21 juin au matin devant les carrières de sable GSM et Lafarge, au sud de Nantes. - © Héloïse Leussier/Reporterre
Lundi 21 juin au matin devant les carrières de sable GSM et Lafarge, au sud de Nantes. - © Héloïse Leussier/Reporterre
Durée de lecture : 4 minutes
Luttes AgricultureAprès une fin de semaine de rencontres, de discussions et de festivités, une centaine de militants se sont réunis devant les entrées d’une carrière de sable et d’une plateforme de distribution de légumes issus du maraîchage industriel, au sud de Nantes, lundi 21 juin au matin.
Saint-Colomban (Loire-Atlantique)
Au sud de Nantes, les carrières de sable GSM et Lafarge ainsi que la plateforme de distribution de produits du maraîchage industriel Océane sont restées à l’arrêt lundi 21 juin au matin. Face au risque de blocage, leurs responsables ont préféré ne pas ouvrir : plusieurs centaines de personnes s’étaient réunies autour d’une ferme voisine, à Saint-Colomban, entre le 19 et 21 juin, pour un weekend de mobilisation. Après Besançon, Rennes et Puy-en-Velay, il s’agissait de la quatrième série d’actions menées dans le cadre des Soulèvements de la Terre, un appel parti de la Zad de Notre-Dame-des-Landes en janvier, et soutenu par de nombreuses organisations écologistes et paysannes.

Après deux jours de rencontres, de discussions et de festivités, lundi à l’aube, une centaine de militants ont crapahuté discrètement à travers champs pour se rendre à l’entrée de la carrière de sable de l’entreprise Lafarge, à Saint-Colomban, commune de 3 000 habitants. Ici, les entreprises Lafarge et GSM projettent de s’agrandir sur 70 hectares, dès 2022, sur des terres aujourd’hui classées « espaces agricoles pérennes » dans le Scot (schéma de cohérence territoriale). Elles voudraient puiser dans un gisement de sable pas encore exploité, une activité polluante qui détériore la nappe phréatique, pour continuer d’alimenter les chantiers de la région et le maraîchage industriel.
« Ils spéculent sur les terres et à cause de cela, il y a de moins en moins d’élevage et de bocage »
Parvenus à l’entrée de la carrière, les militants ont trouvé un site fermé, protégé par des gendarmes. Certains manifestants avaient prévu des bouées pour se jeter dans les piscines de la carrière ; elles sont finalement restées hors de l’eau. Après avoir déployé des banderoles, les activistes ont rebroussé chemin pour rejoindre leurs camarades paysans à une dizaine de kilomètres de là, devant la coopérative maraîchère Océane. Cette plateforme logistique distribue des légumes frais emballés, principalement de la mâche, des concombres et des tomates, produits par des maraîchers industriels. Une quarantaine de tracteurs s’étaient postés sur place au petit matin, dans une ambiance joyeuse et revendicative.

« Ces maraîchers industriels rongent le territoire pour faire des cultures sur sable. Ils utilisent 30 % du sable qui sort des carrières voisines », regrette Bruno Gris, du Groupement des agriculteurs biologiques de Loire-Atlantique (GAB 44), signataire de l’appel des Soulèvements de la Terre, de même que la Confédération paysanne France. « Ils spéculent sur les terres et à cause de cela, il y a de moins en moins d’élevage et de bocage par ici », dit Yoann Eon, éleveur laitier. « Ils achètent des terres avec des offres défiant toute concurrence, donc les jeunes ne peuvent plus s’installer », dit Christian, du collectif La Tête dans le sable. Ce collectif a été créé par des citoyens de Saint-Colomban, il y a un peu moins d’un an, pour s’opposer à l’extension des carrières. Ils dénoncent également l’effet du maraîchage industriel sur la qualité écologique de l’eau.
« C’est toute l’hypocrisie du capitalisme et du libre-échange »
Des représentants de la CGT, de l’Union locale Sud Loire et de Solidaires 44 étaient aussi présents au rassemblement, notamment pour dénoncer les conditions de travail dans les entreprises des maraîchers industriels. « Ils ont recours à des salariés étrangers exploités », dit Ronan Lherbier, de la CGT. « Les conditions de travail dans ces entreprises sont vraiment opaques. C’est toute l’hypocrisie du capitalisme et du libre-échange », ajoute Pascal Fremont, de Solidaires 44. « Pourtant, il existe des alternatives à ces productions. Les citoyens ont le droit d’être au courant. »

De même, dans le domaine de la construction, il existe des substituts au sable, dont « le gisement n’est pas inépuisable », rappelle Christian, de La Tête dans le sable. C’est d’ailleurs pourquoi des ateliers autour de l’écoconstruction ont été organisés durant ce weekend de mobilisation. Le maire de Saint-Colomban sera-t-il sensible à ces revendications ? Il faut son autorisation pour que les carrières s’agrandissent, car en l’état, elles n’en ont pas le droit avant 2033.

Après cette matinée de mobilisation, les militants se sont réunis au campement pour déjeuner, puis ils ont plié bagage. Nombre d’entre eux prévoyaient de se rendre aux festivités militantes organisées à Nantes pour la fête de la musique. Dans quelques jours, ils seront également nombreux à prendre la direction d’Île-de-France, où doit se dérouler la prochaine série d’actions des Soulèvements de la Terre, à partir du 29 juin, pour s’opposer au projet de tunnel du Grand Paris Express.