Fini les nouvelles routes, annonce le Pays de Galles

Pour atteindre la neutralité carbone, le Pays de Galles ne veut plus encourager la voiture. - Drone pics wales/CC by 4.0
Pour atteindre la neutralité carbone, le Pays de Galles ne veut plus encourager la voiture. - Drone pics wales/CC by 4.0
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Monde Transports Alternatives PolitiqueÀ quelques mois de la COP26, le gouvernement travailliste gallois a annoncé que tous les projets d’axes routiers sont interrompus, le temps d’examiner des alternatives plus écologiques.
Édimbourg (Grande-Bretagne), correspondance
« Nous sommes un petit pays mais lorsque vient le temps des décisions, nous sommes capables de grandes choses », assurait la ministre galloise de l’Environnement Lesley Griffiths en février 2021. Dont acte. Le 22 juin, le gouvernement travailliste au pouvoir depuis deux décennies a décidé de suspendre tous les nouveaux projets de construction de routes. Ils devront désormais être examinés par une commission qui s’assurera qu’ils n’entravent pas les ambitions climatiques de la petite nation britannique de trois millions d’habitants. Le pays s’est en effet engagé à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 [1]. Ce nouvel objectif a été inscrit dans la loi galloise en mars.
Le gouvernement de Mark Drakeford, réélu en mai, a donc décidé de passer la vitesse supérieure. Devant le parlement gallois, le vice-ministre en charge du changement climatique, Lee Waters, s’est montré catégorique : « Depuis 1990, nous avons diminué nos émissions de carbone de 31 % mais pour atteindre notre objectif de neutralité carbone d’ici 2050, il faudra faire beaucoup plus. Dans les dix prochaines années, nous allons devoir faire deux fois mieux en termes de réduction d’émissions que ce que nous avons réalisé ces trente dernières années si nous voulons éviter que la température s’emballe. Cela implique des changements radicaux dans toutes les sphères de nos vies. Les transports représentent quelque 17 % de nos émissions totales, ils doivent donc jouer leur rôle. »
Investir dans la maintenance des réseaux et le développement des transports en commun
Le but est d’investir dans la maintenance des réseaux existants et le développement des transports en commun plutôt que dans la construction de nouveaux axes routiers. Plusieurs projets d’importance, comme la liaison de plusieurs autoroutes dans la région du Deeside ou l’édification d’un nouveau pont au-dessus du détroit de Menai vont donc être suspendus, le temps que la commission prenne une décision. Certaines opérations déjà bien engagées verront néanmoins le jour, comme le développement de l’autoroute A465, connue sous le nom de « Heads of the Valleys Road », au sud du Pays du Galles. « Nous ne sommes pas des fanatiques », s’est défendu Lee Waters. La mesure a cependant fait l’objet d’une levée de boucliers dans l’opposition. Natasha Asghar, la ministre fantôme du Transport pour le parti conservateur a ainsi déclaré : « Nous traversons une période économique critique, à l’heure de la reprise, cette décision pourrait être catastrophique. »
Ce seul argument économique n’a cependant pas convaincu le gouvernement. D’après les dernières données disponibles (qui datent de 2018), le transport routier constitue, au pays de Galles, le troisième secteur le plus polluant après l’industrie manufacturière et la production d’électricité. En décembre 2020, un rapport du Climate Change Committee, un organisme indépendant chargé de conseiller les gouvernements du Royaume-Uni sur les questions climatiques, avait montré que les émissions galloises de ce secteur n’avaient quasiment pas diminué en trente ans. Très critique, le texte concluait qu’avec « les indicateurs actuels et le manque de stratégie globale pour 2050 – au niveau britannique comme gallois – le Pays de Galles n’est pas en mesure d’atteindre son objectif [de l’époque] de réduction de 80 % des émissions, encore moins la neutralité carbone ».

En juillet 2020, les Amis de la Terre au Pays de Galles avaient, de leur côté, publié une feuille de route, qui conseillait d’abandonner la construction de nouvelles routes au profit des transports en commun. Haf Elgar, la directrice de l’association galloise contactée par Reporterre, souligne que « le texte avait été très bien reçu par le gouvernement. Nous avions eu beaucoup de discussions montrant qu’ils avaient envie de s’attaquer au problème ». Pour autant, personne ne s’attendait à une décision aussi ambitieuse prise dans la foulée des élections de mai, et alors que la COP26 qui se tiendra à Glasgow en novembre approche. « C’est un très bon signe, cela prouve que le nouvel exécutif prend au sérieux l’urgence climatique », se réjouit la militante.