En excès, la viande est décidément mauvaise pour la santé

Pour le diabète de type 2, 100 grammes de viande rouge supplémentaire par jour augmente les risques de 17 %. - Rawpixel/CC0/Jakub Kapusnak
Pour le diabète de type 2, 100 grammes de viande rouge supplémentaire par jour augmente les risques de 17 %. - Rawpixel/CC0/Jakub Kapusnak
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SantéUne très large étude confirme que la viande transformée et la viande rouge – dont le porc – augmentent les risques de maladies cardiovasculaires et de diabète de type 2.
Maladies cardiovasculaires, obésité, diabète de type 2, maladie inflammatoire de l’intestin ou encore maladie respiratoire obstructive chronique. La liste des risques liés à la consommation de viande rouge et de viande transformée sur la santé publique est longue, selon une étude publiée le 22 décembre dans The British Journal of Nutrition. Et encore, l’équipe chinoise de l’université du Sichuan, autrice de l’étude, a décidé de ne pas s’intéresser aux cancers, pour lesquels le niveau de preuves scientifiques est déjà élevé. En 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) a en effet établi les effets cancérigènes de ces deux catégories de viande pour les humains.
Cette nouvelle étude dite « parapluie » a pris en compte largement la littérature scientifique sur les effets sanitaires de la viande et a retenu quarante méta-analyses publiées jusqu’en février dernier. « L’étude parapluie fait partie des études fournissant les plus hauts niveaux de preuve scientifique, sachant que les méta-analyses compilent déjà les données de plusieurs études, ici principalement observationnelles », souligne Benjamin Allès, épidémiologiste de la nutrition à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae).
Des risques augmentés
Outre la liste des pathologies, les résultats publiés précisent l’augmentation des risques associée à des rations de viande en excès. Pour le diabète de type 2 par exemple, 100 grammes de viande rouge supplémentaire par jour augmente les risques de 17 %, et 50 grammes de viande transformée augmente ce risque de 37 %. Pour les maladies coronariennes, ces mêmes rations quotidiennes augmentent les risques respectivement de 15 % pour la viande rouge et de 25 % pour la viande transformée. Concernant deux autres maladies cardiovasculaires — les risques d’hypertension et les attaques cérébrales — l’augmentation des risques se situe entre 10 à 15 %, pour les deux catégories de viande.

Dans les études nutritionnelles, le porc appartient à la famille de la viande rouge. Et la viande transformée compte toutes les viandes préparées, des nuggets de poulet au jambon cuit. « Des précisions importantes, car certaines personnes sous-estiment leur consommation de charcuterie par exemple en se déclarant flexitariens alors qu’ils consomment du jambon deux fois par jour, raconte Benjamin Allès, qui travaille sur Nutrinet, une large étude française qui identifie les facteurs de risque liés à la nutrition. Attention, le problème n’est pas de manger de la viande mais d’en manger trop, c’est-à-dire au-delà des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). »
Depuis 2015, l’organisation onusienne recommande une consommation hebdomadaire maximum de 500 grammes de viande rouge et de 150 grammes de charcuterie. Selon la dernière étude de l’Anses de 2017, les Français ont une consommation moyenne hebdomadaire de viande rouge proche des recommandations, mais celle de la charcuterie atteint les 200 g par semaine. Si la consommation de viande rouge baisse globalement, celles de charcuterie ou de viande transformée augmentent.
Vérifier les conflits d’intérêts
L’étude explique aussi les raisons physiologiques de ces effets délétères sur la santé. En cause, les graisses saturées et le cholestérol qui se déposent dans les artères et bouchent les vaisseaux pour les maladies cardio-vasculaires, ou encore les sel, sodium et nitrites qui augmentent la pression artérielle. La présence de fer héminique dans la viande rouge est aussi responsable de réactions en chaîne au niveau de la cellule, qui provoquent en particulier des dommages dans les tissus du pancréas. Ce qui a des effets sur l’apparition de diabète de type 2.
Pour cette maladie chronique, d’autres mécanismes sont identifiés : les graisses saturées, les nitrites, voire les perturbateurs endocriniens contenus dans les emballages, augmentent les risques de résistance à l’insuline. « De plus en plus de travaux permettent de comprendre ce qui se passe au niveau physiologique, ce qui contribue à augmenter le niveau de preuves. D’ailleurs, les recommandations de l’OMS sont basées sur les données provenant de nombreuses études sur les facteurs de risque de cancers. Les nouvelles connaissances sur les autres effets sanitaires pourraient contribuer à abaisser encore les seuils de futures recommandations », remarque Benjamin Allès.
Le chercheur souligne également le travail rigoureux de cette étude sur les biais : « L’équipe de recherche a en particulier pris soin de vérifier si les auteurs et autrices des études n’avaient pas déclaré les sources de financement, et donc de potentiels conflits d’intérêts. Un vrai enjeu, car des études sont financées par des acteurs industriels agroalimentaires liés à la production de viande, et certaines minimisent les potentiels effets sanitaires d’une trop forte consommation de viande. »